Les populations occidentales ne sont pas les seules à exprimer de fortes inquiétudes face aux activités des mouvements islamistes. Alors que l’État islamique en Irak et au Levant est parvenu à conquérir une partie du territoire irakien, un sondage du Pew Research Center révèle qu’une grande majorité des ressortissants de pays comprenant d’importantes communautés musulmanes, en Afrique, en Asie et au Proche-Orient, sont préoccupés par le phénomène extrémiste. Les principaux mouvements islamistes, le Hamas palestinien, Al-Qaïda, le Hezbollah libanais, Boko Haram et les talibans, ainsi que leurs méthodes, sont rejetés par une majorité de citoyens des pays musulmans.

Selon cette étude, la préoccupation face à l’extrémisme islamiste est en hausse dans les pays où habitent d’importantes communautés musulmanes. Entre 2013 et 2014, la proportion de personnes se déclarant inquiètes par le phénomène est passée de 81% à 92% au Liban, de 71% à 80% en Tunisie, de 37% à 50% en Turquie, et la tendance se confirme dans les autres pays étudiés. Le Sénégal et l’Indonésie se distinguent avec des taux inférieurs à 50% (46% et 39% respectivement).

La défiance vis-à-vis d’Al-Qaïda est partout palpable avec un rejet quasi unanime de l’organisation terroriste. Au Moyen-Orient (Israël : 97%, Liban : 96%, Turquie: 85%, Égypte : 81%), en Afrique (Tanzanie: 76%, Tunisie: 74%), comme en Asie (Bangladesh: 66%, Indonésie: 56%), la majorité des sondés se déclare hostile au mouvement djihadiste. Il est à noter que les taux relativement bas en Asie s’expliquent par la présence d’une forte proportion de sondés se déclarant sans opinion. Toutefois, dans les territoires palestiniens, un quart des interviewés se déclare favorable à Al-Qaïda. Ce taux est de 18% en Malaisie et au Nigeria, ce qui prouve que l’organisation continue de séduire une frange marginale de l’opinion musulmane.

En ce qui concerne les mouvements géographiquement localisés, huit nigérians sur dix se déclarent hostiles au mouvement Boko Haram. Cet avis est partagé tant par la communauté musulmane que chrétienne. Au Pakistan, les talibans recueillent 8% d’avis favorables, alors que 59% de la population condamne le mouvement (sans opinion: 33%). Le cas du Hezbollah est plus complexe, puisque le «parti de Dieu» divise les communautés au Liban. En effet, alors que les chrétiens et les sunnites lui sont majoritairement hostiles (69% et 88% respectivement), 86% des chiites lui accordent leur confiance.

Enfin, contrairement aux idées reçues, une majorité de Palestiniens sont opposés au Hamas. Le parti, classé organisation terroriste par le Canada et les États-Unis, ne recueille que 35% d’opinion favorable en Palestine, alors que 47% des Cisjordaniens et 63% des Gazaouis lui sont hostiles.

Enfin, au-delà des organisations, il apparaît que les populations musulmanes accordent de moins en moins de crédit aux méthodes terroristes, en particulier les attaques suicides. À la question «pensez-vous que les attentats suicides ou toute autre forme de violence contre les populations civiles peuvent être justifiés pour défendre l’Islam contre ses ennemis?», 74% des Libanais musulmans, 43% des Jordaniens et 33% des Pakistanais répondaient «oui» en 2002. En 2014, ces taux sont respectivement de 29%, 15% et 3%.

Source : Affaires-stratégiques.info