Une styliste sénégalaise s'inspire de la culture chinoise ancienne
NEW-YORK-Maimouna Ngom (Many) est née au Sénégal, a grandi à Paris et travaille aujourd'hui comme styliste professionnelle au Canada. C'était un exercice inhabituel et original pour elle de concevoir des vêtements traditionnels chinois. Ses créations conviendraient parfaitement aux dames de la cour chinoise ou aux impératrices, ou au film Le Secret des Poignards Volants.
Many a participé au Concours Mondial de la Couture Han qui a eu lieu à New York, capitale de la mode, le 19 octobre dernier. Ce concours vise à remettre au goût du jour la mode somptueuse de l'ancienne Chine - un défi qui a totalement changé la perception que Many avait des styles.
N’étant pas chinoise, son attention pour les détails lui ont valu la mention Honorable dans la catégorie des Vêtements de détente et son vêtement de cérémonie sortait du lot.
«Ils s'habillaient avec élégance et recherche, ils avaient un style vestimentaire riche, tout en soie, un style qui n'existe plus aujourd'hu», dit Many, parée élégamment dans une tenue de soirée de sa création, un mariage de robe africaine avec un tissu aux nombreux motifs asiatiques.
«En tant que, je suis amenée à reproduire beaucoup pour le marché de masse - ce qui n'est ni intéressant pour un styliste de mode, ni stimulant. Aussi lorsque j'ai eu vent de ce concours, je me suis dit, OK, je ne suis pas chinoise certes, mais c'est un défi que je veux relever tant sur le plan créatif que sur tous les autres aspects de la mode.»
À la question sur si elle préfère la mode occidentale ou la mode Han antique, Many tranche sans hésiter.
«Vous savez, d'habitude, je consulte les sites Web de tous les stylistes, mais quand je préparais le concours, je n'y allais plus. J'ai trouvé que l'habillement de la Chine antique étaient tellement somptueux, plein de sens et si complexe. Honnêtement, aujourd'hui ma préfèrence va à à la couture Han, à 100 pour cent.»
Cours intensif de style ancien
Une fois qu'elle a décidé de faire la compétition, elle a dû suivre un cours intensif sur les vêtements de l'ancienne Chine. «Pour commencer, j'ai dû apprendre un minimum sur la culture chinoise. J'avais peu de temps pour soumettre mes croquis, alors les 5000 ans de culture, j'ai dû les traverser rapidement. À la bibliothèque je n'ai étudié que l'ancien et rien d'autre, tout ce qui est ancien, comme ce que montrent les peintures … et tout était là, et c'est là que j'ai trouvé mon inspiration.»
Ce qu'elle a découvert, cependant, allait bien au delà de l'apparence, d'un style, c'était que la culture vestimentaire de la Chine ancienne impliquait beaucoup plus que de l'esthétique. «J'ai lu que leur culture avait été donnée aux Chinois par les dieux, selon leur croyance. Alors je me suis dit que lorsque je concevais mes créations, ça devait être divin.»
«Les modèles étaient très élégants J'ai appris que les vêtements reflétaient les croyances des gens, tout était bien réfléchi, c'était un mélange d'innocence et de beauté que vous ne voyez plus aujourd'hui. Vous ne le trouvez pas dans la mode.»
Tandis que les modèles avancent gracieusement sur la piste, avec aisance et noblesse, vous pouvez voir que le port de ces robes les fait se sentir incroyablement belles et féminines. Mais il émane une force venant de l'intérieur, et cela peut être lié à l'allure spirituelle des vêtements. La croyance bouddhiste et taoiste du maintien de l'harmonie entre le ciel et les humains se reflétait dans chaque aspect de la société, y compris dans les vêtements et les styles.
Chaque partie du vêtement semble symboliser le lien entre l'Homme et le Ciel, de la couture dans le dos, symbole du Tao des humains qui prend la voie du milieu entre le Ciel et la Terre, à la ceinture qui relie le haut à la jupe, créant un seul vêtement. La ceinture représente la nécessité pour l'homme d'être équilibré, d'être droit et impartial.
Le Shen Yi - la robe traditionnelle - est composé de quatre pièces de tissu représentant les quatre saisons et la jupe de douze pièces, qui représentent les douze mois de l'année. Quand une personne porte le vêtement, cela devrait la pousser à suivre les lois du Ciel et de la Terre dans tout ce qu'elle fait et à suivre la voie de la nature, puisqu'elle est en harmonie avec la nature.
Prête à relever le défi
Même si elle est très inspirée par le sens profond des choses, Many n'en oublie pas le design. Équilibrant l'élégance raffinée avec une mise en scène à couper le souffle, ses créations sont uniques.
«Mes tissus de base étaient tous en soie, parce que dans la Chine antique tout se faisait en soie. J'ai utilisé toutes sortes de soie - de la soie imprimée, brodées et de la soie avec des perles et à partir de là, j'ai conçu chacun des vêtements. Ils sont tous très difficiles et complexes. Ils ont différentes sortes de piqures et de coutures très complexes. J'ai entendu dire que les juges prennent cela en compte. J'espère qu'ils les verront dans mon travail», a-t-elle expliqué lors du spectacle précédant l'annonce des résultats.
«Ce qui a été le plus difficile pour moi dans cette compétition était de choisir le bon tissu. Nous avons dû envoyer nos échantillons de tissu et nos croquis en juillet cette année. Je ne savais pas si je réussirais, on ne sait pas la première fois, n'est-ce-pas? En plus, en tant que non chinoise, je n'avais aucun moyen de savoir si j'avais fais du bon travail.»
Pour Many qui aime les défis, l'année prochaine, elle va s'essayer à la haute couture Han pour homme.