Les victimes de la refonte du système de propagande

Écrit par Lu Chen, Matthew Robertson, Epoch Times
11.06.2014
  • 13 août 2010: Silhouette des bâtiments de CCTV (Télévision centrale de Chine) à Pékin. CCTV joue un rôle clé dans le système de propagande du régime chinois qui a récemment connu une série de remaniements politiques qui ont conduit de nombreux cadres au suicide. (Franko Lee/AFP/Getty Images)

Une vague de suicides et de cas de maladies a récemment été signalée parmi les représentants du système de propagande du Parti communiste chinois, une conséquence évidente des immenses pressions exercées par le haut dirigeant du Parti Xi Jinping qui remanie les responsables de ce système afin d’en renforcer le contrôle.

Depuis plus d’une décennie, le système de propagande était maintenu sous le contrôle strict de cadres fidèles à ou directement nommés par l’ancien chef du régime Jiang Zemin qui a dirigé le pays en occupant différents postes entre 1989 et 2004. Le récent grand remaniement constitue une nouvelle étape dans la consolidation du pouvoir de Xi Jinping sur le Parti et l’appareil d’État, souvent au détriment de la faction de Jiang Zemin et de son vaste réseau.

Au cours des derniers mois, six suicides ont été rapportés parmi les hauts responsables de la propagande en Chine, parfois à quelques jours d’intervalle. Le système de propagande inclut la bureaucratie centralisée à Pékin et un appareil tentaculaire couvrant chaque niveau des autorités dans toute la Chine, ainsi que les journaux, sites web, magazines, maisons d’édition, chaînes de télévision contrôlés par l’état.

L’importance de contrôler l’appareil de propagande n’a jamais été sous-estimée par les dirigeants du Parti communiste. Anne-Marie Brady, professeur en politique chinoise, a écrit dans un livre publié en 2008: «Comme les dirigeants [du Parti communiste]... en sont parfaitement conscients, quiconque contrôle le système de propagande chinois peut dominer le système politique.»

Une série de décès

Il y a deux semaines, Zhou Honglang, directeur du Centre d’information de la ville de Jiangshan, province du Zhejiang, s’est suicidé en sautant par la fenêtre de son bureau situé au cinquième étage. Au début du mois de mai, une série de suicides ont eu lieu à quelques jours d’intervalle.

Le 8 mai dernier, Zhang Jingwu, âgé de 47 ans, directeur général d’un groupe de presse de Shenzhen, a été retrouvé mort dans le fossé d’un parc de Shenzhen. Une lettre de suicide a été trouvée près de lui. Selon des rumeurs, il souffrait de dépression.

He Weixing, âgé de 49 ans, directeur adjoint de la chaîne de radio et télévision de Xiangxiang, province du Hunan, a été retrouvé pendu le 6 mai dans la cage d’escalier de son bureau. «C’est douloureux, douloureux, douloureux. La vie est dure, le travail est difficile... Diligent, incapable d’accomplir quoi que ce soit, d’énormes pressions de travail...», disait sa lettre de suicide.

Xu Xing, âgé de 35 ans, rédacteur en chef adjoint de Metro Express, un journal dépendant du Hangzhou Daily, s’est également suicidé le 4 mai. Sa famille a déclaré qu’il avait récemment subi des pressions au travail, qu’il était déprimé et avait perdu le sommeil.

Song Bin, directeur adjoint et rédacteur en chef du bureau de la province du Anhui de l’agence de presse officielle Xinhua, a été retrouvé mort dans son bureau fin avril. Selon le magazine d’affaires Caixin, il s’est pendu.

Mais le suicide le plus remarquable a eu lieu en mars. Li Wufeng, directeur adjoint du Bureau d’information du Conseil d’État – une importante agence également appelée Bureau de la Propagande – s’est également suicidé en sautant d’un immeuble. Li Wufeng souffrait également de dépression, selon Takungpao, un journal pro-Pékin établi à Hong Kong.

Cette avalanche de décès au sein du système de propagande, sur lesquels des informations ont par la suite été censurées (probablement sur les ordres d’anciens collègues des personnes décédées), a généré de nombreuses spéculations et discussions sur l’Internet chinois.

Les explications données impliquaient tant des raisons personnelles que politiques.

«Ils étaient très conscients qu’ils étaient incapables de faire quoi que ce soit, même en voyant tant d’injustice,» a écrit l’internaute Huayangli sur Weibo, un réseau social populaire chinois.

Yang Qinglin, un éminent journaliste principal du journal Singpao, a déclaré: «Ils ont été déçus par la société et la vie. Ils ont donc décidé de partir!»

Han Lianchao, chercheur de l’Institut Hudson de Washington, a confié à Voice of America: «Le Parti communiste contrôle 100% des médias en Chine. Actuellement, les normes de commercialisation exigent des médias qu’ils soient responsables envers leurs lecteurs et qu’ils produisent des informations objectives. L’incohérence de ces deux situations exerce d’importantes pressions sur les employés de la propagande. Je pense que certains de ces décès peuvent être aussi liés à la campagne anti-corruption.»

«Mais il peut y avoir des raisons au-delà de la simple satisfaction du travail,» a-t-il ajouté.

Redistribution du personnel

Dans les années 2000, les principales fonctions dans le système de propagande étaient tenues par Liu Yunshan et Li Changchun, tous deux nommés à leurs postes respectifs sous le règne de Jiang Zemin. Liu Yunshan a été directeur du Département central de la propagande de 2002 à 2012, tout en ayant d’autres fonctions importantes dans le secteur de la propagande et Li Changchun a dirigé le Groupe central de la propagande et du travail intellectuel, également entre 2002 et 2012.

Xi Jinping est arrivé au pouvoir en novembre 2012 et a depuis amorcé une érosion continue de la base de pouvoir de Jiang Zemin au sein du Parti et des autorités.

Le système de propagande en particulier, a été secoué ces derniers mois par une série de nouvelles nominations après le licenciement de certains hauts responsables. Ces purges ont en apparence eu lieu suite à des accusations de corruption. Mais leur but réel était probablement de nommer de nouveaux cadres fidèles au régime de Xi Jinping.

Ces changements ont eu lieu au sein des principaux médias de l’État et des bureaux de la propagande dans toute la Chine. Trois cas de licenciements de hauts responsables dans des grands groupes médiatiques de diverses provinces de Chine offrent les exemples les plus parlants.

Le 5 mai dernier, Zhang Qigeng, directeur général du Hubei Daily Media Group géré par l’État, a été licencié et démis de ses fonctions du Comité du Parti avant d’être placé sous enquête pour «allégations de violations graves de la loi» selon la Commission de contrôle de la discipline de la province du Hubei. Le Hubei Media Group est la plus grande entreprise médiatique de la province avec un actif de 5 milliards de yuan (593 millions d’euros), 11 journaux, 5 sites d’information en ligne, une maison d’édition et 8 entreprises filiales. Ses journaux ont un tirage quotidien de 8 millions d’exemplaires.

Zhang Qigeng était une figure populaire dans le milieu des médias du Hubei, après avoir fondé le quotidien populaire Chutian Metropolis Daily, qui a prospéré sous sa direction durant une décennie. Les rapports officiels n’ont pas donné de détails sur ses présumés délits.

Shu Zhan, président du Fujian Media Group et de la chaîne de télévision provinciale de la province du Fujian, a été placé sous enquête par la Commission provinciale de contrôle de la discipline le 4 mai, suite à la visite de l’équipe d’inspection des autorités centrales. Shu Zhan, également secrétaire du Parti de la chaîne de télévision, a ensuite été inculpé de «violations graves de la loi».

Gao Jianyun, directeur adjoint du cinquième bureau de l’Agence de propagande à l’étranger, a été placé sous enquête le 18 avril pour «violations graves de la loi.»

Outre ces licenciements, le Quotidien du Peuple a également été secoué. Au mois d’avril, les autorités ont annoncé le licenciement en l’espace de cinq jours de quatre principaux responsables des informations, parmi lesquels le directeur, le directeur adjoint, le rédacteur en chef et un rédacteur adjoint.

Le 30 avril, le nouveau directeur du Quotidien du Peuple a été présenté. Il s’agit de Yang Zhenwu, ancien rédacteur en chef du journal et allié bien connu du dirigeant du Parti communiste Xi Jinping.

Version en anglais: Purge of Propaganda System in China Comes With String of Suicides

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