OPINION

Trois mariages 
et un enterrement

Écrit par Aurélien Girard
08.02.2014
  • Le premier ministre britannique David Cameron et le président français François Hollande arrivent au sommet bilatéral à Brize Norton près d’Oxford le 31 janvier 2014. (Etienne Laurent/AFP/Getty Images)

Dans la comédie anglaise du 31 janvier et comme dans tout film du genre, c’est au pub, devant une bière, que le président français et le Premier ministre britannique devaient tenter de parler d’Europe. Prudemment, pour ce premier sommet bilatéral France-Royaume-Uni depuis l’arrivée au pouvoir de François Hollande, l’accent avait été mis sur la coopération militaire, probablement un des seuls domaines où gouvernements britannique et français partagent une vision un brin semblable. Les deux plus grandes armées européennes, face à une pression budgétaire croissante, ont amorcé en 2010 un important effort de mutualisation des moyens, dont messieurs Hollande et Cameron ont donné une nouvelle illustration en annonçant, en particulier, plus de 200 millions d’euros d’investissements communs sur un programme de drones furtifs.

Quant aux autres sujets, François Hollande voulait bien parler de tout, sauf de mesdames Royal, Trierweiler et Gayet, à la différence des tabloïds anglais qui eux, ne voulaient parler que de ça. La presse locale a donné autant de place aux escapades en scooter du président qu’aux désaccords avec David Cameron sur l’avenir de l’Europe, un journaliste allant jusqu’à demander au président en conférence de presse ce qu’il pensait d’avoir «ridiculisé» la France.

D’un côté comme de l’autre du Channel, les attentes étaient donc significativement plates pour une rencontre pourtant qualifiée de sommet. M. Cameron rappela élégamment qu’«un conservateur britannique et un socialiste français ne peuvent être d’accord sur tout», tentant d’expliquer ainsi sans avoir à le détailler, pourquoi ils n’étaient d’accord sur rien. Suite à quoi, M. Hollande n’attendit même pas la chaleur feutrée du pub pour annoncer que les re-négociations attendues par la Grande-Bretagne sur les termes de son adhésion à l’Union pouvaient bien attendre. Sans être tout à fait agacé, le président regrettait probablement que les difficultés de son gouvernement à inverser la courbe du chômage servent d’argument de campagne aux conservateurs britanniques. Car, après avoir bruyamment ouvert les bras aux Français souffrant dans l’Hexagone de l’imposition à 75%, M. Cameron ne s’est pas privé de prendre la France comme illustration, avec son chômage élevé et le désamour des investisseurs, des conséquences d’une politique dite travailliste. «Un retour à cette folie économique dévasterait notre pays», prophétisait Cameron début janvier.

Alors, finalement, le Premier ministre et le président n’ont pas bu de bière ensemble et ont juste accepté une séance de photos durant laquelle ils ont échangé avec le patron du pub le Swan Inn, comme pour éviter d’avoir à continuer de se parler. Enterrant les espoirs d’une Europe un jour fédérale, David Cameron garde l’objectif de soumettre à la population britannique la question du maintien de son pays dans l’Union, avec le levier de la reprise économique de son pays en 2013, qu’il considère ne devoir qu’à la liberté prise par le Royaume-Uni dans sa façon d’aborder la crise.

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