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La jeune femme dédoublée

Écrit par Radio Son de l’Espoir
19.04.2008
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C’était au temps de l’impératrice Wu (625 à 705), vers les débuts de son règne. Dans une ville du Hunan vivait un fonctionnaire nommé Zhang Yi, homme simple et réservé, ayant peu d’amis intimes. Il n’avait pas eu de fils mais deux filles, l’aînée était morte en bas âge. La cadette, Qian Niang, était d’une très grande beauté.

Or, Zhang Yi avait un neveu, Wang Chou, à peu près de l’âge de sa fille, intelligent et beau garçon. Zhang Yi lui prédisait un avenir brillant et il disait volontiers :

– Le jour venu, Qian Niang sera pour lui l’épouse idéale.

Dans leurs rêves secrets, en grandissant, Wang Chou et Qian Niang songeaient souvent l’un à l’autre, mais leurs familles ignoraient tout. Un peu plus tard, lorsqu’un jeune homme fort honorable qui travaillait pour Zhang Yi lui demanda la main de sa fille, le père la lui accorda.

La nouvelle brisa le cœur de Qian Niang, et Wang Chou fut amèrement déçu. À la faveur d’un changement de poste, il demanda l’autorisation d’aller s’établir dans la capitale. Rien ne put le faire changer d’avis, et on l’autorisa donc à partir non sans le combler de présents.

Sur un dernier adieu, le cœur meurtri, Wang Chou prit le bateau en partance pour la capitale. Au coucher du soleil, à l’heure du mouillage, le bateau avait déjà parcouru plusieurs lieues au fil du fleuve, entre les collines. La nuit venue, Wang Chou attendait le sommeil lorsqu’il crut entendre des pas sur la rive. Peu après, les pas s’arrêtèrent en face du bateau et Wang Chou, à sa stupeur, reconnut Qian Niang, pieds nus.

Ivre de joie et en même temps un peu incrédule, il lui prit les mains et lui demanda d’où elle venait. Elle répondit à travers ses larmes :

– La force de ton amour nous a unis en rêve. À présent, contre mon gré, on veut me marier à un autre. Je sais que tu m’aimeras toujours et j’aimerais mieux mourir que vivre sans toi. Aussi me suis-je enfuie.

Wang Chou fut pris de vertige. Jamais il n’aurait osé en espérer tant. Il cacha Qian Niang à bord et ils repartirent ensemble, en un long voyage, jour et nuit. Quelques mois plus tard, ils s’établirent dans le Sichuan, bien loin de leur région natale.

Cinq années passèrent. Qian Niang donna le jour à deux fils. Pas une fois, elle n’écrivit à ses parents, mais elle songeait à eux sans cesse. Un jour, en pleurs, elle dit à Wang Chou :

– Pour te suivre, jadis, j’ai failli à mon devoir filial. Mais voilà cinq ans que je n’ai vu mes parents. Leur tendresse me manque et, surtout, le ciel me pardonnera-t-il de vivre, loin d’eux, un bonheur égoïste?

Ému par sa détresse, Wang Chou répondit :

– Rentrons au pays. Te faire souffrir ainsi n’a pas de sens.

Aussi, regagnèrent-ils ensemble leur ville natale. Dès leur arrivée, Wang Chou alla seul frapper à la porte de Zhang Yi pour lui confesser toute l’histoire. Mais Zhang Yi s’écria :

– Que me racontes-tu là? Ma fille est dans sa chambre, alitée, bien malade depuis des années.

– Mais elle est à bord de mon bateau en ce moment même!, protesta Wang Chou.

Ébranlé, Zhang Yi envoya un serviteur vérifier ce qu’il en était.

Et, en effet, Qian Niang était là, radieuse et vive, impatiente de revoir les siens. Elle demanda aussitôt :

– Comment vont mes parents?

Le serviteur éberlué courut rapporter à Zhang Yi ce qu’il venait de voir.

Lorsque la jeune malade apprit la nouvelle depuis sa chambre, elle se leva, revêtit ses plus beaux atours, ses bijoux, et se poudra le visage. Après quoi, souriante et muette, elle descendit à la rencontre de l’arrivante.

Elles s’avancèrent l’une vers l’autre et, lorsqu’elles se rejoignirent, leurs deux corps se fondirent pour ne faire plus qu’un, en accord parfait. Cependant, ce corps unique portait un double ensemble de vêtements.

La famille préféra tenir secrète cette affaire troublante. Seuls quelques intimes en eurent vent. Les jeunes époux vécurent encore quarante années et leurs deux fils devinrent de hauts dignitaires du royaume.

D’après Chen Xuanyu, fin de la dynastie Tang (début du IXe siècle de notre ère).

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