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Un an après la guerre, le Liban rêve de reconstruction...

Écrit par Aurélien Girard, La Grande Époque
25.07.2007
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La conférence organisée par la France pour un «dialogue national libanais» a eu lieu du 13 au 16 juillet, un an presque jour pour jour après la «guerre de juillet».  C’est en effet du 12 juillet au 14 août 2006 qu’Israël lançait une offensive terrestre contre le Sud Liban en réponse aux attaques des milices du Hezbollah. La population libanaise s’est alors retrouvée victime des attaques. Un an après, le Liban peine à se relever, épuisé par les plaies mal cicatrisées du conflit, par la menace constante des attentats et par les déchirements politiques internes entre franges pro- et anti-syriennes du Gouvernement. 

  • Zawtar as Sharqia – un membre de Mines Advisory Group (MAG) cherche des bombes à sous-munitions dans un verger du Sud Liban(Staff: MARWAN NAAMANI / 2006 AFP)

 

 

La guerre manquée d'Olmert contre le Hezbollah

Au début de l’été 2006, l’armée israélienne Tsahal mène dans la bande de Gaza l’opération « Pluie d’Eté » dirigée contre les terroristes du Hamas, en représailles à l’enlèvement d’un soldat de Tsahal – toujours détenu aujourd’hui – et aux incessants tirs de roquettes artisanales palestiniennes, depuis Gaza sur les  villes israéliennes de Sderot et Ashkelion.

L’intervention de Tsahal à Gaza fait rapidement des victimes civiles, jusqu’à des familles palestiniennes touchées sur les plages par des missiles tirés depuis des navires israéliens.

Au Liban Sud, les activistes du Hezbollah commencent alors à leur tour à tirer des roquettes sur le nord d’Israël. On est au 18e jour de «Pluie d’Eté» quand des membres du Hezbollah pénètrent sur le territoire israélien, attaquent une patrouille de Tsahal, tuant trois militaires et faisant deux autres prisonniers. La suite est, de l’avis même de la commission d’enquête spéciale israëlienne, une intervention massive dénuée de toute stratégie : le gouvernement d’Ehud Olmert déclenche une offensive militaire terrestre dans le sud Liban pour libérer les prisonniers, détruire les installations du Hezbollah, et contraindre le gouvernement libanais à désarmer le Hezbollah et déployer ses troupes sur la frontière israélo-libanaise, comme prévu par la résolution 1559 (2004) du Conseil de sécurité de l’ONU.

Un mois après, c’est une autre résolution de l’ONU, la 1701 (2006) qui met fin à l’intervention israélienne et aux bombardements du Hezbollah. Pendant cette courte période de 34 jours, un million de Libanais, soit un quart de la population, ont été déplacés ; la ville de Tyr et le sud de Beyrouth sont presque entièrement détruits.  Les pertes civiles sont de 1 300 personnes au Liban, dont un tiers d’enfants. Côté israélien, une cinquantaine de civils ont été tués par les 4 000 missiles que le Hezbollah a tirés sur le nord d’Israël – corollaire économique à cela côté israélien, 1 milliard de dollars de dégâts.

   

Bons souvenirs de l'été 2006

Le gouvernement libanais a de son côté estimé les pertes liées aux destructions d’infrastructure à près de 4 milliards de dollars : centrales électriques, relais d’approvisionnement en essence, routes et ponts, stocks de nourriture, réservoirs d’eau, réduisant quasiment à néant plus de 15 ans d’efforts de reconstruction du pays.

Pour couronner le tout, une gigantesque marée noire au sud de Beyrouth et, sur près des 300 sites différents, sur le sol comme dans les arbres fruitiers, des milliers de bombes à sous-munitions non explosées.

Hezbollah, Syrie et Parlement

Le Hezbollah a très rapidement su se positionner après la guerre comme un des grands partenaires de la reconstruction du Liban, renforçant ainsi sa base populaire et cultivant une image de protecteur des Libanais contre les forces «alliées aux Américains et aux Juifs». Alors que le gouvernement de Fouad Siniora peinait à mettre en œuvre la reconstruction, les membres du Hezbollah, déjà perçus par la population comme ayant protégé le pays de l’agression israélienne, avaient la truelle à la main et le sac de ciment sur les épaules. Les mémoires sont sélectives, tous ne se sont pas souvenus que quelques semaines avant les mêmes membres du Hezbollah utilisaient des civils comme boucliers humains.

Le mouvement radical chiite, influencé sinon télécommandé par Damas et par Téhéran, a ainsi gagné en force politique malgré son affaiblissement militaire supposé suite au conflit de juillet 2006 : il a ainsi pu, par la démission des ministres libanais proches du Hezbollah et de la Syrie, paralyser le pays depuis novembre 2006, au point que l’ONU a dû faire passer en force l’adoption du Tribunal International destiné à juger les meurtriers de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri – et utilisé par les Etats-Unis comme moyen de pression sur la Syrie.

Autre preuve marquante de l’importance prise par le Hezbollah depuis 2006, le groupe a, pour la première fois, été invité à la conférence sur l’avenir du pays organisée par la France, à La Celle-Saint-Cloud, du 13 au 16 juillet 2007.

Indirectement, c’est également la Syrie qui se sent renforcée, un an après la guerre de juillet : les assassinats politiques au Liban ont repris (celui de Pierre Amine Gemayel par exemple, ministre de l’Industrie, assassiné le 21 novembre 2006 juste après la démission des ministres chiites), et Damas serait en plein préparatifs militaires pour une éventuelle opération visant à reprendre le contrôle du plateau du Golan, territoire actuellement israélien dont la propriété est disputée par la Syrie.

Et Nahr-El-Bared dans tout cela

Certains analystes vont maintenant jusqu’à parler d’une «irakisation» du Liban, illustrée par l’apparition de Fatah-al-Islam, groupe terroriste proche d’Al-Qaïda qui serait impliqué dans l’assassinat du ministre Gemayel en plus des différentes attaques menées au printemps 2007 jusqu’au cœur de Beyrouth. Retranchés dans le camp de réfugiés de Nahr-El-Bared, les terroristes sont indélogeables depuis près de deux mois, au grand discrédit de l’armée libanaise censée symboliser le pouvoir de souveraineté du Liban.

Conséquence de la paralysie politique et de l’insécurité du Liban, le repli des investisseurs dont les fonds auraient pu permettre la construction, et la non-reprise du tourisme.

Bien que le Liban Sud ait été pacifié par les troupes libanaises et par 13 000 Casques bleus de la Force intérimaire des Nations unies (Finul), le pays reste miné par la crise. Pour l’UNICEF par ailleurs, «l’instabilité actuelle de la situation politique et les menaces à la sécurité dans tout le pays compromettent gravement la capacité des enfants à se rétablir complètement et à progresser».

Dans ce contexte de violence devenue chronique, le conflit entre la majorité anti-syrienne, soutenue par les Occidentaux et l’Arabie saoudite, et l’opposition, alliée de la Syrie et de l’Iran, menace de s’envenimer encore à l’approche de l’élection présidentielle prévue fin septembre. «Le règlement de la crise échappe aux Libanais et leur pays est devenu une monnaie d’échange», résume l’analyste Ghassan Ezzé.

 

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.