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La pauvreté pousse les jeunes à rejoindre les rangs des Talibans

Écrit par Irin News
08.03.2008
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LASHKARGAH – Pour un téléphone portable, offert par deux sympathisants des Talibans, Abdoul Malik, dix-sept ans, a rejoint les rangs des insurgés talibans, dans le sud du pays. Peu de temps après, sa dépouille était ramenée à sa famille.

«Il a été tué au cours d’une opération militaire, près du district de Moussa Qala [dans la province de Helmand]», a confié à IRIN son frère aîné, à Lashkargah, capitale de la province de Helmand.

«Bon nombre de jeunes garçons de notre district acceptent de rejoindre les rangs des Talibans contre de l’argent de poche, un téléphone portable ou pour d’autres motivations financières», a expliqué Safiullah, un habitant de Sangin, un district de la province de Helmand.

Cette province a été le théâtre de très nombreux actes de violence, commis par les insurgés et, ces derniers mois, des centaines de personnes sont mortes, victimes d’attentats suicide, d’explosion d’engins piégés – placés le long des routes – et d’opérations militaires.

Les taux élevés de pauvreté et de chômage en milieu rural expliquent probablement pourquoi des jeunes gens comme Abdoul Malik vont rejoindre les rangs des Talibans.

Compte tenu de l’insécurité qui prévaut dans les provinces du Sud, il n’existe pas de statistiques sur le chômage. Toutefois, d’après un rapport de la Commission indépendante des droits de l’Homme en Afghanistan sur les droits économiques et sociaux des Afghans, le taux de chômage atteindrait jusqu’à 60 % dans certaines régions du pays.

Le nombre élevé de pauvres dans les régions rurales s’explique également par le fait que l’agriculture –qui emploie plus de 60 % des quelque 26,6 millions d’habitants que compte le pays – n’a bénéficié que de 300 à 400 millions de dollars américains sur les 15 milliards et plus d’aide au développement versés par la communauté internationale à l’Afghanistan depuis 2002, selon un rapport d’Oxfam International, publié au mois de janvier 2008.

Rapport du Senlis Council

«Le gouvernement [afghan] n’a pas les moyens de subvenir aux besoins de ses citoyens et, pour une bonne partie de la population, il n’est pas en mesure de créer des opportunités d’emploi durable. En conséquence, le Sud est une zone de recrutement de plus en plus importante pour les Talibans», a indiqué le Senlis Council, un centre international d’études politiques, implanté à Londres, dans un rapport publié en février 2008.

«Partout où le gouvernement n’est pas en mesure d’assurer des services de base, les Talibans pallient souvent les insuffisances de l’État avec des solutions plus radicales. Cela signifie que ce sont les militants radicaux, et non le gouvernement élu, qui jouissent de la confiance tant recherchée de la population afghane», selon le rapport Afghanistan – Point de décision 2008.

«L’étude menée par le Senlis Council depuis 2005 montre, de manière probante, que l’aide destinée au Sud ne parvient pas à la population», pouvait-on lire dans le rapport.

Un énorme sentiment de frustration

Edward Girardet, journaliste spécialiste des problèmes humanitaires et directeur du programme d’études à Media21 Global Journalism Network, une organisation sise à Genève, a expliqué à IRIN que juste après la chute du régime des Talibans, les Afghans avaient nourri de grands espoirs quant à la reconstruction rapide de leur pays et à l’amélioration de leurs conditions de vie.

Mais six ans après, il y a un énorme sentiment de frustration, «en particulier chez les jeunes Pashtouns qui sont rentrés du Pakistan [où l’influence des Talibans est très forte dans les écoles coraniques], mais n’ont trouvé aucun emploi», a-t-il affirmé.

Selon M. Girardet, Oxfam et d’autres organisations, les milliards de dollars d’aide versés à ce pays déchiré par la guerre ont été détournés et/ou mal gérés et n’ont produit que très peu de résultats.

Rapport du FMI

Pour le Fonds monétaire international (FMI), la situation est tout autre. En effet, d’après un rapport du FMI, le pays a connu un fort taux de croissance économique au cours des six dernières années et le produit intérieur brut par habitant a augmenté de 53 %, passant de 200 dollars en 2001 à 306 dollars en 2007.

«Le taux de croissance réel se situait entre 26 % en 2002-2003 et 14 % en 2005-2006», peut-on lire dans le rapport 2008 du FMI, publié le 20 février, relatif aux avancées en matière de réduction de la pauvreté en Afghanistan.

L’augmentation des dépenses militaires est-elle la solution?

Pour combattre efficacement les insurgés, certains bailleurs de fonds ont exigé une augmentation des effectifs des troupes de l’OTAN.

Selon la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) placée sous le commandement de l’OTAN, outre les 10 000 soldats et plus – américains pour la plupart – engagés dans la lutte contre les insurgés talibans, la FIAS comprend plus de 33 000 soldats.

D’après Oxfam International, dans la lutte contre les insurgés talibans, l’armée américaine dépense toutes les minutes 65 000 dollars en Afghanistan (35 milliards en 2007).

Les organisations humanitaires et certains experts doutent cependant que l’augmentation des dépenses militaires soit la solution pour enrayer la montée de la violence en Afghanistan. «Il n’y a pas de solution militaire en Afghanistan; donc au lieu d’investir si massivement dans le maintien des troupes de l’OTAN dans le pays, il faudrait consacrer plus d’argent à la résolution de ce long et sérieux problème», a déclaré M. Girardet.

Un avis que partage Obaidullah, un habitant de Kajaki, un district de la province de Helmand.

«Tout ce que nous voulons, c’est un emploi, gagner de l’argent et subvenir aux besoins de nos familles», partage-t-il.

 

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