Un été israélien

Écrit par Aurélien Girard, La Grande Époque
25.08.2007

 

  • Le Premier ministre israélien Ehud Olmert (G) et Benjamin Netanyahu (D), son possible successeur en cas d’élections anticipées.(Pool: LEFTERIS PITARAKIS / 2006 AFP)

Un an après la guerre au Liban Sud alors que des experts militaires prédisent un prochain affrontement avec la Syrie sur le plateau du Golan, Israël jongle entre combats politiques intérieurs, choix de stratégie face à la menace irano-syrienne et établissement de relations avec une autorité palestinienne déchirée entre islamistes radicaux du Hamas et laïques du Fatah.

Aide militaire

Israël fait face à des changements profonds de la scène internationale – en particulier la montée en puissance de l’Iran et les difficultés des Etats-Unis à stabiliser la situation en Irak et en Afghanistan. La pression sur le pays, encore qualifié «d’étendard de Satan» samedi dernier, 18 août, par le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, s’accroît donc ostensiblement.

Plus proche d’Israël, Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah libanais, a célébré le 14 août avec des milliers de partisans l’anniversaire de la «victoire divine» lors de la guerre au Liban Sud de l’été 2006. C’est dans ce contexte général d’un monde musulman de plus en plus ligué contre la «menace sioniste» qu’Ehud Olmert a reçu, le 16 août, la promesse d’une aide militaire américaine de 30 milliards de dollars sur les dix prochaines années, en augmentation de 25 % sur l’aide actuellement reçue par Israël.

«Ces 30 milliards de dollars d’aide militaire constituent un investissement dans la paix que l’on ne pourra atteindre sans qu’Israël soit fort», a affirmé le numéro trois du département d’Etat américain, Nicolas Burns, cité par l’AFP. «Les Etats-Unis, Israël et de nombreux pays amis dans le monde arabe font face à une situation où l’Iran tente de parvenir à une capacité nucléaire et où il existe une coopération entre l’Iran, la Syrie, le Hezbollah (libanais), le Jihad islamique palestinien et d’autres groupes responsables du conflit dans la région.»

Dialogue avec le Fatah

Tout n’a cependant pas en Israël l’arrière-goût de préparatifs à une guerre jugée inéluctable : le mois d’août a aussi vu des progrès inespérés dans l’ouverture de négociations sur la création d’un état palestinien : le 6 août, Ehoud Olmert a ouvertement abordé le sujet lors d’une rencontre à Jericho avec le président palestinien Mahmoud Abbas. Il ne s’agit encore que d’un accord de principe sur l’idée de négocier les frontières d’un futur Etat palestinien, le statut de Jérusalem et des réfugiés palestiniens de 1948. Mais l’avancée pourrait devenir concrète et dépasser le stade des poignées de mains photographiées si, comme la presse israélienne croyait le savoir fin de semaine dernière, Israël acceptait effectivement de cesser de poursuivre les activistes du Fatah promettant de renoncer à la lutte par les armes. Le ministre palestinien de l’Information, Riyad al-Malki, considère la chose comme acquise et a affirmé samedi dernier qu’ «Israël s’est engagé à ne plus pourchasser 110 Palestiniens qui ont remis leurs armes à l’Autorité palestinienne et promis par écrit de renoncer à la violence.»

La portée de ces gestes encourageants est malheureusement à passer au bémol du contrôle total par le Hamas de la bande de Gaza depuis mi-juin : l’autorité palestinienne n’est plus aujourd’hui représentative que d’une fraction – indéfinie – de la population palestinienne.

Benjamin Netanyahu prépare son retour

Et enfin, la portée de ces gestes est à conjuguer au conditionnel vu la notable prise d’influence d’extrémistes juifs au sein du Likoud, le grand parti de centre-droit israélien. Benjamin Netanyahu, ancien Premier ministre, a largement dominé les élections internes de ce parti et se prépare à un retour au pouvoir si la survie politique d’Ehud Olmert, comme beaucoup le supposent, ne dépassait pas la publication à l’automne du rapport définitif de la commission d’enquête sur les ratés de la guerre au Liban en 2006. Que va impliquer sa nomination s’il est porté au pouvoir par un parti dans lequel presque 25 % des adhérents ont voté pour le candidat d’extrême droite, Moshé Feiglin, hostile à toute concession territoriale aux Palestiniens ? Les porte-parole du Likoud se veulent rassurant et annoncent à demi-mot l’exclusion possible de leur parti des représentants de la frange d’extrême-droite. Ce qui n’est pas encore fait et laisse entier le risque d’une radicalisation du grand parti israélien.