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Entrevue avec l’équipe de Passchendaele

Écrit par Olivier Chartrand, La Grande Époque - Montréal
15.10.2008
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  • Caroline Dhavernas dans une des scènes de Passchendaele. (攝影: Chris Large 403-860-9068 / rALL RIGHT RESERVED c.2007)

Passchendaele est un film au sujet de l’implication canadienne dans la prise de la ville de Passchendaele lors de la Première Guerre mondiale. Le film écrit, produit et réalisé par Paul Gross (Due South) prendra l’affiche le vendredi 17 octobre et mettra en vedette Paul Gross et Caroline Dhavernas (La belle bête).

La Grande Époque (LGÉ) : Quelle était votre motivation première dans ce projet?

Paul Gross (P.G.) : En fait, cela a commencé avec mon grand-père, il était un vétéran et il a combattu dans cette guerre. Comme beaucoup d’hommes, il n’en parlait pas vraiment. Il n’avait que des filles, pas de fils. À cette époque-là, on ne parlait pas aux femmes de sujets déplaisants comme le combat. Mais il m’avait, moi. J’étais son petit-fils. Je le talonnais et l’embêtais tout le temps. Je le harcelais constamment : «As-tu tué des Allemands?»

Alors un jour, soudainement, il a commencé à m’en parler… et la première histoire qu’il m’a racontée est la première scène du film. J’avais environ seize ans à ce moment-là. Vous savez, il y a ces moments dans la vie où il y a un revirement, comme si les plaques tectoniques bougeaient, et on comprend que notre vie ne sera plus exactement la même. C’était vraiment une histoire bouleversante et pas du tout ce à quoi je m’attendais. Mais elle a certainement attisé mon intérêt pour cette guerre. Je me demandais : «Quel genre de personnes [soldats] était-ce? Quel effet ceci [la Grande guerre] a eu sur notre société?»

Pendant des années, j’ai lu sur le sujet, pas comme un fanatique, mais je me procurais des livres. Dans la vingtaine, j’écrivais des pièces, mais je ne savais pas comment j’aurais pu en écrire une sur le sujet sans que ça sonne un peu faux. Finalement, il y a douze ans, j’ai commencé à écrire des scènes. Sans vraiment réfléchir si je pouvais en faire un film, j’ai continué à y travailler pendant des années. Alors, Niv Fichman [le producteur] et moi, nous nous sommes rencontrés et nous avons dit : «OK, essayons de le faire!» C’était il y a sept ans.

LGÉ : Pourquoi une si longue attente?

P.G. : Trouver le financement pour une production de cette envergure au Canada, c’est vraiment difficile. Normalement, les budgets sont tout au plus de 7 à 8 millions de dollars, à moins de faire une coproduction, mais une coproduction aurait déformé l’histoire. Alors, nous avons décidé de faire le film seulement ici. Mais comment trouver un autre 12 millions de dollars à l’intérieur d’un système qui ne soutient pas vraiment cela? J’ai passé des années à dîner avec de très riches personnes pour tenter d’avoir du financement! (rire) Et elles ne donnent pas leur argent facilement! Mais, en fin de compte, on a eu assez d’argent. Je ne recommanderais pas ce projet comme un modèle de financement, il faut être un peu psychotique pour faire cela!

LGÉ : Pour ce film, vous avez tourné dans des conditions extrêmes et intenses sur le plan émotif. Vous assumiez également plusieurs responsabilités. Qu’est-ce qui a été le plus difficile?

P.G. : En vérité, je dois dire que le tournage a été facile en comparaison. Je sais, cela a l’air un peu étrange : c’était physiquement épuisant de faire toutes ces scènes de champ de bataille. Vous savez, mes journées étaient longues, j’étais vraiment fatigué. Mais de façon générale, le tournage a été plutôt facile.

C’était le parcours de la préproduction qui était difficile parce que nous n’avions pas assez d’argent pour faire tout ce qui était dans le scénario. J’ai donc dû changer des choses. À un certain point, deux semaines avant d’arriver devant les caméras, c’était comme si tous nos soutiens financiers s’écroulaient. Nous étions près de la faillite. C’était vraiment difficile.

Mais le tournage, c’était un cadeau. C’était un grand privilège de pouvoir se mettre à la place de ces hommes qui ont combattu pendant cette guerre, de vraiment pouvoir vivre ces circonstances et de ressentir ce que ça pouvait vraiment être. L’équipe était vraiment exceptionnelle, je ne taris pas d’éloges sur eux. Il y avait vraiment un esprit particulier! Je dois sûrement être en train d’oublier certains jours horribles… (rire)

LGÉ : Pensez-vous que l’on fait assez de films historiques sur le Canada?

P.G. : Probablement pas… il y a plusieurs raisons pour cela. Premièrement, il y a toujours le problème du budget. Mais je crois que l’industrie du cinéma au Canada est dominée par l’idée que nous devons envoyer les films à des festivals qui, eux, ne semblent pas porter beaucoup d’intérêt aux thèmes historiques. Je suppose que ça prend quelqu’un qui a un intérêt personnel particulier à raconter une telle histoire. Je pense que c’est vraiment important. Dans toutes les sociétés, nous avons tous la responsabilité de nous en souvenir. Je crois que c’est de courir à notre perte que d’oublier notre histoire. Nous devons la connaître parce qu’elle nous informe sur où nous sommes et qui nous sommes… Il y a plusieurs épisodes de l’histoire canadienne qui n’ont jamais trouvé leur chemin jusqu’au grand écran. J’aimerais en voir plus… les Plaines d’Abraham, par exemple, mais ce serait encore une histoire de guerre… (rire)

 

****

LGÉ : Qu’est-ce qui vous a poussée à accepter ce projet?

Caroline Dhavernas (C.D.) : C’est un scénario qui m’a touchée. Surtout l’histoire d’amour : ce sont deux êtres complètement brisés qui se retrouvent et qui se comprennent, sans jugement sur les actions qu’ils ont pu poser de part et d’autre et qui finissent par se donner de la force pour passer au travers des atrocités de la guerre. L’amour rend parfois plus fort physiquement, c’est un peu quétaine, mais c’est vrai! (rire)

LGÉ : Est-ce que la période historique était un attrait pour vous?

C.D. : C’est sûr que oui, on ne connaît pas beaucoup de choses sur la Première Guerre mondiale et encore moins à quel point la participation des Forces canadiennes a été importante et à quel point les Forces canadiennes étaient redoutées des ennemis. En général, c’est malheureusement une bataille que l’on ne connaît pas du tout. Donc, non seulement on rappelle aux gens cette période de notre histoire, mais… on a beau être pro ou anti-guerre, ce n’est pas tellement important. On rend ici honneur à la vie des hommes et des femmes qui se sont sacrifiés pour cette cause-là.

LGÉ : Quel a été votre plus gros défi lors du tournage?

C.D. : De savoir que c’est inspiré de l’histoire du grand-père de Paul, que c’est un projet de vie pour Paul. Il a commencé à y penser très tôt dans sa vie, cela a pris des années à obtenir du financement. Donc, le plus gros défi, c’était de répondre à ses attentes, ce qu’il a vécu dans sa tête depuis très longtemps.

LGÉ : Est-ce que le fait que Paul était réalisateur en même temps qu’il vous donnait la réplique dans la même scène était difficile?

C.D. : Je n’avais jamais travaillé avec un réalisateur qui allait jouer avec moi aussi, mais ça s’est fait très naturellement. Je lui ai posé la question au début. Puis, il m’a dit : «Écoute, c’est comme quand tu joues avec un acteur : tu le sens quand ça passe, quand ça passe moins, quand il y a quelque chose que l’on a envie de travailler.» Il était là entièrement avec moi quand on jouait ensemble… il n’y a aucun des chapeaux qu’il portait, parce qu’il était aussi producteur, qui en a souffert finalement. Et quand on joue avec un acteur de grand talent comme lui, ça rend le travail deux fois plus facile.

LGÉ : Qui le film peut toucher?

C.D. : Il était temps que l’on fasse un film sur notre histoire, mais je crois qu’à travers le monde, que ce soit une guerre qui a été vécue ici ou ailleurs, le film raconte la vie brisée des gens, ce que la guerre fait intimement dans la vie des gens. Donc, je pense que ça peut toucher tout le monde. 

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