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Chine : chemin tortueux vers les Jeux

Écrit par Noé Chartier, La Grande Époque – Montréal
20.02.2008
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  • Montage d’affiches de différentes organisations dénonçant la tenue des Jeux olympiques en Chine.(Staff: PETER PARKS / 2008 AFP)

Certains médias le répètent régulièrement et à grands coups de publicité : la Chine change, évolue, se modernise. Les gens y sont maintenant tous souriants, ils rêvent comme nous et sont surtout tous très satisfaits de leur gouvernement. D’ordinaire très coriaces et rigoureuses en information de fond, les pages de journaux ou les émissions de télévision dédiées à la Chine se transforment en opération de relations publiques visant à séduire plutôt qu’à informer, à divertir plutôt qu’à inciter à la réflexion.

Quelquefois, on croirait avoir droit à une publication officielle du gouvernement chinois, comme le Quotidien du peuple ou Xinhua. En fait, plusieurs médias occidentaux ont recours à ces sources lorsqu’il s’agit d’informations sortant de Chine. Mais Xinhua est qualifiée de «plus grande agence de propagande au monde» par Reporters sans frontières.

Les relations économiques des grands groupes financiers avec la Chine – eux qui possèdent souvent des entreprises d’information – sont aussi un facteur à ne pas écarter dans leur traitement de la nouvelle.

Les compagnies publiques d’information n’échappent pas non plus à cette tendance, alors qu’elles jouent de gros contrats comme les droits de diffusion des Jeux olympiques ou la possibilité même de pouvoir tenir un bureau sur place.

Lors de la controverse entourant la diffusion par la CBC d’un documentaire sur la persécution envers le Falun Gong, une série d’événements avaient été filtrés, démontrant le bras long de Pékin. Le documentaire avait d’abord été retiré des ondes quelques heures avant sa diffusion, sous prétexte que la situation au Pakistan était plus importante. Mais le documentaire sur le Pakistan était une rediffusion. Plus tard, la CBC admettait avoir été contactée par des représentants du consulat chinois.

Suite à la controverse suscitée par le retrait, la CBC avait annoncé une diffusion ultérieure, mais non sans altérer le contenu du documentaire, accordant, entre autres, plus de temps à la version des faits du régime chinois.

CBC avait également admis que son bureau en Chine avait été visité par des fonctionnaires de Pékin, concernant la diffusion du documentaire en question.

Ajoutez à ces aspects un positionnement politique voyant d’un bon œil la montée de la Chine sur l’échiquier mondial, en contrepoids à l’hégémonie américaine, et vous obtenez une liste d’ingrédients nuisant à une information de qualité sur l’empire du milieu.

Si nous comparons notre situation médiatique à celle des Chinois, nous sommes chanceux. Il existe certaines sources honnêtes pouvant nous informer adéquatement. Quant à eux, toute information provenant de l’étranger est préalablement filtrée par l’agence Xinhua, puis la censure interne est stricte. Quant à Internet, vanté comme outil démocratique ici, c’est un outil de surveillance et de répression en Chine.

Cette semaine, notre couverture est consacrée à la préparation des Jeux olympiques et à leur opposition. D’ici au mois d’août, le gouvernement chinois sera sur un chemin tortueux, car de plus en plus de caméras seront tournées sur ses agissements. Le régime tentera, par plusieurs moyens, de gagner la guerre médiatique l’opposant à ses détracteurs, en diffusant des messages incitant à «séparer sport et politique». Il percevra tout traitement négatif de son entreprise olympique comme une attaque directe à sa légitimité.

Finalement, il ne pourra éviter qu’un combat soit livré entre les rêves de médailles des athlètes et les rêves de justice des Chinois et des défenseurs de la dignité humaine.

Les médias auront le grand rôle de choisir vers qui tourner le micro : vers le nageur qui s’entraîne 40 heures par semaine pour monter sur le podium, ou le Chinois torturé pendant 40 jours parce qu’il a crié qu’il voulait «les droits de l’Homme, pas les Jeux olympiques».

«Ce sont les Jeux olympiques, pas une tribune pour tous les opprimés», diront certains. Mais un pays de 1,3 milliard d’habitants, c’est plus que deux semaines de courses et de sauts, d’or et de cashflow.

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.