Nombre alarmant de journalistes tués en 2007

Écrit par Gary Feuerberg, La Grande Époque - Washington
26.02.2008
  • He Qinglian, une économiste et journaliste chinoise(攝影: / 大紀元)

WASHINGTON, D.C. – Époque risquée pour les journalistes ces temps-ci, parfois même en Europe et aux États-Unis. L’année dernière fut particulièrement grave pour ces travailleurs de l’information, plusieurs ayant été tués en accomplissant leurs fonctions. L’année 2007 a d’ailleur été pour eux la plus meurtrière depuis 1994, selon Reporters sans frontières (RSF).

«En 2007, les journalistes ont été plus que jamais victimes de violence (86 tués) et de répression (au moins deux journalistes arrêtés chaque jour)», fait remarquer Robert Ménard, secrétaire général de RSF. Un grand nombre de journalistes ont été emprisonnés l’année dernière et plusieurs ont été condamnés à mort.

Le 13 février dernier, au National Press Club de Washington, D.C., Reporters sans frontières a divulgué son rapport annuel 2008 sur l’état de la liberté de presse dans le monde. Durant la conférence de presse, quelques journalistes ont décrit la situation dans leurs pays respectifs : Érythrée, Irak, Chine et États-Unis.

En Russie, le président Vladimir Poutine balaye de la main les critiques des gouvernements occidentaux, connaissant leur dépendance au gaz et au pétrole de son pays. À l’interne, les critiques sont muselés d’une manière ou d’une autre. Poutine est donc en contrôle total à l’approche de l’élection présidentielle du mois de mars. «Chaque année, des journalistes russes sont tués et les agressions sont nombreuses», indique le rapport.

À part les pays baltes et l’Ukraine, l’intolérance de la Russie pour la presse libre s’étend aux autres pays de l’ex-URSS. Par exemple, le président de l’Azerbaïdjan, Ilham Aliev, assurera sa réélection en utilisant la violence contre les journalistes.

En Iran, le président Mahmoud Ahmadinejad s’active pour contrôler les médias avant les élections parlementaires de la mi-mars. «Les journalistes qui ne sont pas en prison sont convoqués par des juges qui leur rappellent qu’ils sont en liberté sous caution ou en sursis», souligne le rapport. «Les sites Internet les plus libres et les plus critiques ferment les uns après les autres, victimes de la censure officielle.»

L’introduction du rapport de RSF indique des problèmes à prévoir au courant de l’année, anticipant des attaques contre des journalistes durant des élections en Russie (2 mars), en Iran (14 mars) et au Zimbabwe (29 mars).

Pakistan : six journalistes tués en 2007, 250 incarcérés

Le Pakistan est l’exemple typique d’un gouvernement en guerre contre les journalistes. Après la destitution illégale en mars 2007 du juge en chef de la Cour suprême, Iftikhar Chaudhry, par le dirigeant Pervez Musharraf, la répression et la censure des médias ont balayé le pays, et «les journalistes ont été souvent passés à tabac par les forces de l’ordre», explique le rapport. À la fin du mois de mai, le gouvernement a banni les transmissions de nouvelles en direct. Les compagnies de câblodistribution ont retiré des ondes deux chaînes privées et RSF a confirmé avec les compagnies qu’il s’agissait d’un ordre du gouvernement.

La crise s’est aggravée le 3 novembre 2007 lorsque Musharraf a déclaré l’état d’urgence et ordonné l’arrêt de diffusion de toutes les chaînes de radio et de télévision indépendantes. Après cette date, seuls les organes du pouvoir ont continué à diffuser. «Dans la capitale, les communications téléphoniques mobiles ont également subi de nombreuses interférences», note le rapport.

La censure de la télévision et de la radio a naturellement stimulé un fort désir d’information chez les Pakistanais. «Les ventes de journaux, notamment des suppléments consacrés à l’état d’urgence, ont explosé», rapporte RSF. Quant au

15 % de Pakistanais ayant accès à Internet, ils sont allés en ligne massivement, les sites web populaires des chaînes de télévision enregistrant plus d’un million de visites par jour.

Ce qui est décrit plus haut ne mentionne même pas la sévère brutalité policière envers les journalistes. Des policiers brandissant des matraques à Islamabad ont blessé au moins 30 journalistes le 29 septembre, afin de les empêcher de couvrir une manifestation d’avocats opposés à Musharraf. «Le 5 novembre, au moins cinq photographes et cameramen ont été arrêtés par la police devant le Karachi Press Club, alors qu’ils couvraient une manifestation de militants des droits de l’Homme», ajoute aussi le rapport.

En dépit des garanties pour une totale liberté de presse en 2001 – lorsque la Chine luttait pour obtenir les Jeux de 2008 – et des nouvelles règles accordant aux journalistes étrangers une plus grande liberté de mouvement depuis janvier 2007, les promesses ne sont pas tenues. En fait, il y a encore plus de répression tandis que les autorités tentent de contrôler les médias concernant la couverture des Olympiques et du 17e Congrès du Parti communiste tenu en octobre 2007.

Le plus célèbre des «prisonniers des Olympiques» est le militant des droits de l’Homme Hu Jia qui, avec son épouse Zeng Jinyan et sa petite fille née récemment, a passé sept mois de la dernière année en résidence surveillée. À la fin du mois de décembre 2007, Hu Jia a été arrêté et formellement accusé «d’inciter à la subversion du pouvoir de l’État». Lui et sa conjointe publiaient des informations délicates sur leurs blogues.

La Chine emprisonne le plus grand nombre de journalistes, de cyberdissidents et d’internautes pour l’expression de leurs opinions. Les conditions de détention sont souvent très pénibles pour avoir commis de tels «crimes». Ils peuvent partager des cellules surpeuplées avec de vrais criminels, être obligés de trimer dans des camps de travaux forcés et les gardes incitent les autres détenus à les passer à tabac. «Au 1er janvier 2008, au moins 33 journalistes étaient emprisonnés en Chine», souligne le rapport de l’organisation de défense de la liberté de presse.

La censure est un mode de vie pour les journalistes en Chine. RSF rapporte qu’«en novembre, le Département de la propagande a ordonné aux responsables des principaux médias chinois d’éviter les reportages négatifs sur la pollution de l’air, les relations avec Taiwan au sujet de la torche olympique et les problèmes sanitaires, dans le cadre de la préparation des Jeux olympiques».

Les médias risquent aussi de perdre leur permis s’ils couvrent des événements sans autorisation. En pratique, ils doivent seulement publier les reportages officiels sur les incidents, les épidémies et les désastres naturels. Ils ne peuvent pas non plus mener leurs propres enquêtes.

Le rapport de RSF parle aussi de la «couardise de certains États occidentaux». Peut-être qu’ils n’hésitent pas à condamner des pays en développement qui ont une faible valeur stratégique, mais lorsqu’il s’agit de confronter les dirigeants Vladimir Poutine et Hu Jintao, respectivement de la Russie et de la Chine, ils ont peur. «Le commerce avec la Chine et la Russie est tellement important que les droits de l’Homme sont rarement discutés», affirme Robert Ménard.

«Qui ose encore parler du Dalaï-lama ou de vanter la démocratie taiwanaise dans la face de Hu [Jintao]?» Seulement la chancelière allemande Angela Merkel, estime M. Ménard. «Qui peut tolérer le regard glacial du président Poutine dans une discussion sur les droits en Tchétchénie ou au sujet de la tonne de journalistes assassinés depuis son arrivée au pouvoir?»

M. Ménard a fait l’éloge de Merkel qui a été sévèrement critiquée par le secteur des affaires lorsqu’elle a reçu le Dalaï-lama en septembre dernier. La chancelière allemande a courageusement déploré ce qu’elle appelle la «diplomatie du fric».