Évoluer pour permettre aux enfants défavorisés de lire

La lecture grâce à des services scolaires de qualité

Écrit par Mathieu Côté-Desjardins, Epoch Times
27.01.2014
  • Mme Yolande Brunelle, ancienne directrice de l’école Saint-Zotique située dans l’arrondissement Sud-Ouest, est très impliquée dans le projet de lecture chez les enfants défavorisés. (Yolande Brunelle)

Mme Yolande Brunelle est l’ancienne directrice de l’école Saint-Zotique située dans l’arrondissement Sud-Ouest (Saint-Henri - Petite-Bourgogne - Pointe-Saint-Charles). Elle est aussi une de ces agents de changement qui se penchent continuellement sur la question de la lecture chez les tout-petits en milieu défavorisé. Par le fait même, elle souhaite ardemment augmenter la qualité de l’instruction et du bien-être de toute la société. Toujours active, elle a aussi été lauréate du Prix Reconnaissance 2010 de la Faculté des sciences de l’éducation de l’UQAM.

«En 2007, avec l’équipe-école, on a réfléchi et on trouvait que le service n’était pas de qualité pour nos enfants de quatre ans qui pouvaient avoir accès à la maternelle. On a soumis un projet pilote à la Commission scolaire de Montréal (CSDM) qui l’a accepté. On a créé une maternelle quatre ans à temps plein. Nous avons aussi engagé les intervenants nécessaires travaillant autant dans la classe que dans la vie extrascolaire de l’enfant. J’ai travaillé avec une équipe de chercheurs de l’UQAM dans laquelle figurait la chercheuse Christa Japel, pour implanter un curriculum enrichi, un programme d’intervention précoce», explique l’ancienne enseignante au primaire, chargée de cours à l’université et conseillère pédagogique.

«L’approche par le jeu et la découverte est au cœur de la maternelle quatre ans [instaurée pour aider la scolarisation progressive des enfants dans les milieux défavorisés]. En plus, on a ajouté des programmes pour développer les habiletés sociales, le vocabulaire, la numératie [bases mathématiques] et bien plus par le moyen d’ateliers. Pour être spécifique, l’étendue du vocabulaire va faciliter sa reconnaissance des mots, mots repris dans différentes activités intégrées aux jeux. Les enfants peuvent faire beaucoup de choses, même dès trois ans. Tout ça contribue à la lecture. En plus, on va intervenir avec des activités de littératie [bases de lecture et écriture]. Ce sont des activités ludiques et de conscience phonologique. Par exemple, des activités proposées par les orthophonistes, faire des liens avec l’écrit et l’oral, apprendre à écrire son prénom, etc. Tout cela va contrer les facteurs de risques, autant au CPE qu’en maternelle quatre-cinq ans», résume Yolande Brunelle.

«Plus on échange, plus on discute, plus on lui raconte des histoires et fait réfléchir l’enfant, plus il développe son vocabulaire, vocabulaire qui a une incidence directe sur la lecture», ajoute-t-elle.

«Des statistiques démontrent que les enfants (quatre ans) issus des milieux défavorisés entendent 30 millions moins de mots qu’un enfant qui est issu d’un milieu favorisé», décrit la femme qui croit que les compétences en lecture sont la clé d’une intégration réussie dans notre société.  

«Au cours de l’année, il y a des enquêtes publiques qui sont sorties pour démontrer la très grande vulnérabilité de nos élèves de l’école Saint-Zotique, ce qui a motivé davantage notre réflexion. En 2007, la première enquête a été faite par la direction de la santé publique du Québec et la dernière, sur la maturité scolaire sur les élèves de maternelle cinq ans [qui doivent être âgés de 5 ans] par l’Institut de la statistique. Chaque école de Montréal en milieu défavorisé reçoit son portrait au cinq ans. À notre école, nos élèves étaient en grande, grande difficulté», fait comprendre celle qui a passé une partie de sa vie à soutenir la carrière politique de son mari, Gilles Duceppe, ancien chef du Bloc québécois.

L’école a un rôle

«On veut toucher les enfants qui ne fréquentent pas les centres de la petite enfance (CPE) avec la maternelle quatre ans. En milieu défavorisé, il a été démontré qu’il y a une faible fréquentation. Les CPE sont utilisés par des parents qui travaillent, ce qui n’est pas toujours le cas des parents défavorisés. Certains ne voient tout simplement pas la pertinence d’envoyer leurs enfants dans un CPE. Quand on a instauré notre maternelle quatre ans à temps plein, c’était aussi pour pallier ces réalités-là et donner un service de qualité», affirme Yolande Brunelle.

Mme Brunelle croit foncièrement en la maternelle pour faire développer les compétences en lecture, autant pour les familles défavorisées que pour la majorité. «La maternelle est vue comme plus naturelle, on s’y inscrit facilement. On avait toujours des listes d’attente à l’école Saint-Zotique. Dans la création des CPE, une des lacunes était que nous ne sommes pas allés chercher les enfants en milieu défavorisé», estime-t-elle.