2006: sombre bilan pour les droits de l'homme

Écrit par Noé Chartier, La Grande Époque – Montréal
01.02.2005

Dans son rapport World Report 2007, l’organisation Human Rights Watch (HRW) trace un portrait peu reluisant de la situation mondiale des droits de l’homme.

La première phrase d’introduction de la publication va ainsi : «Quel gouvernement aujourd’hui est un champion des droits de l’homme?» Pour HRW, la réponse à cette question n’est certainement pas celui des États-Unis. En utilisant la torture lors d’interrogatoires, en gardant des gens en détention sans procès et en commettant nombre de bévues et atrocités dans sa «guerre contre le terrorisme», Washington aurait perdu son influence positive sur la scène internationale

 

 

  • Le président américain, George W. Bush, en compagnie du vice-président, Dick Cheney.(Pool: Pool / 2007 Getty Images)

 

«Bush peut encore promouvoir la “démocratie”, indique le rapport, mais il ne peut se battre avec crédibilité pour des droits qu’il bafoue.»

Cette chute de l’autorité de la voix morale américaine dans le monde laisse donc un énorme vide. Pratiquement aucun gouvernement n’ose tenir le flambeau des droits de la personne, laissant plus souvent qu’autrement dicter les intérêts économiques.

Human Rights Watch se demande si le nouveau Congrès américain pourra, ou aura la volonté, de renverser la vapeur, malgré l’exécutif encore contrôlé par George W. Bush et son entourage. Son administration est largement perçue comme une faillite totale.

Alors qui pourra bien combler le vide? HRW espère que l’Union européenne (UE) pourra prendre le leadership en main, mais pour ce faire, elle devra régler ses contradictions internes. Au sein de l’Union se produit un nivellement vers le bas, plutôt que vers le haut. Les initiatives en matière de droits de l’homme doivent être votées à l’unanimité, et certains pays bloquent les progrès en favorisant leurs relations bilatérales avec différents pays violateurs, gouvernements meurtriers, dictateurs, etc. Par exemple, l’Allemagne, avec ses priorités de «sécurité énergétique» semblables à l’attitude américaine, n’hésite pas à conserver de bons termes avec la Russie. La France, quant à elle, souhaite la levée de l’embargo sur la vente d’armes à la Chine, imposé après les massacres concernant les événements de la Place Tian An Men en 1989.

HRW souligne que «l’expérience européenne a aidé à établir la paix et la prospérité pour ceux assez chanceux de vivre à l’intérieur de ses frontières, mais l’UE échoue pitoyablement à ses promesses de défendre les droits dans le monde».

Une des solutions, selon l’organisation de défense des droits de l’homme, serait d’allonger la présidence de l’UE, qui est présentement de six mois, pour faciliter l’application de politiques à long terme. En somme, les pays membres doivent réaliser que le statu quo est inacceptable.

Tandis qu’il y a un manque de leadership en ce qui a trait aux droits de la personne, HRW note que l’influence de la Chine et de la Russie augmente. Mais cela ne fait qu’aggraver la situation, car la Chine commerce avec l’étranger sans se soucier des comportements de ses partenaires et la Russie, avec ses ressources énergétiques, adopte une attitude musclée pour forcer la main de ses clients. Les deux pays, qui sont eux-mêmes des violateurs notoires, font face à de moins en moins de critiques en raison de leur poids économique.

La question du Darfour est évidemment soulignée dans le rapport et qualifiée de problème le plus urgent. HRW note la déclaration de l’ONU de septembre 2005 visant à protéger les peuples des génocides et met en relief la totale inaction face à la crise. «Cet engagement est demeuré vide, le Darfour continue d’être synonyme de meurtres à grande échelle, de viols, de déplacements forcés, et la communauté internationale a réussi à faire rien de plus que quelques résolutions onusiennes non appliquées.»

D’autres atrocités soulignées sont les «gouvernements répressifs sanguinaires de la Corée du Nord, de la Birmanie et du Turkménistan qui affligent d’énormes cruautés à leurs peuples. La persistance des dictatures fermées au Vietnam, en Arabie saoudite et en Syrie. La régression de la Chine. La Russie et l’Égypte qui s’en prennent aux organisations non gouvernementales (ONG)…» Israël est également blâmé pour ses attaques «indiscriminées» contre des cibles au sud-Liban et l’utilisation de bombes à fragmentation et, le Hezbollah, pour ses tirs de roquettes contre des cibles non militaires en Israël.

Avec la priorité axée sur la croissance économique, comme mentionné par les grands industriels et les gouvernements de la planète au Forum économique mondial à Davos, les droits de la personne demeurent un sujet que peuvent avoir à cœur les citoyens du monde, mais ils restent dans le bas des listes de priorité des États occidentaux qui négocient avec et alimentent les régimes tyranniques de par le monde.

La lutte pour sécuriser les combustibles fossiles, source incontestable de pouvoir dans une économie de croissance continue, démontre de plus en plus ses effets dommageables non seulement sur l’environnement, mais sur les droits de l’homme également.