Conseils au ministre des Finances

Parce que tout le monde sait ce que devrait faire Jim Flaherty

Écrit par Matthew Little, Epoch Times
10.02.2014
  • Le ministre des Finances canadien, Jim Flaherty (Matthew Little/Époque Times)

OTTAWA – Tout le monde a un conseil à donner au ministre des Finances, Jim Flaherty, avant le dépôt du budget le 11 février. Il est toutefois improbable qu’il tende une oreille attentive.

M. Flaherty a des idées arrêtées concernant la manière dont le pays devrait gérer ses finances : réduire les dépenses, atteindre l’équilibre budgétaire et stimuler l’économie avec des impôts peu élevés qui profitent le plus aux créateurs d’emplois comme les sociétés et les petites entreprises.

Les attentes sont peu élevées envers le prochain budget. On ne déviera pas du plan alors que M. Flaherty est plus préoccupé par sa promesse d’atteindre l’équilibre budgétaire avant 2015 que de surprendre les Canadiens avec des petits cadeaux.

C’est pourquoi le budget va probablement se perdre entre la luge et la planche à neige aux Olympiques, lorsque les Canadiens seront tournés vers leurs athlètes luttant pour l’or.

Et tandis qu’il est peu probable que les néodémocrates applaudissent le budget Flaherty, l’Opposition officielle ne présente pas vraiment d’alternative.

Ajustements mineurs du NPD

La critique néodémocrate en matière des finances, Peggy Nash, n’a pas voulu expliquer à quoi ressemblerait un budget du NPD lorsqu’on lui a posé la question à plusieurs reprises la semaine dernière.

Mme Nash a souligné quatre propositions qui représentent l’alternative de son parti au budget conservateur. Alors que le NPD critique en général l’approche des conservateurs, les quatre propositions constituent spécifiquement ce que le NPD demande.

Les mesures ont une saveur populiste : imposer un plafond sur les frais de guichets automatiques et de cartes de crédit; créer des emplois en offrant aux petites entreprises des mesures incitatives fiscales; ressusciter le programme écoÉnergie Rénovation et annuler les coupes au ministère des Anciens Combattants.

La mesure pour créer des emplois offrirait aux petites entreprises un crédit d’impôt de 1000 dollars pour chaque nouvelle embauche. Un deuxième crédit serait offert aux entreprises qui engagent un jeune avec un crédit de 1000 dollars additionnels pour la formation.

Mme Nash affirme que les crédits compenseraient les coûts du régime de pensions et de l’assurance-emploi et qu’ils favoriseraient la création d’emplois. Le crédit aux petites entreprises coûterait à l’État 100 millions de dollars, alors que le crédit jeunesse environ 55 millions.

«Nous estimons que ce sont des mesures pratiques et abordables qui vont cibler certains de nos pires problèmes de chômage», a-t-elle indiqué.

En ce qui concerne les cartes de crédit, Mme Nash veut que les banques offrent des cartes sans fioritures ni points avec un taux d’intérêt ancré à 5 % au-dessus du taux préférentiel.

Outre cela et les appels aux investissements accélérés dans l’infrastructure, Mme Nash a seulement commenté que le NPD n’augmenterait pas les impôts des particuliers et ne sacrifierait pas la croissance économique pour un budget équilibré.

«Il faut vraiment trouver l’équilibre entre le désir de retrouver l’équilibre budgétaire et permettre à l’économie de croître», a-t-elle affirmé, ajoutant que le gouvernement faisait le contraire.

Le budget alternatif du CCPA

Le Centre canadien de politiques alternatives (CCPA) a pour sa part offert une vision beaucoup plus complète de ce à quoi le budget devrait ressembler.

Le groupe affirme que le ministre Flaherty gère mal l’économie en offrant des baisses d’impôts à ceux qui n’en n’ont pas besoin plutôt que d’aider les revenus des Canadiens moyens qui maintiennent l’économie à flot en accumulant des niveaux records de dettes.

Le CCPA augmenterait légèrement les impôts de ceux qui gagnent le plus et il créerait une nouvelle tranche d’imposition de 35 % pour ceux qui gagnent 250 000 dollars ou plus, ce qui générerait 2,5 milliards en impôt à l’État. Les taux d’imposition actuels plafonnent à 29 % pour ceux qui gagnent plus de 136 270 dollars.

Le groupe retournerait également au taux de 2007 pour les impôts des entreprises, soit 22 % plutôt que l’actuel 15 %, ce qui générerait 9,8 milliards de dollars. En augmentant les impôts des petites entreprises de 11 à 15 %, 1,75 milliard de dollars de plus pourraient également être générés.

Le CCPA affirme que leur plan vise à faire diminuer la pauvreté tout en alimentant la croissance économique.

David Macdonald, économiste principal au CCPA, affirme que le Canada a un nombre disproportionné d’enfants qui vivent sous le seuil de la pauvreté.

Le budget alternatif du groupe augmenterait les revenus pour les 60 % des familles au bas de l’échelle, tandis que la classe moyenne élevée contribuerait environ 2 % de plus de ses revenus. Ceux qui gagnent plus de 150 000 dollars paieraient 6 % de plus, en grande partie en ne pouvant plus profiter de certaines failles dans le système d’imposition.

M. Macdonald dénonce le plan de fractionnement du revenu que le gouvernement veut mettre en place, affirmant que cela ne servirait à rien pour 86 % des familles.

«Le fractionnement du revenu fournirait au 5 % des familles les plus riches une augmentation moyenne de revenu de 1000 dollars, tandis que les 60 % au bas de l’échelle verraient une augmentation moyenne d’environ 50 dollars, ce qui exacerbe davantage l’inégalité des revenus.»

Les conservateurs ont fait du fractionnement du revenu le diamant devant être offert en 2015 lorsque le pays atteindra l’équilibre budgétaire. Cela va permettre aux plus riches de partager leur revenu avec leur épouse afin d’accéder à une tranche d’imposition plus basse. Il s’agit d’un plan dénoncé par des groupes de gauche comme de droite.

Le CCPA conserverait cet argent pour le dépenser sur l’infrastructure comme le transport, l’habitation et les initiatives provinciales d’éducation en bas âge et les études post-secondaires.

  • David Macdonald, économiste au Centre canadien de politiques alternatives, affirme que le prochain budget devrait faire davantage pour les Canadiens moins fortunés. (Matthew Little/Époque Times

L’autre côté

Tandis que le NPD et le CCPA soutiennent en général les dépenses gouvernementales pour stimuler l’économie, le Fraser Institute et le C.D. Howe Institute préféreraient que le gouvernement réduise son empreinte économique et qu’il laisse le secteur privé combler le vide.

Les deux instituts s’inquiètent que le gouvernement base ses plans sur des projections de revenus trop optimistes.

Pour respecter son échéancier de 2015 pour atteindre l’équilibre budgétaire, Sean Speer du Fraser Institute affirme que le gouvernement peut réduire les dépenses tout en n’affectant pas les programmes dont dépendent les Canadiens.

«On parle de l’assistance sociale aux entreprises et les subventions offertes aux sociétés d’État inefficaces comme Via Rail», suggère-t-il.

Le groupe de réflexion veut aussi que les fonctionnaires écopent en matière de pensions, d’âge de retraite et de salaires.

Les deux instituts veulent aussi voir l’abolition des crédits d’impôt compliqués des conservateurs et ils font écho à la demande du CCPA d’abandonner le fractionnement du revenu.

Le C.D. Howe Institute a présenté son propre budget alternatif à la fin janvier se concentrant sur la diminution du coût des fonctionnaires, particulièrement en ce qui a trait au régime de pensions.

L’institut affirme que le coût moyen pour un fonctionnaire à plein temps au fédéral a pratiquement doublé de 2003 à 2013, passant de 66 500 à 127 400 dollars.

«Au cours de la même période, la compensation par emploi dans le secteur privé au Canada a augmenté environ du tiers, passant de 38 600 à 52 100 $», indique le budget alternatif.

Le régime de pensions du secteur public représente un boulet constant et coûteux qui doit être corrigé, affirme l’institut.

Tandis que le Canadien moyen prépare sa retraite en investissant dans le marché, les retours sont bien moindres et beaucoup plus incertains que ceux offerts par le régime de pensions du gouvernement qui garantit un montant compensatoire.

Le C.D. Howe Institute veut que les employés fédéraux assument davantage le coût et les risques des régimes de pension et de soins de santé.

En payant 1,9 à 3,3 milliards de moins aux employés fédéraux, le C.D. Howe affirme que le gouvernement peut baisser les impôts. Cette baisse de salaire réduirait également la compétition entre les travailleurs et les employeurs du secteur privé pourraient payer des salaires moins élevés ou offrir moins d’avantages et utiliser cet argent pour embaucher ou investir.

C’est une suggestion qui est quelque peu bouleversante pour le CCPA, alors qu’il considère une main- d’œuvre syndiquée comme le gage des salaires de la classe moyenne.

Le C.D. Howe veut aussi qu’une baisse de 1 % de l’impôt sur le revenu soit compensée par une augmentation de 1 % de la TPS. Le budget du groupe affirme qu’un tel changement aurait un coût uniforme et rapporterait 900 millions de dollars en revenus fédéraux et 800 millions par année aux gouvernements provinciaux, puisque les impôts sur le revenu découragent les gens de travailler, particulièrement les mères monoparentales et le deuxième soutien économique des familles avec des enfants.

Il est peu probable que le budget de Flaherty fasse des heureux à 100 %. Le gouvernement va sans doute affirmer que cela démontre qu’il a trouvé l’équilibre entre des intérêts divergents, alors que ses détracteurs vont plutôt dire que c’est parce qu’il s’agit d’un budget passif.

Version originale : No Advice for the Finance Minister