Traité sur le commerce des armes ? « Oui, mais pour les autres ! »

Écrit par Amnesty International
25.10.2006

Des cartouches fabriquées en Grèce, en Chine, en Russie et aux États-Unis ont été retrouvées aux mains de groupes rebelles dans la région d’Ituri, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) ; cette zone est sous embargo des Nations unies pour les armes.

Les recherches de la campagne Contrôlez les armes soulignent le besoin urgent d’un traité sur le commerce des armes, afin d’endiguer le flot d’armes dans les zones de conflit. Le résultat de ces recherches est publié ce lundi 16 octobre, une semaine avant un vote attendu aux Nations unies sur une résolution de commencer à élaborer le traité.

Ce serait la première fois que des munitions des États-Unis et de Grèce sont récupérées chez des groupes rebelles dans l’est de la RDC, ce qui met en lumière l’origine mondiale des armes qui entretiennent le conflit dans cette région. Menées en septembre 2006, ces recherches révèlent l’origine d’un échantillon d’armes et de munitions récupérées chez des groupes rebelles depuis l’imposition de l’embargo des Nations unies sur les armes, en 2003. Des armes légères fabriquées en Russie, en Chine, en Serbie et en Afrique du sud ont également été découvertes.

« Il s’agit là d’un simple exemple de la manière dont les contrôles laxistes sur les armes entretiennent les conflits et la souffrance dans le monde. Les embargos des Nations unies sur les armes ressemblent à des barrages contre des raz-de-marée : à eux seuls, ils ne peuvent arrêter le flot. Seul un traité strict et mondial sur le commerce des armes pourra empêcher celles-ci de se déverser dans les zones de guerre de notre planète », a déclaré Jeremy Hobbs, directeur d’Oxfam International.

Une résolution visant à commencer l’élaboration d’un traité sur le commerce des armes a été présentée la semaine dernière par sept gouvernements aux Nations unies. Cette résolution était soutenue par 77 autres gouvernements, d’autres devant leur emboîter le pas la semaine prochaine.

Cette résolution sera sans doute soumise au vote du Premier comité de l’Assemblée générale des Nations unies au début de la semaine suivante. La campagne Contrôlez les armes, soutenue par 20 lauréats du prix Nobel de la paix, demande qu’un traité sur le commerce des armes interdise le transfert international d’armes et autres équipements militaires dans les endroits où ils risquent manifestement d’être utilisés pour commettre de graves violations des droits humains, pour entretenir les conflits ou nuire au développement.

Depuis 1998, 3,9 millions de personnes environ ont été tuées dans le conflit de RDC. Malgré un accord de paix en 2002, les combats continuent dans l’est de la RDC, entretenus par des fournitures d’armes et de munitions en provenance du monde entier.

Nous ignorons la manière exacte dont les armes identifiées par les chercheurs sont tombées entre les mains des rebelles en Ituri, mais parmi ces armes figuraient : des munitions pour fusil de tireur embusqué, fabriquées par la Federal Cartridge Company, aux États-Unis ; des munitions pour fusil fabriquées par Pyrkal, Greek Powder & Cartridge Company, en Grèce, à la fin des années 1980 ; un fusil d’assaut R4 fabriqué en Afrique du sud et des fusils d’assaut chinois et un pistolet serbe, tous endommagés, indiquant qu’ils avaient été enterrés ou entreposés à l’humidité. Cinquante à 60 p. cent des armes utilisées en RDC seraient des AK-47.

« Mille personnes meurent chaque jour des violences liées aux armes à feu. Les gouvernements ne peuvent donc plus ignorer l’histoire d’horreur qui se répète, du Congo à la Colombie et à l’Irak. Il est temps qu’un traité sur le commerce des armes empêche ces armes de tomber entre de mauvaises mains », a déclaré Charles Nasibu, militant et chercheur congolais sur les armes légères, membre du RAIAL.