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Douleur, douleur, quand tu nous tiens...

Écrit par Violaine Raabon, La Grande Époque - Guadeloupe
11.10.2007
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  • Source: photos.com(攝影: / 大紀元)

«Tu enfanteras dans la douleur...». «Etre mère et épanouie…». Entre ces deux citations, communément employées dans nos expressions populaires, il semble exister un monde infranchissable : deux logiques qui ne pourraient pas établir une alliance positive.

En effet, notre société occidentale moderne a opéré un virage radical dans son rapport à la douleur. Des punitions librement acceptées, voire recherchées pour expier les fautes, nous avons évolué vers la notion de douleur inacceptable et intolérable, à soulager à tout prix. Notre société se doit d’être ouatée, indolore et aseptisée.

Essayons de nous pencher sur ce changement de paradigme et voyons quel en est l’apport, au niveau humain et sociétal.

Selon la définition, la douleur est la sensation ressentie par un organisme dont le système nerveux détecte un stimulus nociceptif. La douleur désigne aussi des souffrances d’ordre sentimental, par exemple à la suite d’un décès.

Dans le domaine de la santé publique, on retient le plus souvent la définition de l’International Association for Study of Pain (IASP) : «la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle ou décrite en des termes évoquant une telle lésion.» Cette explication met l’accent sur l’aspect somatique de la douleur qu’elle décline en douleur aiguë et douleur chronique.

Dans les temps anciens, ressentir de la douleur, c’était comme l’expression d’un corps ou d’une partie de ce corps qui réagit, cela pouvait rassurer quant au fait d’être toujours en vie.

Certaines cultures en ont fait un prénom : Dolores, assimilant ainsi la notion de féminin et de féminité à la souffrance : glorifiant une certaine capacité à endurer chez la femme, souvent par la passivité. Cette dernière ne devait pas montrer sa douleur physique, mais pouvait extérioriser sa douleur morale : l’exemple des pleureuses accompagnant les défunts en est une illustration.

Par contre chez l’homme, cette endurance est portée en trophée, devenant une valeur étalon de la virilité : valeureux guerrier, résistant à tout, le mâle inébranlable exposant les cicatrices qui ornent son corps. Elles atestent de sa valeur d’homme.

D’autres peuples ou couches sociales en font une parure en développant l’art du tatouage : « un homme, un vrai, un tatoué… ! ». Certaines coutumes officialisent, chez les garçons, des épreuves ou rites de passage de manière à marquer l’accès à l’âge adulte. Ces rites les amenaient à se dépasser, en devenant insensibles aux différentes douleurs physiques et morales.

Ces temps nous paraissent éloignés de notre quotidien d’homme et de femme moderne. Car en France toute une législation garantit à l’usager du service public hospitalier que sa douleur sera une priorité pour l’établissement de santé auquel il fera appel. Cette prise en charge a été reconnue comme un droit fondamental pour toute personne par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Des plans de santé publique ainsi que la loi de santé publique du 9 août 2004, en ont fait une des priorités nationales.

Ainsi la future maman épanouie, a droit à un accouchement garanti sans douleur, pratiquement au moment où cela dérange le moins son planning de vie.

Notre douleur qu’on laissait auparavant s’exprimer pour prouver notre état d’être vivant, doit maintenant être étouffée. La moindre souffrance ressentie peut nous amener à nous projeter à la fin de notre passage sur terre.

Alors pour pouvoir toujours paraître jeunes, beaux, en bonne santé, se rassurer sur notre devenir, dans notre société moderne, la douleur physique légiférée, n’a plus droit de cité. Quant à la douleur morale, son expression est souvent classée comme comportement «hystériforme».

Ne pouvant s’extérioriser comme elle le devrait, la douleur morale remplit alors notre champ intérieur : elle en profite pour agresser nos viscères ou provoquer des troubles comportementaux selon un mode mineur ou majeur, adaptable au terrain.

Cette intériorisation peut donc provoquer des comportements de dépendance dites addictives, plus ou moins dangereuses. Cela peut aller de conduites compulsives à la consommation de tabac ou d’alcool menant au pallier de l’auto-destruction dans le choix des substances ou des conduites.

La conquête de notre champ intérieur par une douleur qui n’a plus le droit de s’exprimer librement permet au grand vainqueur de cette confrontation de s’épanouir. En effet le stress s’installe, fait son nid, prend ses habitudes de vie et règne en maître dans le corps de l’homme.

Ces douleurs qui étaient strictement physiques, morales et identifiables, deviennent brusquement diffuses, non repérables. Le stress, roi dans notre société moderne, nous traque. Plus nous pensons en être protégés par des barrières matérielles, un confort identifié, un bien-être physique et mental, un équilibre de vie, plus il semble être là, à guetter la moindre de nos failles.

Il nous amène, à travers les conduites compulsives que nous développons pour nous protéger, à malmener notre équilibre physiologique, créant ainsi un terrain favorable à toutes ces maladies modernes comme le fameux « crabe » ou cancer qui ronge de l’intérieur, une bonne partie de la population de nos contrées occidentales et développées, permettant peut-être ainsi au corps de librement exprimer et ou extérioriser la souffrance physique pour prouver qu’il se bat contre la maladie, qu’il est encore en vie…

D’une notion de valeur mesure permettant d’établir une référence sexuée, la douleur est devenue un concept à maîtriser. Malheureusement à trop vouloir la contrôler, la gérer, elle s’est transformée et elle a su renaître encore plus forte à travers le stress.

Nous ne sommes peut-être pas encore prêts à accepter la douleur et son expression, comme partie intégrante de notre vie quotidienne. Mais ne serait-il pas possible d’envisager une notion intermédiaire qui autour d’un équilibre, entre douleur physique et morale tolérée ou intolérable, nous permettrait de naviguer à vue et de faire face au roi stress.

Cette libre interprétation autour du thème de la douleur peut amener à se poser la question.

Certaines sociétés ne bénéficiant pas d’un arsenal de prise en charge légiféré et intégré dans la vie de tous les jours ont un rapport à la douleur tout à fait différent. Cette dernière est acceptée, voire continue à s’exprimer : le stress semble alors moins enclin à s’installer.

Il semble qu’en tout l’équilibre soit salutaire, alors sachons, peut-être, endurer une certaine souffrance physique et laissons s’exprimer une partie de notre douleur morale. Par ce choix, nous pourrions commencer à mettre fin à la suprématie du roi stress.

Mais tout ceci reste une hypothèse qui a pour seul mobile de nous amener à réfléchir sur nos choix.

 

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