Cinquième anniversaire d’un coup monté meurtrier en Chine
Une enquête indépendante a démontré que l’auto-immolation est un coup monté meurtrier. Toutefois, très peu de gens connaissent les faits véridiques. Il y a cinq ans, un groupe de cinq Chinois est apparu sur les écrans de télévision du monde entier dans ce qui semblait être une tentative de suicide. |
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Les reportages affirmaient que les cinq individus s’étaient auto-immolés, croyant que ce geste allait leur permettre d’aller au paradis. L’histoire, telle que racontée par les médias du gouvernement en Chine, où le Falun Gong est la cible d’une persécution bien documentée, essayait d’associer l’incident au Falun Gong. C’est devenu l’argument principal du régime communiste chinois pour dire que le Falun Gong est dangereux et que la persécution est donc justifiée. Résumé C’était en janvier 2001. Le régime chinois essayait de maintenir sa persécution, qui durait déjà depuis dix-huit mois, contre la pratique spirituelle Falun Gong. Lorsque l’ancien dirigeant Jiang Zemin, en 1999, a lancé une campagne politique contre la pratique, on a rapporté qu’il avait annoncé qu’elle serait éliminée en trois mois. L’armée, la police secrète et les médias, tous contrôlés par le gouvernement, ont participé à l’oppression. Malgré cela, non seulement le Falun Gong n’avait pas été écrasé après dix-huit mois, mais des voix divergentes, des plus bas aux plus hauts échelons du gouvernement, demandaient à mettre fin à la campagne de persécution. «Honnêtement, les gens qui étaient en charge au niveau local n’aimaient pas faire cela [ce genre de persécution]», a raconté Hao Fengjun dans une entrevue avec La Grande Épique en juin 2005. M. Hao est un ex-officier du Bureau 610 en Chine, une agence créée pour mener la persécution du Falun Gong et des croyants des Églises clandestines (croyants catholiques fidèles au Vatican et au pape, etc.). Il s’est enfui en Australie en février 2005 et a contacté La Grande Époque pour divulguer son histoire l’été dernier. Il a décrit la difficulté du Parti communiste à appliquer la persécution du Falun Gong en régions. «Les policiers vivent très près du peuple à ces endroits. Par exemple, peut-être que nous pourrions être voisins et nous nous verrions tout le temps [...] Si ces gens ne font rien de mal et ne violent pas la loi, auriez-vous le coeur à les arrêter?» Le 11 janvier 2001, un article du New York Times intitulé La Chine attaque le Falun Gong dans un nouvel effort de relations publiques («China Attacks the Falun Gong in New Public Relations Effort») relevait en détail de quelle manière le régime augmentait sa propagande contre le Falun Gong avec plus de vigueur dans le but de rallier l’opinion publique à la campagne. Moins de deux semaines plus tard, le 23 janvier, l’agence Xinhua (Chine Nouvelle) – porte-parole officiel du régime chinois – annonçait que cinq personnes s’étaient auto-immolées sur la Place Tian An Men. Xinhua a immédiatement affirmé que les cinq personnes étaient des pratiquants de Falun Gong et qu’elles avaient été incitées par le Falun Gong à commettre un suicide religieux. Bien que les médias du gouvernement aient initialement rapporté que cinq personnes avaient été impliquées dans l’immolation, ils ont par la suite augmenté le nombre à sept, incluant une fille de douze ans, Liu Siying, dont on dit que la mère Liu Chunling était morte brûlée dans l’incident. Cette «auto-immolation» avait pour but de faire croire que le Falun Gong était une «secte perverse» qui méritait d’être éradiquée. Les médias chinois ont fait circuler la nouvelle avec une vitesse inhabituelle et l’ont diffusée presque quotidiennement pendant des mois. À peine deux heures après l’incident – ce qui contraste avec la lenteur reconnue des médias d’État chinois – Xinhua a envoyé un communiqué de presse en anglais blâmant le Falun Gong pour ce qui était survenu. Les médias étrangers ont repris l’histoire, malgré qu’ils ne pouvaient confirmer indépendamment sa véracité et n’ayant pas accès aux victimes. Seuls les médias du gouvernement chinois ont eu la permission d’interviewer les victimes. Le régime venait de remporter sa plus grande bataille de propagande dans sa guerre contre le Falun Gong. Dans l’espace d’une soirée, la population chinoise est passée de l’indifférence – ou même de la sympathie – envers le Falun Gong, à l’hostilité. Les brèves sympathies envers la pratique persécutée ont vite été remplacées par la colère et l’appui de la population à la campagne d’élimination du régime. Davantage de Chinois ont commencé à dénoncer leurs collègues, leurs voisins et même les membres de leur famille qui pratiquaient le Falun Gong, croyant que le groupe était vraiment dangereux. Il est rapporté que des foules de citoyens en colère ont même activement aidé la police à traquer et à harceler les adhérents du Falun Gong. À l’intérieur du Parti communiste, l’appui pour la persécution s’est solidifié et les autorités locales avaient de nouveaux stimulants pour suivre la ligne de parti. Le nombre de pratiquants de Falun Gong torturés à mort au cours des dix-huit premiers mois de la persécution par le régime allait presque triplé au cours des douze mois suivants. «Avant l’auto-immolation, j’étais indifférente au sujet du Falun Gong», a dit Li Xiang, 25 ans, une étudiante diplômée de Toronto qui était à Beijing à l’époque. Elle a demandé d’utiliser ce pseudonyme, car elle planifie retourner en Chine. Comme beaucoup de Chinois, son opinion a changé après l’auto-immolation. «Je pensais que le Falun Gong était vraiment dangereux et mauvais», a dit Mme Li. J’ai été bouleversée quand j’ai appris que la jeune étudiante en musique s’était immolée. Elle était belle. Je me rappelle encore de son nom.» En plein assaut médiatique, pas une seule télévision, radio ou journal n’a rapporté la version des faits du Falun Gong. Les Chinois ne pouvaient se renseigner sur le Falun Gong en empruntant un livre à la bibliothèque, car les autorités avaient déjà confisqué et détruit des millions de livres. Les sites Internet étaient bloqués et les dissidents arrêtés. Les Chinois n’avaient droit qu’à la version des faits provenant du gouvernement. S’ils avaient pu avoir accès à d’autres sources, ils auraient su que le meurtre et la violence vont à l’encontre des principes de base de la pratique et n’auraient pas cru à l’auto-immolation. Plus important peut-être pour le régime, l’incident a diminué la pression venant des gouvernements et médias étrangers, eux qui avaient remarqué la répression. À partir de ce moment, les écrans de télévision et les journaux autour du monde ont été balayés d’images de la soi-disant auto-immolation ainsi que l’histoire, telle que dictée par Xinhua, décrivant comment le Falun Gong avaient mené le groupe à s’immoler. Ce n’est pas surprenant si les échos de l’auto-immolation sont encore perçus en Occident. Pas plus tard que l’année 2005, Associated Press publiait un article au sujet de l’auto-immolation, suivant presque parfaitement la ligne du Parti communiste et n’indiquant que d’une brève note les conditions suspectes sous lesquelles les médias étrangers ont eu le droit de questionner un supposé auto-immolé. Considérant l’impact que l’incident a eu en aidant à soutenir la torture et le meurtre de milliers de pratiquants de Falun Gong, les médias occidentaux auraient mieux fait de porter attention aux inconsistances frappantes du scénario mis de l’avant par les médias d’État chinois. Des trous dans l’histoire Immédiatement après que la nouvelle de l’auto-immolation se soit répandue, des pratiquants de Falun Gong à l’étranger ont émis des doutes à savoir si les victimes étaient des vrais adeptes de la méthode, suggérant même que l’incident était un coup monté. Ils indiquaient que toutes les protestations contre la persécution du régime avaient été pacifiques et que le Falun Gong interdit strictement le meurtre ou le suicide. Les pratiquants d’outre-mer ont indiqué que Wang Jindong, le seul auto-immolé qui apparemment faisait les exercices du Falun Gong sur la place, ne pouvait même pas exécuter correctement les plus simples des mouvements du Falun Gong; malgré cela les médias d’État avaient déterminé (et immédiatement rapporté) qu’il pratiquait depuis 1996. Les identités des victimes ont été davantage remises en question lorsque le Washington Post a publié un article sur Liu Chunling (la femme qui était morte dans les flammes) et sa jeune fille. Un journaliste de ce quotidien était allé dans la ville natale de Mme Liu, Kaifeng, seulement pour conclure que «personne ne l’avait jamais vue pratiquer le Falun Gong». Pendant ce temps, la condition rapportée de la jeune fille Liu Siying, maintenant orpheline, soulevait des questions dans les cercles médicaux. Une entrevue diffusée par China Central Television (CCTV) montrait la fille, complètement couverte de bandages, chantant une chanson pour une journaliste de la CCTV, seulement quatre jours après avoir subi une trachéotomie. «De toute ma carrière, je n’ai jamais vu un tel exploit», a dit après l’incident Yu Jianmei, l’ancien chirurgien en chef à l’hôpital Xuanwu de Beijing, à une station de télévision située aux États-Unis. «Après avoir subi une trachéotomie, cette patiente en si mauvais état pouvait encore projeter une voix claire et pouvait même chanter.» «De plus, a continué M. Yu, les patients ayant été brûlés devraient avoir leurs brûlures exposées... parce que si vous enveloppiez les brûlures, ce serait très difficile pour l’infirmière de les nettoyer et d’appliquer des traitements. Les brûlures seraient aussi très propices à s’infecter.» Malgré la récupération miraculeuse initiale de la jeune fille, quelques mois plus tard sa condition s’est soudainement aggravée et les autorités ont annoncé qu’elle était morte. Les analystes des bandes vidéo au ralenti de l’incident, filmé par les médias d’État, suggèrent que la mort de la mère n’était pas survenue comme indiqué par le gouvernement. Liu Chunling ne serait pas morte dans les flammes, mais par un coup porté à sa tête, donné par un homme portant un manteau militaire. Mais, comme c’est souvent le cas en Chine, aller au fond de l’affaire s’est prouvé difficile pour les reporters étrangers. Au début, le régime permettait seulement aux médias d’État de parler aux victimes de l’immolation. Plus tard, toutes les victimes étaient soit mortes (certaines mystérieusement) ou avaient été complètement isolées des médias. Il y a toutefois eu une seule exception. Lors du premier anniversaire de l’auto-immolation en 2002, une des victimes, Wang Jindong, a été amenée devant les médias pour parler lors d’un événement strictement chorégraphié. L’homme, dont le visage était déformé par les brûlures, a expliqué comment le Falun Gong l’avait poussé à faire cette tentative de suicide. Néanmoins, un an plus tard, des chercheurs de l’université nationale de Taiwan ont analysé la vidéo de l’entrevue que Wang avait eue avec la presse en 2002 et la vidéo de l’auto-immolation montrant Wang sur la Place Tian An Men en 2001, et ont conclu qu’il ne s’agissait pas de la même personne. Les endroits où se trouvent le vrai Wang et les autres survivants ne sont pas connus. Avec le temps, les analystes ont découvert d’autres inconsistances. Par exemple, les policiers étaient sur la Place Tian An Men avec 25 extincteurs dans l’espace de quelques secondes après l’immolation de la première victime. Toutefois, la police ne transporte habituellement pas d’extincteurs sur la place. Les dispositifs le plus près pour combattre les incendies étaient à plus de 20 minutes aller-retour de la scène. Le combat pour la vérité Les preuves démontrant que l’auto-immolation avait été orchestrée s’accumulaient, et les adeptes du Falun Gong en Chine sont devenus plus déterminés que jamais à rectifier les faits qui avaient tant nui à leur réputation. Le régime communiste était pour sa part déterminé à les arrêter. En mars 2002, des pratiquants ou des sympathisants du Falun Gong dans la ville de Changchun au nord-est de la Chine ont intercepté les ondes de télévision pour diffuser au ralenti les images de l’immolation du gouvernement. Les autorités ont réagi sévèrement. Plusieurs biographies de l’ex-dirigeant Jiang Zemin affirment qu’il a personnellement organisé la réponse à l’incident. La loi martiale a été décrétée à Changchun, des points de contrôle ont été établis et un très grand nombre de pratiquants de Falun Gong ont été arrêtés, selon un communiqué urgent d’Amnesty International publié à l’époque, avertissant que ceux arrêtés risquaient la torture. Des sources affirment que 5000 personnes ont été arrêtées, la plupart torturées et plusieurs torturées à mort. Une des personnes les plus connues nommée dans le communiqué était Liu Chengjun qui a été emprisonné et est mort suite à la torture le jour après Noël 2003. Les Chinois qui ont vu la vidéo au ralenti de l’auto-immolation clarifient pourquoi les autorités communistes étaient si anxieuses. L’étudiante Li Xiang a vu la vidéo au Canada. «J’ai été bouleversée, a-t-elle dit. Je ne pouvais imaginer comment un gouvernement d’un si grand pays pouvait mentir sans se sentir embarrassé de quelque manière que ce soit. Ça m’amène à me questionner sur tout ce qu’il m’ont dit. Pour visionner l’incident au ralenti, visitez www.falsefire.info
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