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Des bergers et des loups

Écrit par Catherine Keller, La Grande Époque - Genève
23.06.2007
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Le loup fascine, inspirant crainte et admiration. Pour certains bergers, ce serait plutôt entre haine et colère. En effet, ces hommes et ces femmes, amoureux de leur métier, de leurs bêtes et de la montagne, vivent des moments difficiles. La concurrence réduit leurs revenus à une peau de chagrin. Les chiens errants (abandonnés par des maîtres peu scrupuleux) mais plus souvent des chiens divagants (ceux du voisin !) attaquent les troupeaux sans qu’aucune indemnisation ne soit versée aux bergers qui sont victimes de ces attaques. Alors, quand viennent les loups, la coupe est pleine. Toutes ces frustrations s’accumulent chez le pauvre berger. 

  • Les loups sont de retour et fascinent toujours autant(攝影: / 大紀元)

 

 

 

Bien sûr, il y a des indemnisations en cas d’attaque par des loups, mais quand vous aimez votre bétail, que vous le couvez jour après jour et que vous êtes le témoin d’un tel charnier, l’argent ne compte plus vraiment. Les émotions et les sentiments prennent le dessus et l’impression de devoir subir sans rien pouvoir faire devient intolérable. C’est dans ce contexte qu’en France, l’association «A pas de loup» a créé une mission d’Eco-volontariat. Il s’agit d’aider concrètement les bergers qui souhaitent protéger leur bétail et ainsi sauvegarder les loups du coup de fusil des éleveurs en colère. Il est maintenant reconnu qu’un troupeau protégé a nettement moins de chance d’être attaqué par des loups. Mais tout cela a un coût.

 

Dans les zones où la présence du loup est permanente, les Alpes, et là où il commence à faire des incursions (Massif central et Pyrénées) la majorité des bergers refusent sa réintroduction. S’ils n’acceptent pas ce nouveau venu, c’est surtout à cause des contraintes qui l’accomagnent. Elles sont onéreuses et ils n’en n’ont souvent pas les moyens. «A pas de loup» offre à tous les bénévoles motivés par ce projet la possibilité d’acquérir une petite formation et de rejoindre les bergers qui acceptent de relever le défi. Ces volontaires dorment sous tente près des moutons car l’odeur de l’homme, «grand prédateur» du loup, a tendance à faire fuir ce dernier. La journée, ils aident le berger, découvrent un milieu et un métier qu’ils ne connaissaient pas. Cette approche ouverte permet un enrichissement que tout le monde apprécie. Ce projet s’appelle «Loupastres».

 

Actuellement, neuf éleveurs collaborent avec vingt cinq volontaires par an pour environ 600 jours d’écovolontariat. Ceux qui sont partis l’ont fait soit parce qu’ils arrêtaient le métier, soit parce qu’ils ont pris un aide-berger professionnel. Un berger a même engagé un bénévole comme aide-berger. L’association s’est séparée de deux bergers, l’un était violent avec ses bêtes et l’autre ne respectait pas les volontaires.

Le «Randoloup» est une autre activité qui dure une petite semaine. Il s’agit de passer d’un troupeau à l’autre selon un ordre prédéfini, de dormir près des bêtes et de remplir un questionnaire avec les bergers sur les prédations pour évaluer l’impact du loup et la meilleure manière de s’en protéger.

La sélection des bergers se fait de bouche à oreille, par les syndicats d’éleveur, le voisinage, les chambres d’agriculture, les salons et fêtes liés à l’élevage ou à l’agriculture. En plus de leur motivation à accepter un volontaire, le berger doit posséder moins de 1500  bêtes. Il doit avoir au moins l’un des moyens de prévention (berger, chien de garde, parc) et être en passe d’en prendre un deuxième, enfin travailler dans une zone à loup ou à proximité. L’enthousiasme des participants motive l’équipe fixe de « A pas de loup » qui cherche à développer cette entraide si enrichissante.

Témoignage de Claire Debien, 18 ans, volontaire chez Béatrice M.

«Expérience inoubliable que de vivre un mois le quotidien d’un berger ! De découvrir la beauté et la grandeur de ce métier ancestral, mais aussi ses difficultés : avoir faim, froid, garder sous la pluie, connaître l’angoisse d’avoir perdu des brebis, et la satisfaction toute simple de les voir toutes bien manger, d’avoir le temps de se préparer un café chaud», raconte-t-elle. Elle s’est attachée au bétail, comprenant que le loup ne soit pas apprécié des éleveurs. Elle a beaucoup aimé ce stage, a énormément appris et est prête à recommencer.

Témoignage de Béatrice M., Bergère partenaire d’APL, de 2002 à 2005

«J’ai vécu l’arrivée des volontaires comme un vrai réconfort : ça permet de ne plus se sentir toute seule, notamment dans ces moments où vous vous sentez complètement désarmée». Elle était  étonnée et heureuse de constater que des bénévoles s’intéressent à ses problèmes. Si au début, chacun se regardait en chien de faïence, très vite la rencontre de l’autre se transforma en une complicité profonde et durable. Elle trouve que transmettre l’amour de son métier est, certes, fatiguant mais avant tout magnifique.

 

Témoignage de Julie Dewilde

LGE : Avez-vous trouvé le métier difficile ?

 Julie : Le métier de berger est l'un des métiers les plus difficiles que je connaisse, c'est aussi l'un des plus beaux parce que authentique. Pas de jour de repos quand on est berger. Qu'il pleuve, qu'il neige, qu'il vente, il faut être dehors tous les jours, à surveiller son troupeau. Mais le métier de berger ne se résume pas à rester assis toute la journée, appuyé sur son bâton à regarder tranquillement son troupeau paitre. Il faut effectuer une surveillance permanente pour empêcher le troupeau d'aller chez le voisin. Il faut connaître parfaitement sa montagne, les plantes qui y poussent, celle qui sont plus ou moins bonnes pour les brebis. Il faut être capable de gérer parfaitement sa montagne pour que les brebis aient à manger pendant les quatre mois d'estive. Pas question donc de laisser son troupeau aller ou il veut. En plus de ce travail de surveillance, il faut apporter les soins aux brebis blessées, plusieurs fois par semaine (en été les mouches peuvent faire des dégâts terribles), il faut s'occuper des brebis qui vêlent et les séparer elles et leur agneau du troupeau, marquer et baguer les agneaux… Avec l'arrivée du loup, nouvelles contraintes :   il faut construire des parcs de contention pour la nuit, déplacer ces parcs régulièrement pour éviter les risques d'épidémie de piétin, nourrir et s'occuper des chiens de protection…La nuit il faut rester sur le qui-vive, en cas de problèmes, intervenir.

La journée d'un berger c'est 6h du matin, 20h le soir non stop (excepté une petite pause pendant la chaume), tous les jours.

Si par-dessus cela s'ajoute une attaque de loup, le berger doit chercher les brebis manquantes dans la montagne (sinon pas d'indemnisation) et le troupeau est laissé seul donc se disperse, ce qui signifie un surplus de travail pour les regrouper…il doit prendre rendez vous avec un expert, être en général disponible toute la journée pour l'expertise (qui s'occupe du troupeau pendant ce temps ?)

Bref, ce métier est tellement difficile qu'il ne peut s'exercer que par passion, par vocation. Il implique énormément de sacrifice. Avec un tel travail, comment s'occuper correctement d'une famille ?

 

LGE : Avez-vous reçu bon accueil ?

Julie : J ai rencontré 7 ou 8 bergers différents. J'ai toujours reçu le meilleur accueil de la part des bergers. Même si certains se montrent réticents au premier abord, si vous vous impliquez dans leur travail, que vous ne rechignez pas a la tache, que vous les écoutez sans les juger ni leur donner de conseils, alors l'accueil sera toujours cordial. Je viens d'un milieu agricole, il est peut-être plus facile pour moi d'avoir de bons contacts avec les bergers. Quoiqu'il en soit les bergers ont un sacré caractère (et il en faut absolument pour faire ce métier la), il ne faut donc pas s'offusquer quand parfois les propos sont un peu crus et je conseille toujours de ne jamais aborder le problème du loup directement mais de leur laisser le temps d'en parler d'eux même, c'est la meilleure façon d'en apprendre le plus possible sur le sujet sans les braquer.

 

LGE : Avez-vous vu le loup ?

Julie : En 5 ans d'estives dans les zones a loup : jamais. La seule anecdote est l'année dernière (voir rapport en annexe). Preuve que les loups se font plutôt discrets….et que la présence humaine prés d'un troupeau reste le premier moyen efficace de protection contre les loups. La première année, je gardais un troupeau de chèvres seule. Ce troupeau avait l'habitude de parcourir la montagne seul sans surveillance. Des attaques de loup répétés ont poussés les propriétaires à prendre des écovolontaires. Depuis que le troupeau est gardé, plus aucune attaque.

 

LGE : Avez-vous vu des hordes de chiens sauvages ?

 Julie : Non. Le seul problème que j'ai eu avec des chiens venait de chiens de chasse divaguant qui provoquait la panique dans le troupeau (cela m'est arrivé sur deux estives). Il n'y a pas eu d'attaques mais des mouvements de dispersion qui ont amené du travail supplémentaire pour rassembler le troupeau paniqué.

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Témoignage de ma dernière estive

Mon estive chez Patrick Bruno s’est déroulé du 28 aout au 30 septembre, soit un peu plus de 4 semaines.

Ce n’était pas ma première expérience d’estive, et je suis revenue, comme à chaque fois, enthousiasmée, les images de brebis, de montagnes et de bergers plein la tête.

Cette estive a encore été une nouvelle fois riche en émotions avec des bons et des mauvais souvenirs, des moments difficiles et d’autres qui resteront gravés. Patrick a ses bons et ses mauvais côtés, comme tout le monde, il a un sacré caractère et moi aussi…du coup, forcément certains jours étaient plus enflammés que d’autres ! Mais Patrick est quelqu’un de profondément gentil et généreux, qui m’a respecté tout au long de l’estive et qui n’a pas hésiter à donner de son temps pour m’aider dès que j’avais un souci.

D’autre part, c’est quelqu’un de franc qui n’hésite pas à dire ce qu’il pense. Nous avons eu donc régulièrement des discussions très intéressantes sur le métier de berger et bien sur , sur le retour du loup en France. Je le remercie pour son honnêteté et aussi pour m’avoir toujours écouté avec respect même lorsque nos points de vue divergeaient.

Le courant est très vite passé avec Patrick, dès le premier jour. Il a été tout de suite très ouvert et accueillant et nous avons parlé du loup et des chiens de protection dès la première journée. Ce n’est jamais moi qui est engagé la conversation sur ces sujets un peu délicats. Je lui ai toujours laissé l’initiative. Mes différents contacts avec les bergers m’ont appris qu’il fallait éviter de leur poser des questions trop directes à ce sujet. Tôt au tard, ils en parleront, et je leur laisse toujours l’initiative de ce moment. Ils sont ainsi plus ouverts et parlent plus librement. Je pense que c’est important car ils se sentent facilement agressés ou jugés quand l’initiative vient de l’autre parti et ils sont alors plus sur la défensive.

Avec Patrick, j’ai eu la chance de rencontrer pratiquement tous les bergers des alentours autour d’un verre ou d’un bon repas, chez l’un ou chez l’autre. Je n’ai jamais été laissé à l’écart, j’ai toujours été cordialement invité même chez des bergers très réfractaires au retour du loup en France et aux «pro-loups». J’ai pu obtenir l’avis de chacun sur ses sujets. J’ai entendu beaucoup de «classiques» telles que «les loups ont été réintroduits par les écolos uniquement pour em… les bergers» ou «il faut choisir, c’est les loups ou les bergers, alors Julie, tu choisis quoi ?»et j’en passe. Et après deux ou trois verres de génépi, les discussions étaient lancées ! Certains jours, j’avoue avoir été un peu découragée. J’écoutais sans plus rien dire. Je me disais que les mentalités ne changeraient jamais et j’en venais à douter de l’utilité de ma démarche. Il est vrai que, quand pendant toute une soirée, vous vous retrouvez seule contre tous, le moral n’est pas au beau fixe. Mais je n’ai jamais changé ma position, je n’ai pas cédé de terrain et je crois qu’ils m’ont respecté pour cela : pour garder mes idées sans jamais les leur imposer.

Et puis, un jour, au cours d’une soirée où Patrick n’était pas là, la conversation est partie sur une sorte de réserve à loups qu’il faudrait créer pour satisfaire tout le monde. Les bergers étant prêts à céder une ou deux montagnes, on les grillage, on met tous les loups de France dedans, on leur laisse faire leur vie et en dehors de ce parc on les tue tous. Comme ca, tout le monde est content : les bergers parce qu’ils sont tranquilles et qu’ils peuvent tuer les loups en dehors du parc et les écolos parce qu’ils pourront sauver tous les loups qu’ils veulent en les mettant dans ce parc…bon alors, évidemment, j’ai essayé tant bien que mal de leur montré l’absurdité de cette «solution», sans trop de succès. Et puis, un des bergers qui n’était pas encore intervenu, s’est mis soudain à parler : «Je peux en placer une ? Moi je dis que Julie, elle a raison. Vous pouvez leur laisser 3, 4 voire 10 montagnes, ca changera rien. C’est débile ! C’est typique de l’Homme ca de vouloir dominer la nature, regarder où c’est en train de nous mener. Il ne faut pas essayer de gérer la nature à tout prix comme ca, il faut s’adapter. Le loup est revenu, il est là et il va y rester. Ca nous em… mais c’est comme ca. Alors, c’est à nous de nous adapter, c’est tout !» et il s’est levé pour aller boire un verre. Les autres n’ont plus rien dit et puis ils ont changé de sujet. Moi, de mon côté, j’avais le sourire aux lèvres et j’avais retrouvé l’espoir : j’avais eu le droit à mon premier soutien depuis le début de l’estive!

L’estive a donc été extrêmement riches en échanges. J’ai encore beaucoup appris sur la vision des bergers à propos de ce problème. J’ai également pu améliorer mes connaissances sur le métier de berger en lui-même. Chaque berger a sa façon de travailler selon sa montagne et les moyens de protection qu’il utilise. Avec Patrick, par exemple, j’ai appris une nouvelle technique de soin, étonnante au premier abord mais terriblement efficace : soigner les plaies avec de l’essence ! La première fois que je l’ai vu faire, j’ai été dubitative voire même choquée. C’est la première fois que je voyais cela. J’avais été habitué aux produits vétérinaires classiques : désinfectants, Bétadine, cicatrisants… extrêmement onéreux, mais de l’essence pure versée sur une plaie, cela a été une première ! J’ai vite changé d’avis quand j’ai vu l’état de son troupeau (en parfaite santé avec très peu de boiteuses) et l’état des plaies après ce traitement. Il n’y a pas de secret, de toute façon, même un néophyte remarquerait un troupeau mal soigné. Et celui de Patrick est le plus beau troupeau que j’ai pu voir. Des brebis qu’on attrapait, avec des plaies profondes et remplies d’un nombre incalculable d’asticots, guérissaient en quelques jours sans qu’on soit obligé de s’en préoccuper plus tard. Je me rappelais alors, les longues séances de soins avec Christian, l’année dernière, où on enlevait les vers un à un avec une pince à épiler…long et laborieux et la brebis ne guérissait pas toujours… Quand je suis revenue d’estive, je me suis empressée d’aller raconter à Christelle et Christian comment Patrick soignait ses brebis !

Et puis grâce à Patrick, j’ai pu enfin garder mon troupeau toute seule. Durant la première semaine, le troupeau avait été séparé en deux : un de 400 brebis environ parmi lesquelles on avait rajouté les béliers et un autre troupeau beaucoup plus gros qui ne contenait pas de bélier. Moi je m’occupais du premier (j’ai pris la suite de Clémence). Je descendais le matin pour les sortir du parc, puis je les emmenais plus bas, là où il restait encore de l’herbe et le soir je les ramenais au parc. Bon… le premier jour, ce sont plutôt elles qui m’ont ramené : la montagne était grande et j’ai eu du mal à me repérer…Pendant la chôme, de midi à 16h environ, j’en profitais pour me reposer, profiter du calme de la montagne et faire quelques photos naturalistes. Cette première semaine s’est déroulée à merveille et le temps était magnifique.

Les choses se sont un peu gâtées ensuite. Nous avons réuni le troupeau et enlever les béliers. Du coup, il n’en restait plus qu’un seul et je me suis sentie d’un coup complètement inutile : en effet, du même coup, Patrick faisait tout le travail et ne me laissait plus aucune initiative. J’ai donc passé plusieurs jours entiers à le regarder faire et je n’ai fait que le suivre ou plutot l’attendre dans son 4*4…et quand il pleut, les journées dans le 4*4 sont très, très longues ! Surtout lorsqu’on ne se parle pas…

Alors, je lui ai demandé de me laisser un peu plus travailler avec le troupeau. Je lui ai expliqué que je ne voulais pas passer les trois semaines qui me restaient à simplement le regarder faire de loin. J’étais là pour l’aider et je comptais bien m’impliquer un peu plus.

Du coup, il m’a laissé garder quelques fois le troupeau de 1800 brebis toute seule, pendant qu’il devait s’absenter. Il m’a même fait suffisamment confiance pour me laisser guider son chien de conduite, un chien très intelligent d’ailleurs et qui faisait son travail à merveille.

J’ai passé de très bons moments seule avec le troupeau, ils font partie de mes meilleurs souvenirs d’estive. Dommage qu’ils aient été un peu rares….

Je n’ai, encore une fois, pas été confronté à une attaque. Une nuit toutefois, alors que nous rentrions tard de chez un autre berger, je m’étais endormie dans le 4*4. Le troupeau n’était pas parqué cette nuit là : en effet, Patrick craignait plus une épidémie de piétin sur son troupeau qu’une attaque de loup et parquer un troupeau quand il a plu pendant des jours et que le sol est boueux est le meilleur moyen de déclencher une épidémie. Cette nuit là donc, je somnolais dans le 4*4 quand Patrick m’a réveillé : dans les phares de la voiture, le troupeau faisait des mouvements de panique inhabituels et Patrick me dit : tu vois le renard en face ? eh bien au dessus, je viens de voir trois paires d’yeux, juste au dessus du troupeau et ce n’était pas du renard, c’était plus gros. Tout de suite, nous avons pensé au loup. En effet des chiens errants dans le quartier il n’y en a presque pas, tout au plus sont ils isolés, alors trois ensemble… ! Nous n’avons jamais su avec exactitude si c’étaient effectivement trois loups qui avaient effrayés le troupeau à ce point. Nous avons tourné en 4*4 pendant une demi heure autour du troupeau mais nous n’avons plus rien vu. Il est possible que ce soir là nous soyons arrivés à temps et que notre arrivée est décourager les loups mais nous ne le saurons jamais. Ce soir là, j’ai eu du mal à m’endormir, je voulais absolument aller monter ma tente à côté du troupeau au cas où ils reviendraient mais Patrick a refusé catégoriquement. Le lendemain, nous n’avons compté aucune perte sur le troupeau.

Patrick reste persuadé qu’une présence humaine à côté du troupeau est complètement inutile et qu’elle n’empêchera pas le loup d’attaquer s’il l’a décidé. Je n’ai donc jamais dormi à côté du troupeau même si je ne partageais pas son avis. D’autre part, il ne veut pas non plus entendre parler des patous, qui selon lui créent plus de dégâts au troupeau qu’il ne permet de les protéger. Là encore on pourrait discuter de cette opinion mais il est loin d’être le seul berger qui pense cela.

Au final, j’ai vécu des estives très enrichissantes, tant au niveau discussions qu’au niveau pratique. Je garde en mémoire tous les animaux que j’ai croisés régulièrement lors de ce mois de septembre : des renards, des chevreuils, des sangliers, des lièvres, des engoulevents, des cerfs magnifiques… et les éphipigères qui m’ont bercé pendant mes siestes !

Je garde en mémoire le moment émouvant où un jour, nous avons cru avoir perdu un agneau, sa mère le cherchait partout. Le lendemain, nous l’avons retrouvé, par hasard, grâce à l’ouie sans faille de Patrick, il avait échappé aux prédateurs pendant la nuit et nous avons pu le rendre à sa mère !

Je garde aussi en mémoire, les longues soirées avec les bergers à vider les bouteilles une par une en refaisant le monde. Je garde en mémoire les jours où j’ai pu garder seule un troupeau de 1800 brebis et redécouvrir à quel point j’aimais ce métier.

Ce fut encore une fois une estive très riche en émotions ! Merci au programme Loupastres.

 

Extrait du livre Aux côtés des bergers et des loups, édité par «A Pas de Loup», 2007.

«A pas de loup» propose de découvrir d’autres projets éco-citoyens en France et dans le monde. Pour connaître tous les détails de ces opérations, consulter  le site de l’association ICI

 

 

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