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Partir pour se construire

Écrit par Catherine Keller, La Grande Époque - Genève
05.11.2008
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  • hommes ane montagne(攝影: / 大紀元)

Dans une cité banlieue de Genève, Le Lignon, Cherif Messaoudi et Corinne Mettler qui l’a rejoint au cours du projet sont des travailleurs sociaux « hors mur ». Très préoccupés par le devenir d’un groupe d’adolescents sorti du cursus scolaire, ils ont organisé avec eux un voyage dans l’Atlas marocain pour leur permettre de sortir de leur routine  et leur donner envie de vivre autrement. À l’unanimité, tous ont parlé d’un voyage initiatique.

Notre société laisse peu de place au jeunes. Ils doivent se battre pour entrer dans le monde des adultes. Un monde qui peut paraître dur, dans lequel on a peu d’amis mais beaucoup de contraintes et de soucis. Notre société de consommation offre un choix matériel immense et fait

abstraction des valeurs humaines. Elle laisse penser qu’il suffi t de le vouloir pour l’avoir. Dès lors, les jeunes ne comprennent pas qu’il faut travailler, passer des épreuves pour finalement ne même pas pouvoir acheter tout ce qu’ils veulent.

Les raisons de cette démarche   

De ce fait, les adolescents se replient sur ce qu’ils ont de valable, leur groupe.L’esprit de groupe est un point très important pour les adolescents. Ils s’identifient et se construisent par rapport au groupe. Appartenir à un groupe permet de se dépasser, d’aller plus loin. Les liens qui se créent au sein du groupe sont des liens affectifs et sociaux. Ils ont besoin de découvrir les avantages du travail, la satisfaction d’avoir accompli une tâche, d’avoir créé quelque chose, d’avoir enrichi l’autre pour avoir envie de vivre autrement.

Mais les jeunes qui sont en échec scolaire ne savent pas où aller. À Genève, il n’existe pas de structure qui leur permettrait de savoir à quelle porte frapper. Cherif constate « qu’il existe un manque de cohérence dans le système. Il faudrait une structure qui réunisse tous les organismes

qui permet aux jeunes de savoir où aller pour trouver leur voie professionnelle.Il y a de plus en plus de jeunes qui sont en rupture. » Coincés dans cette spirale, les adolescents n’ont pas vraiment de motivation. Pour qu’ils relèvent le défi , le but doit être attractif et malgré tout, tous n’arriveront pas jusqu’au bout. Mais pour ceux qui ont réussi, la satisfaction d’avoir été jusqu’au bout, d’avoir découvert des choses qu’ils n’imaginaient même pas, leur a donné envie de vivre autrement.

Le but du voyage

Le but premier est leur réinsertion dans la vie active. Le fait de préparer leur voyage, de devoir se dépasser au cours du trekking et de revenir chez eux enrichis de toute cette expérience leur permet de remettre le pied à l’étrier. À travers tout ce processus, le jeune se trouve confronté

à ses limites qu’il doit dépasser. Il se retrouve seul à devoir prendre ses responsabilités.

Cela lui permet de découvrir des capacités et des qualités qu’il n’imaginait pas en lui. Nadège explique à une jeune Marocaine : « Tu dois continuer l’école pour pouvoir faire ce que tu veux plus tard. Comme ça, personne ne pourra t’obliger à faire ce que tu ne veux pas faire sous prétexte que tu n’as pas d’autre choix ». En rentrant à Genève, elle a repris le chemin

de l’école.

Pour Corinne, un des objectifs est de les aider à s’intégrer dans la communauté suisse. « On avait envie de les confronter à une culture tierce pour qu’ils s’approprient la culture suisse. Une fois sur place, ils étaient obligés de dire qu’ils venaient de Suisse, même si leur origine est albanaise. En voyant les conditions de vie au Maroc, les jeunes se sont rendus compte de la chance qu’ils avaient de vivre dans un pays riche. Les échanges qu’ils ont eus les ont valorisés dans leur identité suisse »

Un film a été réalisé par Justin Macmahonet Liliana Dias. Il décrit toute cette histoire pour rendre compte du parcours de ces jeunes à travers cette aventure. Cela leur permettra de revivre depuis l’extérieur leur périple et de donner des idées à d’autres personnes.

Plusieurs jeunes sont venus pour être avec les copains mais une fois sur place les choses changent. Halim et Elvis racontent : « Par exemple, là-bas ils n’ont pas de terrain de foot. Ça nous a permis d’apprécier celui que l’on a ici. De retour, on a fait des petits boulots mais c’est dur de trouver du travail. On a passé tous les deux notre permis de conduire ».

La préparation

C’est l’occasion pour Cherif de créer une passerelle entre ces jeunes complètement déstructurés et des organismes comme l’Arcade qui peuvent les réinsérer dans le cursus étude-travail mais qui est très structuré. Ces jeunes ont certes besoin d’être encadrés mais le fait que

notre société les classe dans une mauvaise catégorie parce qu’ils n’arrivent pas à l’heure etc. ne fait que renforcer le fossé qui les empêche de revenir à une vie plus satisfaisante.

Encadrés par l’Arcade et les animateurs, les jeunes ont travaillé de manière professionnelle sur des chantiers de peinture et de tri pour payer une partie du voyage. Cherif et Corinne ont frappé à de nombreuses portes pour être sponsorisés. L’hospice général, le Service d’Action

Sociale de Solidarité de la commune de Vernier, le Service de la Jeunesse et de l’Emploi, la maison de quartier d’Aïre et bien sûr les parents.

Le voyage

Se retrouver dans le désert, sans téléphone, sans ordinateur, aller au puits pour se laver, se coucher avec le soleil sous une tente, marcher sur un terrain escarpé pendant des heures, c’est le retour à une vie sans artifi ce où l’humain prend toute sa place, où l’introspection se fait naturellement.

Chacun a dû surmonter ses peurs. Une jeune fi lle a dû vaincre son vertige pour passer un sentier dans la montagne, elle en tremblait encore une heure après, mais elle l’a fait. Une attaque nocturne de plusieurs grosses araignées a mis le campement sens dessus dessous, de ceux qui étaient terrorisés à ceux qui prenaient sur eux et protégeaient les autres, cela a été un vrai test. Chaque jour avait son lot de surprise qu’il fallait affronter.

  • jeunes(攝影: / 大紀元)

Le retour

On a créé des liens avec les parents. Beaucoup de parents sont conscients du problème mais ne savent pas quoi faire. Ils sont contents d’avoir ce lien. Certains ont eu des difficultés à comprendre pourquoi leur enfant partirait en vacances alors qu’il était oisif. De retour, sept parmi les neuf familles ont remarqué un net changement chez leur enfant. Ils les ont vu motivés, se lever tôt pour partir travailler, ils en sont enchantés. Il s’agit toutefois de trouver un travail après cela pour ne pas être confronté au chômage.

Corinne était plus proche des filles, elle se rend compte que « les filles ont besoin de se structurer avant de pouvoir intégrer le monde du travail contrairement aux garçons qui s’épanouissent au travail ». Ce voyage a été bouleversant et les filles ont de la peine à faire face aux traumatismes qu’elles ont vécus dans leur enfance. Elles ont assurément besoin d’une aide

plus profonde et d’affection, de respect pour devenir des femmes épanouies.

Le résultat

Cette aventure leur a donné beaucoup d’espoir. La majorité s’est rendue compte qu’il est possible de vivre autrement. Cette ouverture a donné envie à plusieurs de changer leur vie. Ils ne savaient pas qu’ils avaient des qualités, des compétences.

Grâce à ce voyage et à l’équipe qui les a encadrés et motivés, ils ont pris confiance en eux et bien qu’encore très fragiles, la majorité a montré concrètement le souhait de changer. Les jeunes ont commencé à changer  sur place. Besnik explique : « Au début c’était très difficile, je n’avais qu’une envie : rentrer. Puis peu à peu j’ai réfléchi, je me suis habitué, j’ai appris de nouvelles choses. Ça m’a aidé à avancer, j’ai repris les études».

Sur neuf jeunes, un est en apprentissage, deux ont repris la classe, trois ont accepté des emplois temporaires, deux autres ont passé leur permis de conduire et le dernier a acheté une voiture avec l’argent qu’il avait gagné. Seuls trois jeunes n’ont rien entrepris mais cela ne signifie pas que l’expérience ne leur a pas été profitable. Récemment, une fille s’est mise en recherche d’emploi.

Statistiquement,cela signifie que trois adolescents ont retrouvé le cursus des études, quatre cherchent à se réinsérer professionnellement malgré la conjoncture actuelle et deux restent en attente. Le bilan est positif à 77 %. Cependant, le manque de budget risque de représenter un handicap pour renouveler cette expérience.

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.