Les Chinois plus religieux après des décennies d’athéisme
Le temple des Nuages azurés à Beijing a été construit pendant la
dynastie Yuan. Tout comme dans les temples de Taiwan, il y a des
statues de Bouddha dans le temple des Nuages azurés.
Toutefois,
on n’y trouve pas de moine ni de nonne bouddhistes et personne n’y
brûle de l’encens ni fait la pratique. Tout ce que l’on peut y voir
sont des touristes allant et venant.
De la même manière, il n’y a ni
moine ni nonne dans le palais Yonghe, un autre temple renommé de
Beijing. La seule différence avec le temple des Nuages azurés est que
certaines personnes y brûlent de l’encens. Toutefois, le palais Yonghe
ne ressemble toujours pas à un temple authentique.
Des années de suppression ont causé le déclin de la religion
Selon
les statistiques officielles du gouvernement chinois, il y a
présentement 200 000 moines et nonnes bouddhistes en Chine, dont 120
000 sont des disciples de l’école du bouddhisme tibétain. Sur une
population de 1,3 milliard, les moines et nonnes bouddhistes sont
extrêmement peu nombreux.
La situation est similaire pour les
chrétiens et les catholiques. Selon les statistiques officielles, il y
a environ 10 millions de chrétiens et 4 millions de catholiques. Même
si ces statistiques sont exactes, les croyants religieux sont une
minorité. Encore faut-il distinguer entre l’Église patriotique fidèle
au Parti communiste et l’Église clandestine fidèle au Vatican.
À
Beijing, il est rare de voir des moines ou des nonnes bouddhistes, ou
des membres du clergé chrétien. Il est aussi rare de rencontrer
quelqu’un qui croit aux divinités. Si vous arrêtez des personnes au
hasard et leur demandez si elles croient en Dieu ou Bouddha, la plupart
répondent «non». Un employé du temple des Nuages azurés a dit qu’il ne
croyait pas en Bouddha ni en Dieu. Après avoir appris que le
journaliste qui lui posait la question venait de Taiwan, il a dit : «La
raison pour laquelle vous les Taïwanais vénérer la Bodhisattva
Avalokitesvara (aussi appelée Guanyin) est que vous vivez sur une île
et que vous comptez sur la pêche. Nous n’avons pas un tel besoin ici en
Chine continentale.»
La majorité des Chinois d’aujourd’hui ne
croient pas en Dieu et n’ont pas de croyance religieuse. La raison
principale qui explique ce phénomène est que le Parti communiste
chinois (PCC), qui a établi sa dictature en 1949, propage l’athéisme.
Le PCC supprime toutes les religions. Il considère que la religion est
un outil utilisé par les impérialistes pour envahir la Chine ou une
forme de féodalisme utilisée pour opprimer les gens. Durant la
Révolution culturelle, toutes les religions ont été forcées d’arrêter
complètement leurs activités en Chine.
Madame Yang, 66 ans, s’est
jointe à l’Église catholique en 1998. Toutefois, il y a longtemps,
lorsqu’elle était à l’école primaire, elle était reliée à la foi
catholique. Une fois, ses camarades de classe avaient remarqué qu’elle
détenait une image de Jésus. Ils lui ont immédiatement demandé :
«Pourquoi tu crois en ça?» Ils l’ont critiquée, l’ont taxée de
superstitieuse et lui ont dit de déchirer l’image.
Mme Yang
affirme que le peuple chinois est profondément empoisonné par le
communisme. Particulièrement durant la Révolution culturelle, le PCC a
taxé toutes les croyances religieuses de superstition. Quiconque était
étiqueté «superstitieux» était considéré comme étant contre le PCC. Mme
Yang a aussi dit qu’il était très difficile pour les jeunes gens dont
les parents sont membres du PCC d’avoir des croyances religieuses, car
ils n’obtiendraient probablement pas le consentement de leurs parents
pour pratiquer. Elle connaît une jeune personne qui s’était convertie
au catholicisme. Toutefois, lorsque ses parents l’ont découvert, ils
l’ont empêché d’aller à l’Église et l’ont forcé à brûler tous ses
livres religieux.
Liu, un étudiant d’université âgé de vingt ans,
ne passait pas inaperçu parmi un groupe de personnes plus âgées dans
une église. Il nous a confié qu’il s’était converti au catholicisme le
Noël précédent. Il est le seul à croire au catholicisme dans sa
famille. Ses parents ne soutiennent ni ne s’opposent à sa croyance.
Bien que quelques-uns de ses camarades de classe croient qu’il est
bizarre, la plupart d’entre eux comprennent son besoin d’avoir des
croyances religieuses. À moins que ses compagnons de classe lui posent
des questions sur le catholicisme, Liu n’initie pas de discussion sur
sa religion. En Chine, les gens ne sont pas encore libres de vraiment
diffuser les religions en public. Ils peuvent seulement le faire en
privé.
La religion est plus populaire dans les régions rurales
Un
dimanche matin, j’ai visité la fameuse église Chongwenmen de Beijing.
Le premier étage du hall principal était rempli de gens.
J’ai
suivi un insigne à l’entrée qui m’a amené au sous-sol. Le sous-sol
était également rempli de gens qui regardaient les écrans de télévision
et qui écoutaient la transmission du sermon qui était donné au premier
étage.
Selon le prêtre, 1500 personnes avaient assisté à la messe
ce dimanche. Mme Guo, une étudiante d’université, invitée par un ami,
venait à l’église pour la première fois. Elle a dit n’avoir jamais été
impliquée dans la chrétienté auparavant. Bien qu’elle ne pouvait
immédiatement décider si elle voulait devenir chrétienne, elle a dit
avoir ressenti une grande paix intérieure alors qu’elle était dans
l’église.
Un lettré de Beijing affirme qu’un nombre grandissant
de gens a commencé à se convertir au christianisme après le début des
réformes économiques dans les années 80, particulièrement dans les
régions rurales. On dit que les gens dans certains villages suivent les
consignes des leaders des églises. Ainsi, ces derniers sont plus
puissants que les cadres du PCC.
La pratique du qigong était
énormément populaire dans la même période et il y a un temps où la
pratique du Falun Gong comptait jusqu’à 100 millions d’adeptes, avant
le début de la persécution en 1999.
Il y a plusieurs obstacles
pour la croissance future des religions en Chine. Le plus grand est la
peur du PCC de perdre le pouvoir et de perdre le contrôle de l’esprit
des gens. À Beijing, le gouvernement n’autorise pas la construction
d’église ou de temple. Tous les temples et toutes les églises de la
capitale ont été construits il y a plus de cent ans.
Le PCC
craint toute forme d’organisation sociale. Aucun membre du PCC n’ose
croire en une religion. Même si certains d’entre eux voulaient suivre
une religion, ils n’osent pas participer aux activités religieuses.
«Autant que je sache, aucun de mes collègues ne croit en une religion»,
a répondu fermement le lettré interrogé.
La politique du PCC sur
les religions est que le gouvernement ne peut pas les éliminer ou en
faire la promotion dans l’administration. Il doit faire la propagande
de l’athéisme et insister sur le principe des organisations et
activités religieuses indépendantes. Les organisations religieuses
étrangères ou les individus ne sont pas autorisés à interférer avec les
politiques chinoises sur la religion.
La soi-disant «liberté de
religion» est restreinte de plusieurs façons en Chine : les
missionnaires étrangers ne peuvent aller en Chine et les évêques
catholiques doivent être choisis par le Parti communiste au lieu du
Vatican, ce qui est source de grandes frictions entre l’Église et le
PCC. Les catholiques en Chine se sentent isolés des autres pratiquants
à l’extérieur du pays.
Dans les pays libres, les activités
religieuses font partie de la vie de plusieurs personnes. Les athées
dans ces pays sont en minorité. Toutefois, en Chine, des décennies
d’oppression religieuse ont créé la situation inverse : les croyants
religieux sont en minorité.
Il est très difficile pour les gens
ayant des croyances religieuses de comprendre comment les Chinois
vivent leur quête spirituelle. Un chauffeur de taxi a dit : «Je ne
crois en rien. Je sens que je ne peux me fier que sur moi-même. Si je
rencontre une difficulté, à part me sentir malchanceux, je ne sais que
faire d’autre.»