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Le génie d'un recycleur - Il était une fois Walt Disney

Écrit par Fathi Bouzidi, La Grande Époque
25.02.2007
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Disney au Musée des beaux-arts

 

La découverte est habituellement la motivation principale d'une visite

dans un musée d'arts. Ce qui distingue l’exposition Il était une fois

Walt Disney, qui s'installe au Musée des beaux-arts de Montréal du 8

mars au 24 juin 2007, c'est qu'on connaît déjà tous Disney. Mais

pourquoi un tel représentant de la culture populaire américaine dans un

temple de l'art plutôt que dans la cinémathèque?

Maquette du château de La Belle au bois dormant, construit sur le site de Walt Disney World, en Floride. (Y. Tribes/Disney Enterprises Inc.) 

  • Maquette du château de La Belle au bois dormant(攝影: / 大紀元)

 

 

Est-ce un signe d'ouverture, un moyen d'attirer une nouvelle clientèle plus «branchée» ou tout simplement pour faire comprendre que Walt Disney était un artiste, comme l'affirme le Français Bruno Girveau, commissaire général de l'exposition coorganisée par la réunion des musées nationaux au Grand Palais à Paris et le Musée des beaux-arts à Montréal.

Quelles que soient les raisons qu'on peut invoquer, il faut savoir, au risque de décevoir certains, que l'exposition porte surtout sur les liens entre le père de Mickey et les autres arts, plus précisément, sur les sources artistiques qui l'ont inspiré. Tout un programme qui fait dire à plusieurs connaisseurs qu'Il était une fois Walt Disney s'adresse plus aux adultes qu'aux enfants.

Mais ce qui est certain, c'est que Disney ne laisse personne indifférent. Naïf pour les uns, il était un maître génial du dessin animé pour les autres. Ainsi, le cinéaste russe, Eisenstein, le considérait comme un grand artiste primitif et qualifiait son travail «de perfection absolue». Salvador Dali le citait parmi les trois plus grands surréalistes d'Hollywood. Walt Disney, lui, avait tout simplement peur d'être pris pour un intellectuel.

Contrairement à sa vie artistique, la biographie de Walter Elias Disney reste peu connue. On sait toutefois qu'il n'a pas connu son père, d'où le thème de la quête du père qui revient souvent dans ses films. Pratiquement autodidacte, avec «une intuition artistique infaillible», il commence à travailler très jeune en tant que dessinateur publicitaire avant de se lancer dans la réalisation de courts métrages avec son frère Roy. Après plusieurs faillites, il imagine le personnage de Mickey, qui est mis en forme par son collaborateur Ub Iwerks, et fonde les Walt Disney Productions.

Disney a déjà le don de s'entourer des meilleurs talents de l'époque et d'améliorer sans cesse les techniques d'animation. Conscient de sa culture personnelle limitée et de sa faiblesse comme dessinateur, Walt Disney décide, dès le milieu des années 30, d'utiliser sa grande force de rassembleur et de se tourner notamment vers l'Europe afin de trouver les idées et les hommes de talent qui lui manquent pour ses projets de longs métrages. Cette période charnière est marquée tout d'abord par le recrutement de quelques-uns des meilleurs illustrateurs et dessinateurs européens formés dans les académies d'art de leurs pays, émigrés aux États-Unis et amenant leurs propres influences académiques. Il s'agit, entre autres, du Suisse Albert Hurter, du Danois Key Nielsen et du Suédois Gustaf Tenggren. L'année 1935, plus précisément, est si déterminante qu'on peut parler d'un avant et d'un après cette date.

 

Le tournant de 1935

À cette période, âgé de 34 ans, Disney et son frère profitent d'un voyage en Europe, destiné à recevoir une médaille honorifique de la Société des Nations (SdN), pour ramener en Californie près de 350 ouvrages d'art illustrés du 19e et du 20e siècle. On remarque dans ces ouvrages notamment des «scènes, des ambiances, des lumières particulières», la plupart étaient des toiles de grands maîtres. Ce trésor, encore en partie conservé par les studios, est immédiatement mis à la disposition des illustrateurs embauchés afin qu'ils y puisent leur inspiration. Celle-ci remonte aussi loin que le Moyen Âge et embrasse des courants et des styles artistiques aussi variés que les primitifs flamands et italiens, le romantisme, les préraphaélites, l'expressionnisme ou encore le surréalisme.

En littérature, de grands classiques de la littérature européenne ont inspiré de nombreux films de Disney; à commencer par les fables d'Ésope pour les courts métrages. Aussi, Les aventures de Pinocchio de Collodi pour le film du même nom, les contes de Charles Perrault pour La Belle au bois dormant et Cendrillon.

La peinture européenne a marqué le monde disneyen à travers des peintres comme les Français Gustave Doré et Honoré Daumier, les Allemands Ludwig Richter et Heinrich Kley. L'inspiration d'artistes anglais est indéniable avec les éditions Alice au pays des merveilles de Louis Carroll ainsi que Peter and Wendy de James Barrie, illustrés par Arthur Rackham et John Tenniel.

Ayant radicalement renouvelé le thème de l'anthropomorphisme, ces illustrateurs et d'autres, tels que Benjamin Rabier et l'Anglaise Beatrix Potter, sont bien à l'origine des célèbres personnages de Disney.

Toutefois, le produit final, soit le film, reste tributaire d'un long travail d'équipe auquel participent activement Walt Disney au côté des scénaristes et des dessinateurs. En combinant leurs connaissances et leurs expériences respectives, ils «accouchent» enfin du personnage voulu avant de le faire animer. Mais il arrive des fois à Walt de fixer lui-même la personnalité ainsi que l'apparence graphique d'un personnage s'il n'est pas satisfait des propositions de ses collaborateurs.

 

 

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Ce processus est bien palpable dans le choix du personnage de la

Reine-sorcière dans Blanche-Neige et les sept nains, le premier long

métrage des studios Disney. Son visage a été inspiré par celui de

l'actrice américaine, Joan Crawford, et son apparence générale fait

référence à la statue colonne du portail de la cathédrale de Namberg,

en Allemagne.

Le monde du cinéma inspire grandement l'équipe de Disney dès les années

30. C'est le cas d'abord des courts métrages comme The Mad Doctor

(1933) qui reprend avec humour des scènes de Frankenstein de James

Whale (1931); de Modern Inventions (1937) dans lequel Donald fait sa

première apparition solo. Le cinéma expressionniste allemand marque de

façon plus profonde les premiers longs métrages des studios Disney. On

le constate nettement avec Faust de Friedrich Murnau dont on voit les

traces dans le film Fantasia (1940).

Les productions Disney comportent toujours une grande part de rêve qui

transporte le public grâce à de somptueux décors. Mais, encore là,

l'équipe va chercher son inspiration surtout en Europe à coup de

repérages sur le terrain. Au niveau architectural, on note que le

village de Pinocchio est en quelque sorte copié sur la cité médiévale

de Rothenburg, en Bavière. Le château de La Belle au bois dormant

s'inspire essentiellement des châteaux de Louis II, en Bavière.

Quant aux paysages, ils s'inspirent directement des forêts

anglo-américaines, de la peinture chinoise du 15e siècle ainsi que des

estampes japonaises.

Dans un autre volet de l'exposition, on est invité à découvrir la

rencontre inusitée, en 1945, entre le pape du dessin animé et celui du

surréalisme, Salvador Dali, et leur projet commun d'un film

s'intitulant Destino. Le film ne vit pas le jour du vivant des deux

artistes même s'ils ont laissé une centaine de dessins et de peintures.

À mesure que leur popularité augmentait et devenait universelle – et

surtout après la sortie de Blanche-Neige en 1937 – les studios se

transformaient à leur tour en source d'inspiration pour les autres.

Au cinéma, par exemple, Eisenstein et Prokofiev s'intéressent au

travail de Disney et du chef d'orchestre Léopold Stokowski dans

Fantasia pour préparer leur film Ivan le terrible en 1945. En peinture,

à partir des années 60, des artistes du Pop art et d'autres, comme Roy

Lichteinstein, Andy Warhol, Christian Boltanski, Bertrand Lavier et

Peter Saul, donnent à Mickey et Donald le statut d'icônes.

Le contenu proposé de l'exposition nous fait penser que la trame des

productions Disney est toujours la même. C'est avant tout des films

d'aventures à caractère familial dans lesquels les valeurs universelles

sont sauves; certains diront bien lisses ou trop puritaines. Et cela

correspond d'une certaine façon à l'image du sympathique oncle Walt

souvent véhiculée.

À ce propos, notons qu'Il était une fois Walt Disney n'aborde ni la

paranoïa du personnage ni ses nombreuses collaborations avec le FBI

pour dénoncer ses collègues syndiqués ou de gauche à ses yeux trop

subversifs.

À travers tout le cheminement artistique des hommes qui ont fait la

renommée des studios Disney, on constate que Disney était prêt à

recycler tout ce qui lui convenait dans l'art occidental pour en faire

un produit de masse. On constate aussi que le côté créateur provenait

des artistes recrutés.

Alors, il serait peut-être plus exact de baptiser l'exposition: Il était une fois Walt Disney et ses collaborateurs.

 

Avec les quelque 500 dessins originaux, peintures, maquettes, extraits

de films et objets attendus, le Musée des beaux-arts de Montréal compte

organiser une de ses plus importantes manifestations des dernières

années avec un objectif de 200 000 visiteurs. Pour cela, des moyens

conséquents seront sollicités tant au niveau des supports publicitaires

qu'au niveau organisationnel. Tous les moyens nécessaires sont donc mis

en marche pour que ce conte de fée soit raconté au plus grand nombre de

visiteurs.

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.