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Quel avenir pour la biodiversité de nos jardins

Écrit par Catherine Keller La Grande Époque - Genève
02.03.2008
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  • tomates(攝影: / 大紀元)

Dès les débuts de l’agriculture, l’homme a récolté ses graines pour les semer l’année suivante. À chaque fois, il a prélevé la semence des plants les plus robustes et les plus productifs pour augmenter sans cesse la qualité de sa culture. Au XVIIIe siècle, l’homme a commencé à croiser des variétés  pour produire des hybrides*, offrants une qualité et une maturation uniformes. À la fin du XXe siècle, il a créé les organismes génétiquement modifiés (OGM). Depuis, les grands semenciers jouent de leur puissance et de leur influence pour réglementer le domaine.

 

 Les premières traces de l’agriculture remontent à 10.000 ans environ. Au fil des siècles, elle a passé du stade assurant la survie de la communauté à l’état actuel où le vivant est une matière première commerciale. Durant des millénaires, il n’y a pas eu de grand changement et l’homme était tributaire du temps et des parasites. Une sélection continue a permis de trouver des variétés résistantes aux conditions climatiques locales et à certains parasites.

Au début du XVIIIe siècle, Thomas Fairchild a créé la première plante hybride* d’Europe. La méthode s’est développée durant les siècles suivants. En 1930, le Congrès des États-Unis adopte la première loi sur les brevets d’obtention végétale, ce qui a permis de breveter le vivant. En 1982, la première plante transgénique est mise au point et sa production à grande échelle sera autorisée quatre ans plus tard par l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis (EPA).

 

Les grands semenciers cherchent à maitriser toute la production grainière

Sous couvert de protection du consommateur, une loi européenne a été mise en place pour réguler la production de graines. Pour être admis dans le catalogue officiel, l’homologation des variétés doit prouver qu’elles sont homogènes et stables, ce qui est le cas des variétés hybrides.  Cette homologation a un prix élevé. En Europe, pour des variétés anciennes, le timbre ne coûte que 247 euros, mais les frais du protocole** représentent entre 1.000 et 2.000 euros. Il est certain que les associations préservant la biodiversité n’ont pas les moyens d’engager ces démarches. De plus, beaucoup d’anciennes variétés ne peuvent assurer la qualité exigée.

De même que notre descendance ne peut être stable et homogène, ces plantes ne peuvent produire des graines génétiques identiques. Leur production est plus aléatoire tant par leur germination, leur taille et leur temps de maturation mais elles offrent une rusticité et une adaptabilité que les hybrides ne peuvent égaler. En effet, ces derniers sont beaucoup plus sensibles aux variations météorologiques et ont besoin de produits phytosanitaires pour être productifs.

Or, ces produits chimiques sont incompatibles avec le cahier des charges de l’agriculture biologique ou biodynamique. La commercialisation des semences coûte beaucoup trop cher et endette irrémédiablement les paysans des pays pauvres. C’est la raison pour laquelle des producteurs se regroupent pour sélectionner des variétés anciennes mieux adaptées à leur mode de culture.

Si cette loi « 98 95 CE » interdit de vendre ou même d’échanger des graines ne faisant pas partie du catalogue officiel, elle n’est pas appliquée de la même manière dans les différents pays de la communauté européenne. La commission européenne ainsi que l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) ont aussi le souci de préserver la biodiversité. Dès 1998, l’union européenne reconnaît le problème et accepte d’adapter le catalogue pour préserver ces variétés en voie de disparition. Les grands semenciers bloquent cette démarche qui reste encore au stade des négociations.

La France est leader mondial de production de semences potagères. C’est la raison pour laquelle cette loi est appliquée si sévèrement dans ce pays. En Italie, Espagne, Autriche, Allemagne et dans bien d’autres pays, la tolérance est de mise car les gouvernements sont sensibles à la protection de la biodiversité. Dans ce contexte, l’association française Kokopelli qui vend une très grande diversité de variétés a été jugée et a perdu son procès en appel. Elle doit payer 12.000 euros au semencier Baumaux et 23.000 euros à l’État et à la fédération des industriels de la semence.

Le ministère de l’Ecologie a fait de belles promesses. Raoul Jaquin, porte-parole de l’association, souhaite les voir appliquées. Or, il se trouve face à un répondeur téléphonique et a l’impression de se heurter à un mur. Quand on lui demande pourquoi l’association ne quitte pas le territoire français, il répond : « C’est exactement ce qu’il ne faut pas faire. Si nous baissons les bras, nous laissons la voie libre aux semenciers industriels, ce serait une grande perte pour la biodiversité. » Heureusement, Kokopelli reçoit un soutien international qui lui permet de continuer la lutte du pot de terre contre le pot de fer.

Tout le réseau de l’agriculture biologique français est confronté à cette loi. Le réseau Semences paysannes regroupe une quarantaine d’associations. Hélène Zaharia explique que « les producteurs agriculteurs sont majoritaires. Ils sélectionnent leurs propres graines mais cette loi entrave leurs échanges ». Or sans échange, il est difficile d’améliorer le rendement ou d’éviter leur dégénérescence. « Une minorité de ces associations vendent des graines. Ils sont dans l’impossibilité légale de vendre des graines non homologuées ». Cela limite considérablement la préservation de ces variétés.

 

Au Canada

Aucune loi n’empêche la vente de graines anciennes. Pourtant, Monsanto et d’autres semenciers travaillent auprès du Gouvernement pour réglementer le marché. Les producteurs alternatifs comme Les Jardins du Grand-Portage se sont regroupés en créant le syndicat Union Paysanne. Si une loi devait voir le jour, il n’y a pas de doute que l’Union paysanne s’inviterait à la table des négociations.

 

En Suisse

Ne faisant pas partie de la communauté européenne, aucune homologation n’est nécessaire pour vendre des graines anciennes. L’association ProSpecieRara recherche d’anciennes variétés, gère leur multiplication, produit une description détaillée de chaque variété et collabore avec des semenciers pour commercialiser les plantes susceptibles de satisfaire les consommateurs. Denise Gauthier, porte parole de ProSpecieRara explique : « Nous envoyons des graines à nos adhérents qui les sèment et nous renvoient leur production de semence après récolte. L’association collabore également avec Sativa Rheinau et Coop pour commercialiser environ 150 variétés. Elles ont le label ProSpecieRara et, celui de l’entreprise. Coop, grand supermarché, vend également des légumes ProSpecieRara dans son assortiment de fruits et légumes. »

*Les variétés hybrides ne sont pas des OGM. Les plantes sont fécondées artificiellement pour produire des plants de qualité uniforme et performante. Elles perdent de leur saveur et leur rusticité. De plus, les graines de ces hybrides sont stériles. Le producteur est obligé d’acheter sa semence.

 

**Le protocole d’homologation demande à ce que les plantes soient cultivées sur deux à trois ans pour vérifier leurs qualités.

 

Au Québec, les Jardins du Grand-Portages 

En France : Semences Paysannes.et Kokopelli

En Suisse ProSpecieRara et sativa-rheinau

UICN : countdown2010.net

 

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