L'ensemble musical Tuyo poursuit son exploration du son sous toutes ses

formes, en entamant une tournée en avril prochain qui transportera les

musiciens et leurs instruments du Québec jusqu'en France. Le concert

judicieusement intitulé Big Bang évoquera les théories scientifiques

qui ont secoué notre vision du monde, ainsi que la création de

l'Univers.

Les instruments dits «normaux» et ceux inventés par le concepteur,

metteur en scène, compositeur et inventeur d'instruments, Carol

Bergeron, seront déplacés en avion cargo, vu l'immense taille de

certains des objets. Car pour provoquer un Big Bang, l'énergie sonore

déployée doit être colossale.

La plupart des instruments inventés par Carol Bergeron ressemblent à des instruments de percussion chromatique qui comportent habituellement douze notes par octave. Toutefois, les instruments fabriqués pour Tuyo peuvent jouer jusqu'à 43 notes par octave, «ce qui peut sonner faux», avertit le cofondateur du projet.

Le marimba raccordé fait partie de ce florilège d'instruments bizarres, une reconstruction de trois marimbas en fibre de verre, replacés sur une longueur de 4 mètres et trois octaves. Le son particulier ressemble vaguement au son d'un xylophone.

En visitant l'atelier de l'ensemble ou en se rendant à un de leurs spectacles, nul ne peut ignorer le site impressionnant de la «Baleine» et du «Béluga» qui surplombent la scène. Les deux instruments géants composés de tuyaux alignés à la verticale, d'une hauteur de 3 et 6 mètres, ressemblent aux carcasses du redoutable mammifère marin et forcent tout instrumentiste à courir, tel un joueur de tennis, pour faire résonner ces deux octaves.

Le spectacle combine des extraits de textes écrits par Copernic, Newton, Ptolémée, Kepler et Poincaré, tous récités par la comédienne Brigitte Soucy, vantant les mérites de certaines théories scientifiques de la Renaissance. Le format des pièces est souvent très distinct, sautant d'une narration à des longues mélodies de flûte typiquement orientales, à des énergiques passes de percussion.

L'artiste-à-tout-faire compare ce style de musique créé de toutes pièces au gamelan, un style de musique indonésienne qui inclut métallophones, xylophones et autres percussions, flûtes, instruments à cordes et parfois des vocalistes, où chaque instrument tout seul peut sonner «faux», mais forme un ensemble cohérent avec les autres parties. Ce style utilise des systèmes de notation différents de ce à quoi l'oreille occidentale est habituée, ce qui peut provoquer des réactions chez certains auditoires peu familiers avec ce genre.

Les organisateurs de spectacle expliquent que l'aspect décousu et un peu chaotique est voulu pour donner cette allure de «Big Bang».

«À l'intérieur d'un siècle, les idées reçues étaient niées par d'autres idées scientifiques. On fait un peu la même chose en déconstruisant la musique de toutes origines et de toutes sortes. Avec ce mélange, c'est un genre de big bang musical», explique Bergeron.