Anglais | Chinois | Coréen | Français | Allemand | Espagnol | Japonais | Russe | Ukrainien | Hébreu | Roumain | Bulgare | Slovaque | Tchèque | Indonésien | Vietnamien
Faites un don

Ordre et lumière au cinéma

Écrit par Alain Penso, Collaboration Spéciale
22.10.2008
| A-/A+

  • poster la frontière de l'aube(攝影: / 大紀元)

 

Le film de Philippe Garrel La frontière de l’aube est une histoire banale d’amour : un photographe fait des photos d’une star. Il prend son métier avec conscience et tente de faire de ses photos des oeuvres d’arts. Il ne voit que les contrastes de ses portraits, et ne s’aperçoit pas tout de suite que son sujet, la jeune star, est en train de tomber amoureuse de lui.

Tous deux vont vivre une idylle profonde, mais le photographe, plus professionnel, va glisser sur cette vague. En ne prenant pas garde à la fragilité de son amour pour lui, de passage, elle va se suicider et reviendra régulièrement hanter son amour lorsqu’il se regardera dans un miroir. Philippe Garrel, dont la spécialité est la forme plus que le fond, fait des références au cinéma muet dont l’imagerie profondément riche permettait de se passer du son. Les films muets possèdent un sixième sens que ne possèdent pas les films sonores, souvent trop bavards, révélant tout avant que l’image n’apparaisse.

Philippe Garrel possède déjà une direction grâce à ses précédents films comme par exemple Les innocents de Bertolucci où il taquinait sa soeur interprétée par Eva Green, la fille de Marlène Jobert, et qui très vite jouera dans le nouveau James Bond. Elle se construit de l’intérieur et joue son rôle de l’extérieur. Elle meurt très vite – dans le film – et réapparaît après sa mort dans le miroir. On peut penser un peu aux expressionnistes allemands à M le Maudit. Le système du miroir propre à Fritz Lang. Laura Smet, en digne fille de sa mère Nathalie Baye, essaye de trouver toute sa fragilité, celle dans Une semaine de vacances de Bertrand Tavernier. Avec ce film, Philippe Garrel renoue avec les contes de l’enfance, ceux qui font peur et qui pourtant existent dans notre humble vie de tous les jours. Une référence à son très beau film, Les baisers de secours.

LE WESTERN A MARQUÉ NOS INCONSCIENTS D’ENFANT

Je constate que le western n’est pas encore mort. Régulièrement, le genre le plus américain reprend du service dans nos consciences enfantines, puisque souvenons- nous des années 60 lorsque les écrans étaient jonchés de western en tous genres. Les indiens, les troupeaux volés, les bandits, les attaques de diligence, les saloons incendiés, la construction du chemin de fer, la ruée vers l’or, tous les thèmes rivalisaient d’intensité pour faire venir le spectateur. Tous les grands acteurs sont bons : James Stewart, John Wayne, Richard Widmark, Gary Cooper. Là l’acteur Richard Harris rêvait de faire un western où il jouerait une sorte de Billy the Kid accompagné d’un adjoint pour rétablir l’ordre dans des contrées pourries par le banditisme.

Il faut signaler que le film est le fruit de l’adaptation du roman de Robert B. Parker paru en 2005 ; le projet solidement écrit avec Robert Knott va pouvoir se réaliser mais Richard Harris cherche ses acteurs. Ils lui viennent assez rapidement à l’esprit : il choisit d’abord Viggo Mortensen, l’acteur de David Cronenberg et Renée Zellweger. Pour le rôle du méchant, il trouve Jeremy Irons. Ed Harris n’a pas l’intention de révolutionner le genre western dont il veut respecter, pour être crédible, les codes. Il ne veut pas prendre le chemin de Clint Eastwood comme dans Impitoyable mais de se rapprocher de Fred Zinnemann et de son Train sifflera trois fois avec Gary Cooper et Grace Kelly.

Les personnages cherchent à vendre leur efficacité, mille fois prouvée pour rétablir l’ordre dans une petite ville inconnue et semble-til inventé Appaloosa, les retournements, le suspens vont détourner le film sur le vrai sujet qui est le couple : comment peut-il s’établir lorsque la mort rode toujours ? Son adjoint, après avoir livré quantité de batailles, va comprendre que son ami a trouvé une femme et qu’après avoir été blessé assez gravement à la jambe, son ambition est de s’établir avec celle qu’il aime. Il doit donc partir car il ne pourrait désormais plus rien pour lui.

L’INTUITION FÉMININE COMME GUIDE

Le film est beau esthétiquement. Quant à son intrigue, elle est prenante du fait des multiples pistes que suit adroitement le metteur en scène Ed Harris. Revoir Frenzy (1972) d’Alfred Hitchcock, et dans une copie neuve, est un plaisir, au cinéma Grand Action. Le film est toujours aussi prenant et efficace. Covent Garden était un haut lieu de la danse ou de l’opéra. C’est devenu un marché où des cageots s’entassent et se vendent au plus offrant. Hithcock a voulu montrer toute la voracité de ce monde où les honnêtes gens se confondent avec les criminels qui prennent du plaisir à inquiéter les habitants.

La police est déroutée par une suite de crimes avec une cravatte. Est-ce de la moquerie ou une provocation pour mettre en échec à la fois la police et l’élégance… ? Richard Blaney (Jon Finch) n’a pas de chance. Il est toujours entouré de gens peu recommandables, dont Robert Rusk, l’assassin dont on sait tout dès le début du film. L’attente est ailleurs, dans l’attitude des victimes de Rusk. Les accusés injustement de ses crimes. L’inspecteur Oxford qui est en charge de l’enquête a la chance inouïe d’avoir une femme (Vivien Merchant) et plus qu’une intuition féminine pour guider son enquêteur de mari, qui au contact de la nourriture de sa femme qui prend des cours de cuisine, perd toute crédibilité dans ses enquêtes. Rusk se sent tellement insoupçonnable qu’il assassine sans cesse.

Et cela amène toujours de l’eau au moulin de la police. Persuadé de sa culpabilité, il est jugé coupable dans un procès, presque confirmé lorsqu’un nouvel assassinat est découvert… En 1972, Frenzy d’Hitchcock sort à Paris. Je le vois, je suis impressionné comme pour tous ses autres films. Je me rends à Londres dans un petit marché pour faire quelques achats et j’y croise Barry Foster (Bob Rusk). J’ai cru qu’il allait me tuer avec sa cravate. Il a souri et m’a confié qu’il ne ferait pas cela devant tout le monde, mais que si je voulais prendre rendez vous avec lui, il serait très discret… Il avait appris cela avec Hitchcock et depuis, il pouvait tuer en toute discrétion et tranquillité!

FAIRE RESSORTIR LE TALENT DES PEINTRES

Séraphine de Martin Provost, de la catégorie des films de peinture, attire tous les spectateurs. Les meilleurs d’entre ces films traitent de l’aspect psychologique qui a amené les peintres à leur personnalité et par conséquent à leur talent propre. Jacques Dutronc dans le film de Pialat jouait Van Gogh, le personnage habillait les couleurs de ses tableaux de ses regards et ainsi le cinéaste obtenait-il des contrastes dignes des peintres qu’il voulait reproduire dans son film. Jacques Rivette avec La belle noiseuse, qui décrit le corps esthétique et pictural d’Emmanuelle Béart, prend le pas sur le savoir-faire du peintre. Son regard prime sur le savoir-faire.

Yolande Moreau, l’interprète de Séraphine, est tout imbibée de son personnage comme le sont ses pinceaux de la peinture qu’elle fabrique elle-même et dont elle garde jalousement le secret. Séraphine est une bonne à tout faire traitée comme un chien. Le soir, elle peint pour revivre et renaître des «cendres du mépris». Ses tableaux évoquent la vie et notre coeur est tiraillé par autant de sensibilité et de ségrégation entre être humains dont les profondeurs passent à la trappe souvent jusqu’à la mort.

L’EXPRESSION TALENTUEUSE DE WOODY ALLEN

Il va de soit que le film doit être vu, sous peine d’extension de l’ignorance d’autrui et évidemment de nous-même. Woody Allen ne peut pas être traité rapidement. Je parlerai de son itinéraire la prochaine fois. Cependant, je peux tout de même être extasié par le renouvellement de l’artiste avec son nouveau film Vicky Cristina Barcelona. Anny Hall (1977) semble très loin. Avec La Rose pourpre du Caire, il avait montré que le sens peut aller avec les personnages. Il fallait être respectueux avec les acteurs qui continuent à jouer sur les bobines.

Tous les genres défilent dans la carrière de Woody Allen. Là deux jeunes femmes américaines partent à Barcelone pour découvrir un autre monde que le leur. L’une Christina (Scarlett Johansson) cherche l’amour, le rencontre, alors que l’autre, Vicky (Rebecca Hall) prépare une thèse sur Barcelone. Ensemble, elles rencontrent un peintre, Juan Antonio (Javier Bardem), séducteur très riche qui les emmène chez lui. Son ex-femme Maria Elena (Penelope Cruz) entre en jeu et tente de se suicider car la passion pour Antonio l’habite toujours. Des couples vont se former. Les amours varient, nous dit Allen selon les humeurs, les saisons, et les circonstances. Mais j’y reviendrai car Woody Allen est un cinéaste fondamental.

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.