Paroles lumineuses dans ruelles sombres

Écrit par Mélanie Thibault, La Grande Époque - Montréal
05.02.2008

 

  • Jean-Marc Massie(攝影: / 大紀元)

Ce «one man show» rend un hommage à la métropole avec énergie et audace. Alliant plusieurs époques de la ville dans une traversée surréaliste, c’est avec chair et grandeur du geste que Jean-Marc Massie nous dévoile Montréal: «Je décape Montréal à travers ses habitants, je fréquente les ruelles mal éclairées, sauf que, moi, j’ai ma lampe de poche.»  

Nous assistions à sa prestation en octobre dernier, lors de la grande nuit du conte au Gésù avec plusieurs autres conteurs pour le spectacle d’ouverture du Festival interculturel du conte du Québec. Une ambiance particulièrement enthousiaste ponctuait le conte De Capitao que livrait Jean-Marc Massie. Certains inconditionnels ont l’habitude de le retrouver au bar le Sergent Recruteur lors des dimanches du conte, rendez-vous du conte qui déjà fête ses dix années de loyaux services. Aussi directeur littéraire de la collection Paroles des Éditions Planète Rebelle, Jean-Marc Massie contribue largement à développer le renouveau du conte.

Cette fois, il se présente, comme un seul homme, à La Balustrade, salle du Monument-National. Il a toutefois plusieurs personnages en poche, prêts à jaillir d’un moment à l’autre dans le récit. Le rythme de sa narration fluctue selon les différentes nuances vocales empruntées à des âmes tout aussi étranges et colorées que les rues noires des nuits montréalaises. Défendant chaque mode de vie urbain avec fougue, Massie tonifie avec intelligence les contrastes propres au climat rigoureux de la ville aux cent clochers.

Plus qu’un alignement d’actions, les contes de Massie portent le spectateur vers des réflexions profondes. Par exemple, nos origines sortent de leur carcan traditionnel un peu réactionnaire pour faire place à une vision multiple et hétéroclite de nos sources. Bien que le conteur souligne avoir son doctorat en science politique de la Sorbonne «rangé à côté des pages jaunes», n’en demeure pas moins une dimension philosophique en écho au sens de chacun des contes.

Ce qui captive dans ce «one man show», ce sont les glissements inopinés entre différents niveaux de réalité, lesquels transmettent la folie du conteur et font appel aux différents sens.

Le seul bémol réside dans la représentation visuelle du spectacle. Avec une telle vigueur corporelle et une énergie prête à exploser, une salle plus grande, ou du moins un soin apporté au lieu scénique, ainsi qu’un support sonore plus significatif seraient nécessaires pour appuyer ce que livre ce grand manitou de la parole. Néanmoins, ses récits ensorcelants valent à eux seuls que l’on s’y précipite.