La tête de RSF écrit à Sarkozy pour la libération de Hu Jia

Écrit par Zhang Yue, La Grande Époque - Paris
28.01.2008
  • Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières(攝影: / 大紀元)

PARIS – Le 10 décembre 2007, Journée mondiale des droits de l’homme, Reporters sans frontières et la Fondation de France ont organisé leur cérémonie de remise du Prix 2007 de la liberté de la presse. Avec l’approche des Jeux olympiques de 2008, un prix spécial «Chine» a été créé et décerné à Hu Jia, réputé défenseur des droits de l’homme. Il y a eu, lors de cette cérémonie, une conversation en direct avec M. Hu grâce à une connexion audiovisuelle.

Dix-sept jours plus tard, Hu Jia a été arrêté sous l’accusation de «subversion de l’État» par le régime communiste de Pékin. Son arrestation a attiré l’attention de la communauté internationale. La Grande Époque a interviewé Robert Ménard, secrétaire général de l’organisation Reporters sans frontières (RSF), pour connaître sa réaction.

La Grande Époque (LGÉ) : Hu Jia a été arrêté il y quelques semaines en Chine. Est-ce que vous pensez que son arrestation a quelque lien avec RSF?

Robert Ménard : J’espère que non. J’espère que le fait qu’il ait eu le courage de s’exprimer en direct via Internet au moment où nous avons remis ce prix pour la Journée des droits de l’homme, cela n’a pas eu, comme conséquence, son arrestation. Mais, évidement, je ne peux pas l’exclure, qu’il ose dire ce qu’il a dit en direct sans précaution sachant que ça allait être repris partout, c’est vraiment courageux. C’est pour ça que je me sens d’autant plus responsable, j’ai écrit immédiatement à Nicolas Sarkozy [président français] en lui demandant personnellement d’intervenir auprès des autorités chinoises parce que nous ne pouvons accepter ça.

LGÉ : Est-ce que vous êtes intervenu auprès du gouvernement français?

Robert Ménard : Pas auprès du gouvernement, mais du chef d’État. Je lui ai écrit une lettre personnellement. D’habitude, on écrit une lettre un peu impersonnelle, de l’organisation au chef de l’État. Non, dans ce cas-ci, je lui ai parlé de ce que je connais, je lui ai dit que j’avais besoin de lui, je lui ai raconté que Hu Jia était intervenu auprès de Reporters sans frontières lors de cet événement, donc que je me sentais responsable de cette histoire-là. Je lui ai demandé d’intervenir tout de suite, lui, auprès des autorités chinoises pour obtenir sa libération. Il me semble que Hu Jia est devenu et va devenir le symbole de l’arbitraire avant les Jeux olympiques. C’est le symbole d’un régime qui ne respecte pas ses engagements.

Mener une campagne dans le monde entier pour Hu Jia

LGÉ : Vous avez des nouvelles récentes concernant Hu Jia?

Robert Ménard : Non, nous n’avons pas de nouvelles récentes. Au moment où j’ai écrit, on ne savait même pas où il était détenu. Aujourd’hui, la priorité pour nous est de mener une campagne dans le monde entier pour lui. En faire le symbole de ce qu’on espère pour les Jeux olympiques, cela permettra la libération d’un certain nombre de gens. Cette arrestation témoigne du mépris des autorités chinoises pour tous les défenseurs des droits de l’homme, en plus de ne pas libérer des gens, elles emprisonnent des gens symboliques.

LGÉ : À part le gouvernement français, est-ce que RSF va lancer d’autres actions pour sauver Hu Jia?

Robert Ménard : Absolument. Nous avons déjà commencé au niveau de la France. Maintenant, nous voulons entreprendre une action au niveau européen. Il faut que le Parlement européen se mobilise ainsi que les instances européennes. Elles ont commencé à se mobiliser, cela a créé une vraie émotion, il faut absolument que tout le monde soit mobilisé. Et j’ajouterai qu’il faut lancer une campagne et nous sommes en train d’imaginer un certain nombre d’actions, nous sommes en train d’imaginer une campagne au niveau des internautes. Parce qu’il est, d’une certaine façon, ce symbole par Internet, car il utilisait beaucoup Internet pour s’exprimer, donc j’espère que la communauté des internautes va se mobiliser.

On ne peut pas faire les Jeux olympiques alors qu’il est emprisonné

LGÉ : Est-ce que vous le considérez comme un des otages des Jeux olympiques de Pékin?

Robert Ménard : Je le considère comme l’otage des Jeux olympiques. Il y en a beaucoup d’autres – entre les journalistes, les internautes, les défenseurs de la liberté de la presse – il y a près d’une centaine de personnes emprisonnées qui se battent pour la liberté d’expression en Chine. Mais lui, il me semble qu’il est l’incarnation même de l’arbitraire. Il est aujourd’hui l’otage du Parti communiste chinois. Il est l’otage des Jeux olympiques conçus à la mode chinoise… à la mode du Parti communiste chinois – attention de ne pas tout confondre. On a saisi aussi le Comité international olympique en leur disant que c’est un symbole, la libération de Hu Jia. On ne peut pas faire les Jeux olympiques comme ça alors qu’il est emprisonné. J’espère que le mouvement olympique se mobilisera.

Sourde oreille du CIO

LGÉ : Est-ce qu’il y a un dialogue entre vous et, par exemple, l’ambassade de Chine ou le CIO?

Robert Ménard : Nous n’avons aucun dialogue avec l’ambassade de Chine. La dernière fois que nous avons dialogué avec les autorités chinoises, c’était au début de l’année dernière quand je me suis rendu en Chine parce que les autorités chinoises nous avaient promis un certain nombre de libérations. Ces libérations n’ont jamais eu lieu. J’en ai conclu que nous avions affaire à des gens qui nous mentaient, qui ne tenaient pas leur parole. Je leur ai dit, et nous avons arrêté les discussions. Je suis toujours prêt à rediscuter avec les autorités chinoises sur la base d’engagements. Quand on prend des engagements, on les respecte. Les autorités chinoises avaient pris des engagements avec des libérations précises, des noms précis et avec des dates précises. Ils n’ont pas respecté ces engagements. Je préfère discuter avec des gens en qui j’ai confiance.

Quant au Comité international olympique, ce n’est pas seulement avec nous qu’il ne discute pas. J’ai vu encore, la semaine dernière, Mme Rama Yade, secrétaire d’État aux Affaires étrangères et aux Droits de l’Homme en France. Cela fait des mois qu’elle demande à rencontrer le président du Comité international olympique, et il ne lui a même pas répondu. Elle demande à le rencontrer pour les affaires de Chine des JO. Jacques Rogge n’a même pas répondu. J’ai demandé, la semaine dernière, à Rama Yade de voir M. Sarkozy pour que lui-même demande à rencontrer M. Rogge pour parler du cas de Hu Jia et des autres cas de personnes emprisonnées.