Un documentaire de Radio-Canada dévoile la persécution du Falun Gong en Chine

Écrit par Joan Delaney, La Grande Époque - Victoria
05.11.2007

  • Des policiers en civil frappent un pratiquant de Falun Gong(攝影: / 大紀元)

«La vie là-bas, c’était comme être dans une caverne de monstres, mais la torture ne pouvait nous transformer.»

C’est ainsi que Zhang Kunlun, artiste canadien d’origine chinoise, décrit le temps qu’il a passé dans un camp de travail forcé en Chine. Son histoire est racontée dans le documentaire La persécution du Falun Gong, diffusé le 31 octobre à l’émission Les grands reportages du Réseau de l’information (RDI) et sur CBC Newsworld les 6 et 10 novembre (le titre original anglais est Beyond the Red Wall: The Persecution of Falun Gong).

Le documentaire relate comment M. Zhang, un pratiquant de Falun Gong, a été arrêté alors qu’il visitait la Chine en 2002. Il a été condamné sans procès à passer trois ans dans un camp de travail forcé, où il a été sévèrement battu, électrocuté à multiples reprises avec des matraques électriques et on a tenté de lui faire subir un lavage de cerveau dans le but de lui faire renoncer à ses croyances.

Le député fédéral Irwin Cotler, qui est par la suite devenu ministre de la Justice, a fait équipe avec des avocats défenseurs des droits de l’Homme et Amnesty International pour secourir M. Zhang, un citoyen canadien et professeur ayant déjà enseigné à l’Université McGill. Le cas de Zhang Kunlun est devenu une cause célèbre et en peu de temps il était rapatrié au Canada.

Toutefois, des milliers de pratiquants de Falun Gong en Chine n’ont pas été aussi chanceux. Constamment emprisonnés sans procès, ils font face à la même brutalité que M. Zhang, simplement en raison de leur pratique du Falun Gong, une discipline spirituelle et une méthode de méditation.

Avant le début de la persécution en 1999, des estimations du ministère du Sport chinois évaluaient le nombre de pratiquants entre 50 et 70 millions. Des centaines de personnes se regroupaient dans les parcs du pays chaque matin pour pratiquer les exercices avant d’aller travailler.

La «grande Loi de l’Univers», telle qu’enseignée par le fondateur du Falun Gong, Li Hongzhi, semblait avoir touché une corde sensible chez les Chinois. Authenticité, compassion et tolérance, les principes directeurs de la pratique, se répandaient dans la société.

À cette époque, le régime chinois autorisait le Falun Gong, et plusieurs cadres du Parti communiste le pratiquaient. Les gens remarquaient le pouvoir curatif d’une pratique assidue. Alors que le système de santé publique commençait à s’effondrer au début des années 1990, plusieurs personnes se sont tournées vers le Falun Gong et autres formes de qigong pour s’occuper de leurs problèmes de santé.

«[Avec le qigong], plusieurs dirigeants chinois croyaient sincèrement qu’ils étaient tombés sur une nouvelle science chinoise révolutionnaire qui allait changer le monde», explique David Ownby dans le documentaire présenté à RDI. M. Ownby a écrit un livre sur la question et il est actuellement professeur et directeur du Centre d’Études Est-asiatiques (CETASE) de l’Université de Montréal.

Mais après qu’environ 10 000 adeptes se sont rassemblés paisiblement autour du quartier général du Parti communiste à Pékin le 25 avril 1999 pour protester contre le harcèlement dont le groupe était victime, le Parti a été bouleversé.

Qu’une telle foule puisse se mobiliser sans que l’omniprésent Bureau de la sécurité publique en ait eu connaissance préalablement a apeuré le dirigeant chinois de l’époque, Jiang Zemin, mentionne le journaliste canadien Ian Johnson, du Wall Street Journal, qui est présent dans le documentaire.

«Le Parti était irrité et il a réagi en bannissant le Falun Gong avec une vengeance que je n’avais jamais vue contre quelconque groupe depuis les sept années que j’étais en Chine.»

Avec la directive de Jiang Zemin d’«éradiquer» le groupe, la persécution officielle du Falun Gong a débuté le 20 juillet 1999.

Ont suivi des séries d’arrestations massives et une intense campagne de propagande qui vilipendait le Falun Gong autant en Chine qu’à l’étranger. En peu de temps, des rapports ont commencé à émerger, racontant la persécution systématique, la torture et l’exécution des pratiquants.

Le Torontois Peter Rowe – qui a écrit, produit et réalisé Beyond the Red Wall – raconte qu’il a été incité à enquêter sur le Falun Gong après avoir vu des adeptes protester contre la persécution à l’extérieur du consulat chinois de Vancouver en 2003.

«Cela m’a frappé comme étant une histoire incroyable que les gens ne connaissent pas. C’est une histoire cachée mystérieuse et il y a beaucoup de gens qui ne savent pas ce qu’est le Falun Gong, et qui sont encore moins au courant de la persécution.»

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M. Rowe, qui produit l’émission Angry Planet sur le Outdoor Life Network, mentionne que Beyond the Red Wall a été réalisé en trois ans. Il fait l’éloge de Radio-Canada d’avoir décidé de parler d’un sujet si controversé, particulièrement si l’on considère que le réseau a les droits de diffusion canadiens pour les Jeux olympiques de Pékin en 2008.

«Le fait qu’ils aient la volonté de présenter un film dans lequel des gens demandent un boycott des Olympiques pour lesquels ils seront le diffuseur au Canada est remarquable», estime M. Rowe.

M. Rowe se réfère à un segment de son film qui documente les prélèvements d’organes sur des pratiquants de Falun Gong pour fournir le marché très lucratif des transplantations, une pratique autorisée par l’État chinois.

Certains, qui sont inquiets des prélèvements d’organes, se demandent si Pékin devrait avoir le droit de recevoir les Jeux. Dans le documentaire, Clive Ansley, un avocat canadien qui a pratiqué le droit en Chine, compare Pékin 2008 aux Olympiques de 1936 dans l’Allemagne nazie, qui ont servi à glorifier et légitimer le régime d’Adolf Hitler.

L’ex-député fédéral David Kilgour est coauteur de Prélèvements meurtriers, un rapport sur le vol des organes des pratiquants de Falun Gong. Dans Beyond the Red Wall, il discute de son enquête et de quelle manière les fournisseurs d’organes admettaient librement dans des conversations téléphoniques qu’ils avaient des «sources Falun Gong» prêtes immédiatement à fournir des organes.

Le temps moyen d’attente pour une transplantation de rein apparaît silencieusement à l’écran, les données parlent d’elles-mêmes : Canada : 2555 jours; Royaume-Uni : 1095 jours; États-Unis : 1825 jours; Chine : 15 jours.

Beyond the Red Wall relate comment les pratiquants partout dans le monde sont devenus une voix pour leurs pairs en Chine, faisant pression auprès des politiciens et dénonçant la persécution, leur seul but étant en quelque sorte d’y mettre fin.

Zheng Weidong, de l’ambassade de Chine au Canada, nie dans le documentaire que les pratiquants sont torturés. Il déclare catégoriquement qu’en Chine, le Falun Gong s’est «effondré».

Telle est la nouvelle ligne du parti. En Chine, les médias d’État sont passés de constamment vilipender le Falun Gong à ne plus en parler, comme si le groupe n’existait plus.

Mais derrière cette façade, les rapports démontrent que le Falun Gong perdure en Chine, tout comme la persécution, qui est toujours aussi sévère.

 

Le deux tiers des allégations de torture en Chine sont des cas reliés au Falun Gong, selon le rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, Manfred Nowak. Les groupes de défense des droits de l’Homme ont documenté plus de 3000 cas de pratiquants de Falun Gong tués par la torture en Chine.

Loin d’avoir été éliminé, le Falun Gong continue même de croître silencieusement dans les régions rurales et les petites villes, selon Guo Guoting, un avocat chinois exilé ayant défendu les pratiquants en Chine avant que les autorités ne ferment son cabinet. Il a fui au Canada en 2005.

«Selon ma compréhension, le Falun Gong n’est pas seulement une pratique pour la santé physique; il s’agit en fait d’un type de croyance, d’une foi, et personne ne peut détruire la croyance personnelle», explique M. Guo. «C’est pourquoi c’est impossible pour le régime communiste de détruire le Falun Gong.»

Ian Johnson, qui a remporté le prix Pulitzer pour une série de reportages sur le Falun Gong, souligne dans le documentaire que la persécution «demeure une des cicatrices sur le corps politique de la Chine» et le temps est venu pour le régime d’«admettre et d’en finir avec cela et dire qu’il y a eu une terrible répression et que ces gens ont été systématiquement persécutés.»

«Pour que la Chine puisse aller de l’avant, il doit y avoir ce genre d’honnêteté.»

Comme l’affirme Kilgour, «la tuerie doit cesser».

Beyond the Red Wall est diffusé sur CBC Newsworld le mardi 6 novembre à 22 h et en reprise le samedi 10 novembre à 23 h.