Le nouveau droit du travail en défavorisera-t’il les entreprises et les employés en Chine ?

Écrit par Lufang, Yulian, La Grande Epoque / Radio Son de l’Espoir
14.01.2008

  • chomeur(STR: STR / ImageForum)

Depuis le 1er janvier 2008, la Chine applique un nouveau droit du travail, dont l’arrivée provoque depuis des mois des licenciements massifs et inquiète autant les salariés que les employeurs.

 

Aux termes de cette nouvelle réglementation, calquée sur les modèles occidentaux, les entreprises n’ont plus le droit de recourir comme auparavant à de la main d’œuvre temporaire de façon indéfinie, et sont poussées à signer des contrats à durée indéterminée ou à faire appel à des entreprises de travail temporaire. Après 10 années de travail temporaire, une entreprise chinoise qui n’offrirait pas un emploi permanent à son employé devrait payer des taxes supplémentaires. Ceci explique la vague de licenciements de la fin d’année 2007, par laquelle les entrepreneurs espèrent « remettre les compteurs » à zéro pour pouvoir réembaucher leurs employés sans subir immédiatement la nouvelle législation sur le travail.

 

Parmi les autres mesures, l’obligation d’un contrat de travail pour tout salarié, une réduction de la durée de la période d’essai et des indemnités de licenciement d’un mois de salaire par année travaillée. Certains experts chinois estiment que cette nouvelle loi va accroître d’au moins 8% les coûts salariaux pour les entreprises, et donc réduire l’attractivité du pays pour les entreprises étrangères.

 

Chargé d’investissements transnationaux, l’avocat et  homme d’affaires taïwanais  Tong Wenxun observe : «Beaucoup d’usines, n’arrivent pas à réaliser des profits  supérieurs à 5%. Ces industries à forte densité de main-d’œuvre perdent maintenant tout intérêt de travailler en Chine.»

 

Plusieurs entreprises taïwanaises et hongkongaises contactées par nos correspondants ont confié souhaiter épurer leur carnet de commandes et de désengager progressivement de Chine en retirant leurs capitaux ou en diminuant leur production.  Le président des hommes d’affaires taïwanais à Shenzhen (Sud de la Chine), M. Huang Mingzhi  a estimé que sur les 4000 entreprises taïwanaises implantées dans cette mégalopole industrielle, au moins  un dixième seront forcées de fermer des usines. Le président des hommes d’affaires taïwanais de la ville  Dongguan, M. Yie Chunrong a lui aussi estimé que ce serait plus du dixième des 6700 entreprises de la région fermeraient. Le président d’honneur de l’association des entreprises taïwanaise de Fuzhou enfonce encore plus le clou : «À voir l’actuelle situation et l’élévation continue des coûts, certains commerçants n’hésitent pas à abandonner. Ce sont plusieurs milliers d’ouvriers qui se préparent à  être licenciés, peut être même plusieurs millions.»

 

En juillet, « la Grande perle  du triangle commercial de Hongkong » a publié une enquête indiquant également que fin 2007,  10000 entreprises hongkongaises devraient réduire leurs effectifs, tendance retrouvée dans la province de Guangdong,  pour 30000 entreprises appartenant aux hommes d’affaires de Hongkong.

 

Selon les agences de presse, en juillet 2007, LG électron de Corée a renvoyé 11% de ses employés chinois. Et octobre, le centre mondial d’achats de Walmart a renvoyé environ 200 employés de Shanghai, de Shenzhen, et de Dongguan. Shanghua Entreprise, le plus grand fabricant d’équipement de télécommunications en Chine a renvoyé tous les employés ayant plus de 8 ans d’ancienneté, y compris le président-directeur général  M.Ren Zhengfei. Tous ces employés vont se remettre en service avec un nouveau contrat.  

 

Pour Tong Wenxun, «faire de emploi perpétuel alors votre pays ne peut pas l’assumer revient à détruire la force nationale », «Bien qu’on puisse penser à court terme que cette loi est attrayante, les employés vont en fait perdre des occasions de travail, parce que les entreprises ne tiendront pas et choisiront de partir ».

 

Dans un pays où les cas d’esclavage moderne ont été trop souvent rapportés – courant 2007 le cas de centaines de travailleurs esclaves torturés par leurs employeurs dans des briqueteries a par exemple trouvé son chemin jusqu’aux médias occidentaux - le nouveau droit du travail est censé offrir une respectabilité aux conditions de travail en Chine. Les conséquences restent difficiles à prévoir mais, si le moindre impact se fait sentir sur l’emploi, pourraient être explosives. Le régime communiste chinois, qui fait face à une augmentation régulière des manifestations de protestation populaire,  est assis sur une cocotte-minute.