Une langue sans cesse en évolution

Écrit par Marijo Gauthier-Bérubé, Collaboration spéciale
30.10.2007
  • L'écrivain suisse Paul Nizon (Staff: THOMAS COEX / 2007 AFP)

Baladodiffusion, casseau, débarcadère, gracieuseté, massothérapeute, massothérapie, rallonge et traînerie. Voici l’apport linguistique du Québec au Petit Larousse 2008. Ces huit mots font partie de la centaine de nouveaux mots qu’a introduit le Petit Larousse 2008 à sa collection.

Le monde est sans cesse en évolution, il change et se modifie sans arrêt et la langue doit s’adapter aux nouvelles réalités de la société. C’est ainsi que plusieurs mots font leur apparition chaque année dans les dictionnaires alors que d’autres disparaissent, faute de place…

Pour qu’un mot entre dans un dictionnaire, et donc officiellement dans la langue, il doit avoir été préalablement utilisé et attesté dans divers écrits : scientifique, littéraire ou encore journalistique. Ce n’est pas un caprice d’un lexicographe qui fera en sorte que de nouveaux mots s’ajoutent dans notre langue.

Le mot doit ensuite passer le test du public. On peut proposer de nouveaux mots, mais si la population ne les emploie pas, à quoi servent-ils? C’est le cas du mot mercatique, un terme proposé par l’Office de la langue française pour remplacer marketing… entendez-vous souvent «j’ai une formation mercatique»? Non, puisque le terme n’a pas réussi à supplanter le mot marketing. Cependant, le mot courriel, lui, a réussi à s’imposer au mot E-mail dans le milieu de travail.

Selon Paul Roux, conseiller linguistique pour La Presse, les Québécois adoptent facilement les nouveaux mots : «Les Québécois adoptent plutôt facilement les nouveaux mots. À cet égard, ils sont plus dociles que les Français. En France, en effet, les recommandations des terminologues tombent parfois à plat. Il arrive même que leurs suggestions aient plus de succès ici qu’en France. Remue-méninges, par exemple, est plus employé ici que dans l’Hexagone pour remplacer brainstorming

Mais est-ce que ce mouvement de la langue est bien? Notre langue s’affaiblirait-elle ou est-ce plutôt un enrichissement?

Certains diront que notre langue s’appauvrit, qu’elle manque de rigueur devant le langage familier ou qu’elle accepte trop de mots provenant d’autres langues, dont l’anglais. Pour d’autres, l’ajout de nouveaux mots tient davantage de l’enrichissement de notre langue.

C’est le cas de Paul Roux. Selon lui, l’ajout de nouveaux mots est souhaitable puisque «nous avons besoin de nouveaux mots pour décrire les nouvelles réalités […] il faut cependant la reconnaître [la langue] d’une génération à une autre».

Il faut aussi faire attention à ne pas marginaliser la langue française du Québec en lui ajoutant de nouveaux mots qui ne seront pas compris dans le monde de la francophonie. «L’Office québécois de la langue française pratique une politique très autonomiste. Des mots comme téléavertisseur et téléavertir sont sans doute bien constitués, mais ils ne sont compris nulle part ailleurs. Inversement, les termes bipeur et biper risquent de ne pas être compris ici», nous informe Paul Roux. Selon lui, il faudrait donc plus de concertation avec la Commission générale de terminologie et de néologie de France.

Mais avons-nous les mêmes réalités que la France? Nous possédons une culture différente (le sirop d’érable, par exemple, n’existe pas en France), une politique différente (mouvement souverainiste), des peuples différents (les Amérindiens du Québec) ou encore des institutions différentes comme les caisses populaires.

    

Les pays francophones, comme la Belgique, l’île de la Réunion, la Suisse, vivent des réalités totalement différentes et qui demandent un vocabulaire particulier pour les exprimer. Nous devons cependant travailler ensemble, à l’affût des ajouts des autres régions afin de rendre la langue française plus riche, mais aussi compréhensible pour ses diverses sociétés.