L’ancien boss de la sécurité placé sous enquête

Le gros tigre est tombé dans les filets de Xi Jinping

Écrit par Stephen Gregory, Epoch Times
30.07.2014
  • 14 mai 2013: plus de 8.000 pratiquants de Falun Dafa participent à un défilé pour la Journée du Falun Dafa. Entre 2002 et 2012, Zhou Yongkang a porté la plus grande responsabilité dans la persécution des pratiquants du Falun Gong. (Edward Dai/Epoch Times)

Zhou Yongkang, l’un des personnages les plus puissants du Parti communiste chinois (PCC) et l’un des premiers responsables de la persécution de la pratique spirituelle du Falun Gong, fait désormais officiellement l’objet d’une enquête.

Dans un bref article publié le 29 juillet, l’agence de presse officielle Xinhua annonçait que le Comité central avait ouvert une enquête sur Zhou Yongkang pour «graves violations de la discipline».

Zhou Yongkang est le plus gros des «tigres» – cadres supérieurs du Parti – pris dans les filets de la campagne «anticorruption» de Xi Jinping qui, à ce jour, a déjà écarté plus de 400 responsables.

Zhou Yongkang est le plus important cadre à faire l’objet d’une enquête officielle.

Cette enquête brise une règle tacite selon laquelle les membres du Comité permanent du Politburo – un petit groupe d’hommes au sommet de la hiérarchie du Parti – ne peuvent pas être arrêtés.

  • 9 mars 2012: alors dirigeant de la sécurité intérieure chinoise, Zhou Yongkang participe au Congrès national du peuple à Pékin. Xinhua, l’agence officielle de presse du régime chinois, a annoncé ce mardi que Zhou Yongkang avait été arrêté. (AP Photo/Ng Han Guan)

En plus d’avoir siégé au Comité permanent de 2007 à 2012, Zhou Yongkang a également été très proche des appareils de la sécurité et de la justice du régime chinois. Son pouvoir était tel que les observateurs le décrivaient comme étant à la tête d’un second pôle de pouvoir au sein du Parti, en rivalité directe avec l’autorité du secrétaire général.

L’annonce de l’enquête est survenue après une semaine de rumeurs courant entre les dirigeants du Parti. Après le retour de Xi Jinping d’un voyage en Amérique du Sud le 25 juillet, les autres membres du Comité permanent n’ont pas été vus en public. 

Selon certains rapports, ils se trouvaient à Beidahe, le centre balnéaire d’été des dirigeants, où ils auraient discuté du cas de Zhou Yongkang avec d’anciens dirigeants du Parti.

«Le moment d’annoncer la nouvelle doit être fixé par les membres du Comité permanent», a expliqué Heng He, spécialiste de la Chine et chroniqueur d’Époque Times, lors d’un entretien téléphonique. «Ils devaient rendre la décision officielle. Si quelque chose se produit plus tard, tout le monde a signé et tout le monde est responsable. Aucun bouc émissaire n’est toléré.»

Dans les jours précédant directement l’arrestation, l’armée chinoise avait procédé à des exercices d’une ampleur sans précédent. Ces exercices devaient envoyer un message, selon Heng He.

«Les exercices ont mis en garde quiconque voudrait mettre Xi Jinping au défi, ouvertement ou à couvert», a expliqué Heng He. «Les exercices montrent qui est aux commandes.»

  • 9 mars 2012: Zhou Yongkang (droite), alors membre du Comité permanent du Politburo responsable de la sécurité, écoute Wang Lequan, président adjoint du Comité des affaires politiques et légales lors d’une session plénière du Congrès national du peuple à Pékin. (AP Photo/Ng Han Guan)

Tentative de coup d’État

Alors que la décision d’annoncer l’arrestation de Zhou Yongkang a peut-être été prise au cours des derniers jours à Beidahe, le sort de Zhou Yongkang lui-même est sans doute scellé depuis le 6 février 2012, lorsque le directeur de la police de Chongqing Wang Lijun s’est enfui au consulat américain de Chengdu.

Wang Lijun était le bras droit et le sbire de Bo Xilai, à la tête du Parti dans la mégapole de Chongqing dans le sud-ouest de la Chine. Leur relation s’est désintégrée à partir du moment où le corps disciplinaire a commencé à s’intéresser à Wang Lijun. Bo Xilai a alors perdu confiance en lui et Wang Lijun a craint pour sa vie.

Selon des sources internes au PCC, lorsque le consulat américain a restitué Wang Lijun aux responsables chinois, ce dernier a révélé un coup d’État monté par Bo Xilai, Zhou Yongkang et d’autres membres de la faction loyale à l’ancien dirigeant du Parti, Jiang Zemin.

Xi Jinping devait prendre la tête du Parti en novembre 2012. Bo Xilai et Zhou Yongkang avaient prévu de le démettre de son poste peu de temps après.

Selon des sources internes au Parti, ce coup devait assurer que la faction de Jiang Zemin ne soit jamais tenue responsable des crimes commis au cours de la campagne de persécution du Falun Gong menée par Jiang Zemin.

En juillet 1999, Jiang Zemin avait ordonné au Parti d’«éradiquer» la pratique spirituelle du Falun Gong. Jiang Zemin craignait le grand nombre de Chinois – entre 70 et 100 millions de personnes, selon des rapports officiels – qui avaient commencé à pratiquer. Il craignait également que les principes moraux traditionnels du Falun Gong ne représentent un défi à l’idéologie du Parti communiste.

Enquêtes

Les dirigeants du Parti ont repoussé la faction de Jiang Zemin et monté patiemment et systématiquement les pièces d’un dossier contre Zhou Yongkang.

En avril 2012, Hu Jintao, alors dirigeant du Parti, avait démis Bo Xilai de ses positions au sein du Parti. En septembre 2013, Bo Xilai a été reconnu coupable de corruption, de détournement de fonds et d’abus de pouvoir.

Epoch Times avait rapporté qu’en mai 2012, Hu Jintao avait ouvert une enquête sur Zhou Yongkang, mais cela n’avait pas été annoncé.

«Zhou Yongkang est un si gros tigre, il n’est pas facile de l’écarter. De plus, d’autres puissants personnages le soutiennent, comme Jiang Zemin», a expliqué Heng He. «Xi Jinping devait s’assurer de bases solides pour l’écarter.»

  • 14 mars 2012 : Xu Caihou (droite), président adjoint de la Commission centrale de l’armée, qui contrôle l’armée chinoise, et le secrétaire du Parti de Chongqing Bo Xilai, participent à la session de clôture du Congrès national du peuple à Pékin. (AP Photo/Vincent Thian)

Sous la direction de Xi Jinping, le Parti a mené cette dernière année des séries d’enquêtes visant les acolytes et les anciens subordonnés de Zhou Yongkang, défaisant ainsi tout un réseau d’individus qui lui étaient loyaux.

Zhou Yongkang puisait son pouvoir de trois sources. Au début de sa carrière, il avait joué un grand rôle dans le secteur pétrolier. Il a pris la direction du Parti dans la province du Sichuan en 1999 et en 2002, il a commencé à occuper des postes de direction dans l’appareil de sécurité.

Dans l’enquête visant Zhou Yongkang, des individus au pouvoir substantiel ont été visés, comme le cadre pétrolier Jiang Jiemen, le ministre adjoint de la sécurité publique Li Dongsheng et le numéro 2 de la province du Sichuan, Li Chuncheng.

Il y a un mois, six des anciens secrétaires de Zhou Yongkang avaient été arrêtés.

«Ses secrétaires connaissent chaque détail des crimes de Zhou Yongkang», a commenté Heng He. «Une fois qu’ils ont été arrêtés, tout le monde savait que le tour de Zhou Yongkang viendrait bientôt.»

Crimes

Comme Bo Xilai et d’autres dirigeants du Parti évincés par Xi Jinping, Zhou Yongkang sera sans aucun doute jugé pour corruption.

Bien que la corruption de Zhou Yongkang puisse être de grande ampleur, ce n’est pas la raison pour laquelle Xi Jinping le poursuit.

«Xi Jinping ne pouvait éviter d’arrêter Zhou Yongkang», a dit Heng He. «Si Xi Jinping trahit la moindre faiblesse envers Zhou Yongkang, il se fera manger vivant.»

Les accusations contre Zhou Yongkang ne mentionneront pas ses crimes les plus graves, commis au cours de la persécution du Falun Gong.

En 2002, Jiang Zemin a promu Zhou Yongkang de son siège de dirigeant de la province du Sichuan au poste de ministre de la Sécurité publique. Zhou Yongkang avait 30 ans d’expérience dans le secteur pétrolier, mais aucune connaissance du travail dans la police.

En 2004, Jiang Zemin a nommé Zhou Yongkang sous-directeur de la Commission des affaires politiques et législatives (CAPL), l’organe du Parti ayant autorité sur presque tous les aspects de l’application de la loi, y compris la police, la police armée, les tribunaux, le parquet, les camps de travail et les prisons.

En 2007, alors que Jiang Zemin avait pris sa retraite depuis plusieurs années, il a réussi à nommer Zhou Yongkang directeur de la CAPL et lui a ouvert un siège au Comité permanent du Politburo.

L’avancement rapide de Zhou Yongkang suit le même chemin que celui de nombreux autres fidèles de Jiang Zemin. Les trajectoires des carrières de Bo Xilai et de Li Dongsheng, par exemple, démontrent une très rapide ascension dans la hiérarchie du Parti et des rôles clés dans la persécution des pratiquants de Falun Gong. 

Selon Heng He, Zhou Yongkang porte la principale responsabilité de la persécution des pratiquants de Falun Gong entre 2002 et 2012.

«Il avait tellement de pouvoir», a-t-il expliqué. «Et il a fait avancer la persécution.»

Selon le Centre d’information du Falun Dafa (CIFD), depuis le début de la persécution en 1999, des centaines de milliers de pratiquants sont détenus à chaque instant.

Ces personnes détenues ont souvent été soumises au lavage de cerveau et à la torture. Selon le CIFD, plus de 3700 cas de pratiquants morts de la torture et des mauvais traitements ont été confirmés. En raison du blocage des informations maintenu par le régime chinois, le véritable nombre de morts est estimé comme étant plusieurs fois plus élevé.

Par ailleurs, les chercheurs estiment que des dizaines de milliers de pratiquants ont été tués en ayant leurs organes prélevés de force dans le but d’une transplantation.

Maintenant que des accusations sont préparées contre Zhou Yongkang, sous le système du PCC, le verdict de culpabilité est quasi assuré.

Ce verdict ne mettra pas fin à la campagne de Xi Jinping contre la faction de Jiang Zemin.

«Jiang Zemin a toujours cherché, depuis qu’il a quitté ses fonctions, à influencer le Parti, et une faction lui reste toujours loyale», a rappelé Heng He. «Dans le cas de Jiang Zemin, Xi Jinping n’a pas besoin de l’arrêter. Il doit simplement lui arracher tous les fils du pouvoir, un par un.»

Version en anglais: Former Security Head Zhou Yongkang Investigated in China