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La diaspora chinoise se mobilise aux États-Unis

Écrit par Aurélien Girard, Yi Ping, James Fish, Sarah Cook
03.08.2006
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  • Les manifestants à Washington. (攝影: / 大紀元)

C’est devenu une tradition de la fin juillet et un moment de rencontre revendicateur et coloré. Des milliers de personnes se rassemblent chaque année à Washington DC, peu avant le début du mois d’août et de ses plages bondées. Certains d’entre eux parlent de « devoir citoyen » : appeler à l’arrivée d’une Chine libre et dénoncer les violations des droits de l’homme. Ils sont majoritairement des Chinois réfugiés aux États-Unis, de plus en plus rejoints par des militants du monde entier. Deux thèmes principaux cette année : le mouvement de démissions du Parti communiste chinois et la dénonciation des prélèvements d’organes sur prisonniers de conscience vivants.

La première question qui se pose à l’observateur est celle du lieu, très symbolique, de ces rassemblements annuels : les Etats-Unis, et plus précisément leur centre politique, Washington DC. Est-ce le signe du soutien des Etats-Unis aux opposants chinois ? Est-ce une marque de la déception des militants de la démocratie face à la mollesse de l’Europe ? La réponse, presque décevante quand on aime les considérations géostratégiques, est prosaïque : les Etats-Unis sont la première destination des intellectuels fuyant la Chine et c’est là qu’ils se sont fédérés et organisés. C’est donc aussi là, logiquement, qu’ils se rassemblent, manifestent, agissent pour faire évoluer leur pays d’origine.

Pour autant on est surpris, sur place, de constater l’ampleur de la représentation internationale : des centaines d’Européens, d’Australiens, de Sud-américains ont fait le déplacement. Parmi eux des dizaines de Français, de Suisses, de Belges, portant avec une fierté visible des pancartes au nom de leur pays. L’avenir de la Chine mobilise.

Washington DC et les 12 millions de démissions

Le 21 juillet, 1.500 personnes environ s’étaient rassemblées au Parc Lafayette, face à la Maison Blanche, pour soutenir les 12 millions de Chinois qui ont démissionné du Parti communiste chinois (PCC). Plus d’une dizaines d’experts des questions chinoises venus de différents pays ont donné leur analyse de cette tendance, jugée inexorable : la désintégration du PCC.

Le premier intervenant, le Dr Gao Dawei, fondateur et président du « Centre Mondial d’assistance aux démissions du PCC » a parlé d’un mouvement qui « change tranquillement le monde, pas seulement la Chine. » « Malgré le contrôle du PCC sur l’appareil d’Etat, malgré les milliards dépensés pour bloquer le libre accès aux informations, 12 millions de personnes de personnes ont déjà dit adieu au PCC. »

M. Wu Baozhang, ancien journaliste de l’agence de presse officielle chinoise Xinhua et directeur du département Chine de Radio France Internationale a mentionné que, seulement 20 mois après la publication du texte « Les Neuf commentaires sur le parti communiste », la pensée des Chinois et leur situation politique ont connu des changements sans précédent. Les Neuf commentaires (voir extrait en page 8) ont, dit-il, « brisé les chaînes mentales que le PCC a imposé aux Chinois depuis presque 100 ans et déclenché une grande vague de plus de dix millions de démissions ». Le journaliste croit voir dans la situation de la société chinoise des signes tangibles de l’écroulement prochain du régime.

La charge verbale de M. Tang Baiqiao, président de l’association China Peace, est plus virulente encore. Pour lui, vingt ans après la fin de la guerre froide, 1/5 de l’humanité  est encore sous la coupe d’un régime qui a consolidé son pouvoir par des moyens ignominieux. « Il courtise l’Occident avec sa diplomatie économique, et décrie en même temps les valeurs universelles de démocratie et de liberté, soutient Saddam Hussein, l’Iran, Cuba, la Corée du Nord ». « Il n’est pas une menace seulement pour les Chinois, il est la plus grande menace pour la démocratie dans le monde ».

L’intervenant suivant, M. Wu Fan, vient aux actions concrètes. Editeur du site web China affairs, il affirme que des généraux de l’Armée de libération du peuple ont déjà posé la question d’une stratégie pour détruire le Parti communiste chinois, et qu’un site internet nouvellement créé hors de Chine donne à tous les Chinois intéressés par le sujet un forum pour en discuter.

Après les discours, le défilé des militants est passé par le Chinatown de Washington, sans oublier tous les organes gouvernementaux et le quartier des affaires, sous des banderoles quasiment aussi nombreuses que les participants. « Tui Dang » (démissionner) : deux caractères chinois qu’on commence à voir partout.

Boston, le Falun Gong et les prélèvements d’organes

Quasiment au même moment, 800 km plus au Nord sur la Côte Est des Etats-Unis, la ville de Boston accueillait la grand-messe de la chirurgie mondiale : le WTC (World Transplantation Congress), congrès mondial de transplantation. Près de 6.000 spécialistes du monde entier réunis pour discuter des derniers développements de la transplantation d’organes. Parmi eux, venus en force, près d’un millier de chirurgiens chinois. Et à l’entrée du Palais des Congrès, des centaines de pratiquants de la méthode bouddhique Falun Gong avec forces banderoles, prospectus et photographies de scènes de tortures – reflet de leur quotidien chinois.

Le WTC est le congrès annuel organisé par la société américaine des chirurgiens transplanteurs (ASTS), la société américaine de transplantation (AST) et la société de transplantation (TTS) durant lequel médecins, scientifiques et personnels de soin peuvent discuter des dernières avancées dans le domaine de la transplantation de tissus ou d’organes.

Dans ce domaine, l’un des développements les plus perturbants est sans aucun doute la confirmation que le régime chinois utilise des adhérents du Falun Gong comme banque d’organes vivante. Les Falun Gong seraient maintenus en vie jusqu’à ce qu’un hôpital ou un centre de transplantation ait besoin d’un organe. Les responsables de prisons feraient alors un tour de leurs fichiers médicaux (état de santé, groupe sanguin, indicateurs immunologiques) et, sous anesthésie minimale, prélèveraient l’organe demandé à un pratiquant du Falun Gong.

Falun Gong est une méditation traditionnelle interdite en Chine depuis 1999 – quand le nombre de ses adhérents a dépassé celui du Parti communiste. L’interdiction a été suivie d’arrestations massives, de tortures, d’assassinats. Plusieurs dizaines de milliers de personnes auraient depuis « disparu ».

Or, à partir de 1999 aussi, le nombre de transplantations d’organes en Chine, qui était resté stable jusque-là, a soudainement triplé chaque année. La médiatique enquête de l’ancien secrétaire d’Etat canadien David Kilgour et de l’avocat David Matas montrent pourtant que le nombre de donneurs n’a pas augmenté durant cette période. D’après eux, l’origine des organes de plus de 40.000 transplantations en Chine est inconnue, et leur rapport conclut que les chances sont très fortes pour qu’ils aient été prélevés à des pratiquants de Falun Gong.

L’organisatrice du rassemblement du Falun Gong, Mary Byrom, explique que le but des efforts du mouvement n’est rien moins que d’obtenir la libération des tous les pratiquants de Falun Gong retenus dans des camps de travaux forcés en Chine : « C’est de là que viennent les organes, dit-elle. Sans ces camps, les hôpitaux n’auraient pas de listes de personnes compatibles pour les transplantations ; le régime ne pourrait pas trouver de quoi alimenter son commerce ». Aussi énorme que semble l’objectif, on est presque tenté de le croire atteignable, tant l’obstination et la persistance des Falun Gong est grande.

Dépôt de plainte contre des chirurgiens chinois

Dernière illustration de cette persistance, la plainte surprise déposée la semaine dernière contre deux médecins chinois assistant au WTC. Ils sont accusés d’avoir coordonné les prélèvements d’organes forcés sur des pratiquants du Falun Gong.

Le Dr Terri Marsh, Directeur général de la Human Rights Law Foundation (groupement d’avocats pour les droits de l’homme) a déposé elle-même la plainte, qui demande une enquête urgente sur l’implication des deux médecins dans le trafic d’organes. Leur arrestation immédiate est également demandée pour les empêcher de retourner en Chine avant la fin de l’enquête.

Les accusés, Zhonghua Klaus Chen et Tongyu Zhu, dirigent les services de transplantation d’hôpitaux de Wuhan et Shanghai, respectivement.

D’après le texte de la plainte, que nous avons pu nous procurer, il est dit que les accusés « ont volontairement participé et/ou aidé la pratique illégale de prélèvements d’organes sur des pratiquants de Falun Gong et autres détenus. » Ils ont aussi « personnellement et financièrement bénéficié de cette pratique ».

Mme Marsh appuie ses accusations sur des conversations téléphoniques enregistrées dans lesquelles des docteurs travaillant sous la direction des accusés admettent que les organes utilisés pour les transplantations viennent de pratiquants de Falun Gong.

Dans une transcription annexée à la plainte, un docteur travaillant à Shanghai sous la direction de Tongyu Zhu, discute avec un enquêteur prétendant chercher un organe pour un de ses proches. A la question « avez-vous des organes venant du Falun Gong », le docteur répond « tous nos organes viennent de là ». Ces éléments sont tirés du rapport Kilgour-Matas publié début juillet (disponible sur http://investigation.redirectme.net/).

Les plaintes officiellement acceptées, l’enquête commence avec comme crainte principale la fuite des accusés. Mme Marsh anticipe : « J’espère que l’enquête va continuer même si ces docteurs partent, et que cela va conduire à une mise en accusation ».

Ce n’est qu’un début, préviennent les avocats Terry Marsh, Theresa Chu et Carlos Iglesias. Ils ont profité du WTC pour communiquer des notices officielles aux médecins chinois présents, les prévenant des conséquences légales qu’entraîneraient leur participation aux prélèvements d’organes.

 

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.