Au secours des prisonniers olympiques!

Écrit par Michel Wu
18.04.2008

  • L'affiche annoçant les conférences lors desquels s'est exprimé Michel Wu.(攝影: / 大紀元)

 

Discours prononcé par Michel WU à l'occasion de la conférence «Pékin 2008: Où en sont les droits de l’Homme?» à Lons-le-Saunier le 4 avril 2008

 

Les Jeux Olympiques de Pékin sont considérés comme l’un des événements internationaux de l’année. Le compte à rebours étant lancé, il est temps de faire le point sur la situation. À 120 jours de l’ouverture des Jeux, la presse courtisane tartine de long en large sur le stade en forme de nid d’oiseau ou bien sur cette piscine qui ressemble à un cube d’eau. Et les autorités qui tiennent la dragée haute ont misé sur la gourmandise des étrangers qui, affirment-ils, ne rateront pas cette belle occasion de gastronomie. Il y a aussi les chronomètres signés d’Oméga, les pistes couvertes de matières jusque-là inconnues, etc. Vous trouverez tous les jours bien d'autres gadgets et curiosités ainsi qu’un programme de festivités dont la débauche de couleurs rivalise avec des idées extravagantes.

Cependant, l’attention des observateurs s’est concentrée, bien entendu, sur ce qui différencie les Jeux de Pékin des olympiades précédentes. Où est la différence ? À n’en pas douter, ce sont les aspects humains. Une image qui ne vous aura sans doute pas échappée est celle de ceux que l’on appelle d’ores et déjà les prisonniers olympiques. Oui, les Jeux ne sont pas encore ouverts, le régime de Pékin a fait déjà des prisonniers, en tête desquels se trouve celui qui a lancé l’année dernière en sept idéogrammes chinois cette apostrophe : « Nous voulons les droits de l’Homme, pas les JO ! » (Bu Yao Ao Yun Yao Ren Quan).

Arrêté en juillet dernier, un ouvrier chômeur du nom de Yang Chunlin est attiré par un dossier brûlant des paysans de sa province du Liaoning, dans le nord-est de la Chine. Depuis plus de dix ans, ceux-ci ont perdu, dans des opérations immobilières pilotées par les autorités locales, les parcelles de terre dont ils disposaient comme le seul moyen d’existence. Ayant épuisé tous les recours possibles, ils se retrouvaient dans une situation désespérée. En vue de les aider à tenter la dernière chance, Yang a recueilli de village en village plus de dix mille signatures et les a publiées sur Internet. C’est dans cet appel que sont apparus pour la première fois les sept idéogrammes susmentionnés. Pour Yang, il est injuste d’abandonner tant de paysans expropriés au profit des JO. Son action est pourtant interprétée comme l’incitation à la subversion. Comparu en début d’année avec mains et pieds menottés, visage cagoulé, il s’est lui-même défendu en réaffirmant : « Nous voulons les droits de l’homme, pas les J.O. ! ». Le 24 mars, le jour où la flamme est rallumée à Olympie, il fut condamné à cinq ans de prison. Yang qui refusait de signer l’acte de condamnation a décidé de faire appel.

Auparavant, parmi les compagnons de Yang, Wang Guilin avait été condamné en janvier à 18 mois de rééducation par le travail forcé, et Yu Changwu est détenu au secret jusqu’à ce jour. Plusieurs autres défenseurs des droits de l’Homme sont également détenus pour s’être exprimés sur les JO de Pékin. Le militant démocrate Zhang Wenhe, originaire de Tianjin, ville portuaire à 200 kilomètres de Pékin, a déployé en octobre dernier dans les rues de la capitale une banderole portant l’inscription : « Nous voulons les droits de l’Homme et la démocratie, non pas des JO fascistes ». Il a été interné de force dans un hôpital psychiatrique.

Selon les statistiques officielles, ne serait-ce que pour l’année 2006, plus de 130.000 plaintes ont été portées aux instances judiciaires, touchant environ un million d’hectares de terrain dont 500.000 hectares de terre cultivée. Cette tendance va en augmentant. Combien de paysans sont ainsi ruinés ? Pas un chiffre n’est communiqué. Il a été confirmé  que dans toutes les provinces ont été créées des brigades de police chargées de ramener de force les appelants provinciaux dans leurs villages avant de les traduire devant les tribunaux locaux.

Hu Jia, mieux connu à l’étranger, est un jeune défenseur des droits de l’Homme. Il ne conteste pas les JO, mais dénonce farouchement les violations des droits de l’Homme. L’Union Européenne a plaidé en sa faveur. Incarcéré depuis décembre dernier sous la même inculpation d’incitation à la subversion, il vient d’être condamné à trois ans et demi de prison. Hu Jia n’est pas le seul à appeler les autorités à respecter comme promis les droits de l’Homme à l’occasion des Jeux. Plusieurs avocats, journalistes, écrivains et même des démobilisés de l’armée sont en prison ou en résidence surveillée.

La liste des prisonniers olympiques est longue si l’on se réfère aux Chinois qui pratiquent un culte. Selon les médias indépendants, plus de 2.000 pratiquants du Falun Gong dont une centaine ont été persécutés à mort depuis janvier 2007 (formellement identifiés) et un nombre indéterminable de catholiques fidèles à Rome font l’objet d’arrestations préventives. Les indomptables Tibétains sont encore une fois matés dans un bain de sang ! L’anniversaire de leur insurrection coïncide avec l’année des Jeux. Le monde entier est soumis à un grotesque lavage de cerveau, et l’on connaît mal ces arrestations préventives, derrière lesquelles se dissimule un plan visant à en finir avec toutes les résistances ou les dissidences.

Le cas d’un jeune chanteur compositeur Yuzhou est plus que choquant. Interpellé en janvier dernier pour un contrôle au nom de la sécurité des JO, ce pratiquant du Falun Gong fut emmené en détention et mourut quelques jours après en prison. Sauf un avis à la famille, on ne sait rien sur ce qui lui était arrivé.

 

 

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  • Michel Wu(攝影: / 大紀元)

 

L’image des prisonniers olympiques et leurs sept idéogrammes résument bien la vérité réelle de la Chine communiste à l’heure de la plus grande fête internationale des sports. Ils sonnent aussi la fin du mythe de la Chine communiste. En fait, le sursaut du régime et la nouvelle résistance des victimes du communisme ont déjà commencé avec la chute du mur de Berlin.

Il y a 19 ans que  Pékin a perdu son fonds de commerce politique et idéologique. Le pays s’est trouvé alors plongé dans une « crise de conviction », les bonnes paroles n’étaient plus payantes, et l’un des signes du désarroi est qu’aucun des dirigeants en place ne parvenait à faire suivre aveuglément. La seule manière qui leur aurait permis de sauver quelque chose est la rigueur morale dont un certain altruisme qu’ils affichaient jusqu’alors. Mais cette ligne de fond, ils l’ont aussi abandonnée.

Tirant la leçon de la banqueroute du Parti communiste d’Union Soviétique, le  Parti communiste chinois (PCC) croit qu’il suffit de redresser par tous les moyens l’économie du pays pour éviter de sombrer à son tour. D’où la philosophie de marché et le fameux slogan « qu’une partie de personnes s’enrichisse d’abord ! ». Par précaution, des cadres du Parti ont interrogé à l’époque le petit timonier : Nos enfants sont-ils aussi de ceux-là ? La réponse de Deng est affirmative. Le PCC a fait ainsi abstraction d’une devise des hommes politiques chinois de tout temps, c’est-à-dire, « la peine avant tous et le plaisir après tous ». Cet appel à s’enrichir sans garde-fou a, comme vous le savez, ouvert la boîte de Pandore. La corruption est aujourd’hui généralisée. Combien de victimes l’abus de pouvoir a-t-il fait ? Une estimation disponible d’un professeur d’université qui plaide en faveur des Chinois ruinés par l’enrichissement de la nomenklatura porte à des dizaines voire des centaines de millions. Des statistiques officielles confirment que 90 % des enrichis sont des cadres du Parti et du gouvernement et selon la banque de développement d’Asie, les riches qui représentent 10 % de la population possèdent 50 % de la richesse nationale, tandis que les pauvres, 10 % aussi, n’en possèdent que 1 %.

Ce qui est d’autant plus gênant pour le régime, c’est qu’il lui est de plus en plus difficile de maintenir le peuple et le monde extérieur dans l’ignorance. Le web a non seulement permis de percer les mensonges du passé, mais aussi de dévoiler la vérité de nos jours, accélérant l’éveil du peuple. Promenant leur regard dans le monde, les Chinois ont découvert un avenir tout proche, Taiwan, considéré jusque-là comme un résidu de la guerre civile. Pendant plus d’un demi-siècle, alors que le continent est soumis à la dictature communiste, l’île a évolué vers une véritable démocratie. Pour plus de 20 millions d’habitants insulaires dont la majeure partie est de souche chinoise,  il n’y a pas de prisonniers politiques. La propriété privée est respectée et la croyance figure parmi les libertés fondamentales. Taiwan vient de réaliser par l’élection libre la deuxième alternance démocratique et son économie, malgré un environnement défavorable, maintient un taux de croissance à 4 à 5 %. Leur revenu par habitant est classé parmi les premiers du monde. C’est plus qu’édifiant ! Les deux destins chinois, les deux voies chinoises sont au vu et au su de tout le monde, et ne devraient-ils pas inviter aussi nos hommes politiques à plus de prudence et de modestie ?!

Aujourd’hui sur le continent, les victimes du communisme – qu’ils soient paysans, ouvriers, croyants, intellectuels ou autres –, ont certes des réclamations différentes, mais ils partagent sans exception le même préalable : la fin du régime dictatorial. Et j’ajouterai que ce raz-de-marée de la société a trouvé un écho favorable chez des vétérans du Parti et de l’armée qui, formant une opposition informelle à l’intérieur de l’appareil, ont réclamé publiquement la liquidation de l’héritage politique de Mao et l’instauration de la démocratie. Je citerai volontiers Hu Jiwei, ancien rédacteur en chef du Quotidien du Peuple, la Pravda chinoise, Li Pu et Peng Di, tous deux ancien directeur général de l’agence d’information officielle Chine Nouvelle, Li Rui, ancien secrétaire de Mao, Bao Tong, secrétaire de l’ancien Premier ministre Zhao Ziyang déchu en 1989 et bien d'autres encore déterminés à en découdre, car eux-mêmes victimes d’une idéologie pour laquelle ils avaient sacrifié toute leur jeunesse et, qui sait si ne se cache pas parmi eux un cheval noir, leur force d’entraînement n’étant pas à négliger ?!

Je viens d’indiquer le contexte politique et social des prochains JO prévus à Pékin. Les aspects humains de ces jeux sont surtout frappants quand on sait que jamais dans l’histoire des olympiades, on n’a vu le départ de deux torches : la torche officielle et la torche des droits de l’Homme. L’une est portée sous le slogan « un même monde, un même rêve », l’autre, « un même monde, les mêmes droits de l’Homme ». La première est passée récemment par Paris et la deuxième, allumée en automne dernier, a déjà parcouru plus de 80 pays du monde. Elle est entrée fin mars en Chine communiste sous formes diverses et variées. Il s’agit d’une initiative de plus de trois cents personnalités du monde entier qui enquêtent sur la vérité de la persécution des pratiquants du Falun Gong. Une troisième flamme, flamme de la liberté, vient d’être allumée en Inde par les Tibétains qui vont parcourir aussi le monde pour protester contre les atrocités commises par la Chine communiste. Au moment où toutes ces victimes du régime de Pékin se lèvent pour s’émanciper du joug communiste, les JO de Pékin ont été politisés dès le début. Le régime cherche à couvrir ses violations des droits de l’Homme par les performances des athlètes. Il a besoin d’une aura internationale qui sera un produit dopant lui permettant d’intensifier la répression et la persécution. Cette visée politique n’a échappé à personne ; les jeux ont fourni un joli prétexte. Ce qui fait qu’en Chine, les prisons sont partout et surpeuplées, les prisonniers olympiques sont légion.

Dans ces conditions, les JO de Pékin deviennent un dilemme ou un casse-tête pour les bonnes volontés du monde entier. Tout le monde interroge sa conscience : on n’y va ou pas ? Je suppose que si on y va, on n’y va sans doute pas pour s’attirer les bonnes grâces du régime ni en simples athlètes ignorant les conditions humaines dans lesquelles auront lieu les compétitions. Aussi soyez tous fermement convaincus que le respect des droits de l’Homme est le fondement de la paix. À tous mes amis, j’ai déconseillé d’y aller car il est trop pénible de voir qu’une fête soit tellement entachée de sang et de larmes pour tant de prisonniers. À notre cher Président qui affirmait qu’il ne remettrait pas le drapeau dans la poche, je me permets de suggérer ceci : Monsieur le Président, si vous tenez à y aller, vous pourrez très bien faire un jogging au centre de Pékin sous un tee-shirt portant en chinois notre devise républicaine : liberté, égalité et fraternité. Peu importe l’affolement imaginable de vos conseillers. Ce faisant, je suis sûr que votre nom sera inscrit en lettres d’or dans l’histoire et que les Français et les Chinois seront fiers de vous. En attendant, je prie à toutes les femmes et les hommes épris de justice de courir au secours des prisonniers olympiques, qu’on y aille ou pas.

Le 4 avril 2008 à Lons-le-Saunier