Dr Seuss à la québécoise

Écrit par Olivier Chartrand, La Grande Époque - Montréal
18.03.2008

 

  • Horton l’éléphant(攝影: Photo credit: Blue Sky Studios / Dr. Seuss' Horton Hears

N’en déplaise à Mario Dumont, j’étais entré dans la salle de cinéma un peu à reculons en sachant que Guillaume Lemay-Thivierge et Joël Legendre prêtaient leur voix au dernier film inspiré des classiques de bande dessinée de Dr Seuss. Pas que j’aurais préféré un Vincent Cassel dans le rôle de l’éléphant et d’un Thierry L’hermitte, dans celui du maire, mais je trouvais la marche tout de même un peu haute à atteindre pour les deux comédiens de talent qui devaient marcher dans les souliers de deux monstres de l’humour américain… En effet, de l’autre côté de notre frontière australe, c’est Jim Carrey et Steve Carell qui incarnent respectivement les personnages de l’éléphant et du maire de Quiville dans Horton entend un Qui!

Eh bien… je me suis bien bidonné! L’énergie de Guillaume Lemay-Thivierge, l’expérience de Joël Legendre en doublage et le talent des deux acteurs m’ont fait avaler la pilule de ne pas entendre l’interprétation de celui qui a porté la peluche verte du Grincheux.

Il faut dire que l’univers éclaté et l’humour burlesque de Dr Seuss, portés au grand écran avec brio par la fine plume numérique d’une équipe d’artistes épatants, est probablement plus facilement traduisible qu’un Shrek, par exemple, où les références culturelles, les jeux de mots et les différents niveaux de langage rendent la tâche plus complexe.

Horton entend un Qui! est un film qui plaira définitivement à toute la famille, bien que plusieurs gags passant à un rythme effréné et pouvant être compris à divers degrés ne pourront être captés par de jeunes yeux un peu dépassés par l’explosion de couleurs et la grande qualité des images.

C’est presque un cliché, à chaque fois qu’un film d’animation 3D sort en salle, de dire qu’il repousse les limites de la précision dans ce domaine, mais c’est encore le cas dans ce dernier film réalisé par les Studios Blue Sky (L’ère de glace, L’ère de glace 2 : La fonte, Robots). C’est d’ailleurs une belle réussite pour ce premier long métrage d’animation 3D tiré des livres de l’auteur à succès qui a marqué plus d’une génération d’enfants du côté anglophone. Car, contrairement au Charlie Brown de Charles M. Schulz, les personnages de Dr Seuss n’ont  jamais réellement traversé la barrière de la langue avant les deux premiers films inspirés de ses œuvres. Ceux-ci mettaient en vedette respectivement Jim Carrey (Le Grincheux qui voulait gâcher Noël) et Michael Myers (Le chat dans le chapeau), mais n’étaient pas des films d’animation.

Américain d’origine allemande, Theodor Seuss Geisel (1904-1991), alias Dr Seuss, était un auteur pour enfant qui avait le don de transmettre des valeurs et des concepts, qui pouvaient sembler a priori complexes, à un auditoire composé d’enfants. Aussi, dans Horton entend un Qui! plusieurs valeurs sont présentées dont : le respect de ses promesses, le respect de la différence («une personne reste une personne quelle que soit sa taille», répète Horton), le concept de micro-univers et de vies plus grandes ayant un impact sur des univers plus petits, le fait que ce qui est impalpable n’est pas nécessairement inexistant, le fait que l’autorité puisse aussi se tromper parfois, etc. Contrairement, aux valeurs simplistes et rose bonbon des studios Disney qui sont trop souvent tellement mastiquées qu’elles deviennent insipides, Horton entend un Qui! véhicule des idées intéressantes dont on ne devrait pas éviter de nourrir les enfants.