Inde: changer les sources de violence sociale en doctrine de paix et d’unité

Écrit par Isabelle Chaigneau, La Grande Époque - Paris
02.11.2008

  • Ekta Parishad et Marie-Françoise Lamperti s’entretiennent sur les futurs projets à mener en commun. (攝影: / 大紀元)

En Inde, le mouvement Ekta Parishad conduit depuis plusieurs années maintenant des campagnes de non-violence qui sont de véritables contre-pouvoir face à cette violence sociale, institutionnelle et physique faite aux plus pauvres.  

 

La Grande Époque a rencontré Rajagopal de passage à Paris. Surnommé le nouveau Ghandi, le leader du mouvement Ekta Parishad a confi é les raisons de son soutien à l’Assemblée Consultative auprès des Congrès des Peuples concernant la revendication qu’un droit des Peuples existe au coeur des Nations unies. Il a par ailleurs avancé un bilan des actions menées avec succès dans son pays.  

 

Pourquoi le mouvement Ekta Parishad soutient-il la revendication de l’Ascop pour un droit d’expression des peuples au cœur des Nations unies?

Parce que nous travaillons dans le même sens. Nous défendons les mêmes valeurs démocratiques. Oui, bien sûr, il faut qu’une assemblée des peuples existe au sein de l’ONU, que la parole du peuple du monde soit prise en compte. Les peuples sont démunis face aux puissants. Ils n’ont pas de tribune pour faire entendre leur voix face aux Etats.   

 

Pourtant l’ONU consulte les acteurs internationaux, prend l’avis des ONG de terrain, les organes satellites tout autour informent de ce qui se passe...

Mais après tout ce travail, l’ONU reste inefficace et paralysée par sa bureaucratie. On constate le mal qu’ils ont déjà à faire appliquer les conventions signées. On assiste même à un détournement de la démocratie car les rapports de force sont tels à l’intérieur de l’institution qu’ils parviennent à faire dévier le processus électoral pour le faire pencher en faveur des puissants. C’est pourquoi cette requête d’un droit d’expression des peuples du monde à la tribune de l’ONU peut rétablir un équilibre et être bénéfique pour tous. Oui, vraiment ce projet de l’Ascop est excellent!   

 

Lors d’un entretien avec La Grande Epoque, Marie-Françoise Lamperti a déclaré que droits de l’Homme et démocratie restaient liés dans leur globalité, qu’il était incontournable de contribuer au développement de la démocratie à l’échelle planétaire. Elle a ajouté que, précisément en Grèce, la démocratie était elle-même participation, qu’elle s’était structurée et développée comme ça. Que pensez-vous de cette analyse?

Oui, ce que dit Marie-Françoise est tout à fait juste. Et c’est ce qu’il faut retrouver ! ce sens réel de la démocratie. Il faut faire renaître cette motivation de la participation des citoyens aux affaires de la cité et former peu à peu à la démocratie directe. En Inde, nous y travaillons tous avec beaucoup d’ardeur. Grâce à la force de rassemblement pacifiste de plusieurs ONG unies, nous avons obtenu des résultats pas seulement au niveau de la restitution des terres à ceux qui en avaient été dépossédés mais bien au-delà de nos espérances.  

 

Par exemple, lorsqu’en Inde nous avons lancé cette grande campagne d’éducation citoyenne auprès du peuple. En effet, l’État dont l’appareil était trop centralisé a commencé à ouvrir vers les différents états fédéraux qui composent le pays en déléguant des pouvoirs... puis... les états fédéraux ont délégué aux petites régions... puis aux communautés... nous avons mis beaucoup de notre énergie et de notre engagement pour que le peuple prenne conscience de sa citoyenneté et nous continuons ce travail. Peu à peu, nous constatons des progrès de part et d’autre. Ainsi, aujourd’hui il existe en Inde ce droit d’opposition garant de la démocratie. Un élu peut être contesté et renversé par les citoyens. C’est tout un changement de mentalité et une autre perception de la démocratie représentative, aujourd’hui en crise d’ailleurs. C’est le citoyen qui délégue son pouvoir à celui qui va le représenter. Celui qui est investi de ce pouvoir ne gouverne pas pour gouverner. Ce n’est pas un simple rapport gouvernant / gouverné: il a des comptes à rendre. Un gouvernement doit être responsable et les citoyens doivent eux aussi se responsabiliser. 

 

Ce sont des résultats obtenus par la lutte non-violente?

Oui nous croyons à la lutte non-violente dans le même esprit et la même vision que le Mahatma Gandhi aboutira au respect mutuel et à l’équité. En octobre 2007, menés par Ekta Parishad, 25.000 indiens ont entamé cette grande marche à travers le pays pour représenter les sans-terres. Des centaines de kilomètres ont été parcourus pour attirer l’attention du gouvernement, des médias et de l’ensemble des citoyens du pays sur la situation des sans-terres et des petits paysans indiens.  

 

Cette mobilisation de masse est manifeste de notre responsabilité en tant que citoyens de ce pays et en tant qu’êtres humains de faire en sorte que les besoins des plus démunis ne soient plus ignorés. Ces campagnes de non-violence sont de véritables contrepouvoir tel que l’a démontré Gandhi. Parmi nos actions de nombreuses revendications ont abouti : des terres, notamment, ont été restituées aux paysans... demain d’autres succès se feront jour, tous à partir de cette doctrine de paix et d’unité prônée par le Mahatma. 

 

Ascop: Assemblée Consultative auprès du Congrès des Peuples qui rassemble 80 ONG à travers le monde. L’Ascop est initiatrice du projet de déclaration commune présenté à l’occasion du 60e anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Cette déclaration réclame un droit d’expression des peuples au coeur de l’institution onusienne.  Pour en savoir plus:  www.recim.org/ascop  

 

Ekta Parishad compte plus de 200.000 adhérents et rassemble environ 11.000 associations. C’est un mouvement engagé dans l’action non-violente selon les principes de Gandhi. L’objectif est d’aider les peuples à regagner le contrôle sur leurs moyens d’existence tels que la terre, l’eau, la forêt.  Pour en savoir plus: www.ektaparishad.com  

 

Marie-Françoise Lamperti est présidente de l’association Agir pour les droits de l’Homme (ADH). L’ADH est membre de l’Assemblée Consultative auprès du Congrès des Peuples (Ascop). Elle est actuellement mandatée par l’Ascop pour le suivi de ce projet.