Qui vient au monastère?

Écrit par Anne-Marie Allard, Collaboration spéciale
25.04.2008
  • Entrée du Monastère Notre-Dame-du-Rosaire(攝影: / 大紀元)

Nous sommes en 1925. Six moniales venant de Prouilhe débarquent au Canada afin de propager la parole de Dieu. Elles seront accueillies par Mme Claire Tranchemontagne Pelland qui leur offrira sa résidence, au 1160 rue Frontenac, qu'elle occupe avec son fils unique. Un peu plus de 80 années ont passé et les moniales dominicaines du Monastère Notre-Dame-du-Rosaire sont toujours actives dans la communauté de Berthierville et de ses environs.

Alors que je n'ai pas de voiture, le désir de voyager à l'extérieur de l'île de Montréal me prend. Voulant fuir quelque temps le rythme effréné que je m'impose, je décide de m'évader en région et en retraite. Quelle surprise de constater qu'une localité d'un peu plus de 4000 habitants dans la région de Lanaudière peut être si facilement accessible en transport en commun. Empruntant l'autobus numéro 55, en partance du métro Radisson à Montréal, direction Joliette, je peux me rendre jusqu'à Berthierville en faisant un transfert à Lavaltrie pour la ligne 131-138, direction Lanoraie-Berthierville. Le voyage est d'une durée d'une heure et demie.

Le monastère des moniales dominicaines, Monastère Notre-Dame-du-Rosaire, compte dix-sept places disponibles pour les visiteurs; neuf petites chambres ou «cellules» dans le monastère même, cinq chambres à l'aumônerie, située en face du monastère, et deux chambres (un lit simple et un lit double) dans la maison «Pelland». Celle-ci, construite avant le monastère, accueille ceux qui désirent passer un séjour érémitique ou les familles qui rendent visite à un membre de la communauté.

Chaussée de mes vieux souliers de montagne et n'ayant que mon sac de voyage sur le dos, je me présente à la réception du Monastère Notre-Dame-du-Rosaire, comme dans mes souvenirs de pèlerin sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. En ouvrant une lourde porte de bois, la soeur hôtelière m'accueille avec ce sourire qui vous rappelle celui d’une tante ou d'une amie que vous n'avez pas vue depuis longtemps. Elle m'amène à ma chambre située à l'étage dans le monastère, tout en me demandant si j'ai fait un bon voyage et par quel moyen de transport je suis arrivée. Tout le long de notre chemin, à travers les couloirs, elle m'explique les différentes manières d'ouvrir telle ou telle porte. Certaines étant capricieuses, les indications sont importantes à mémoriser. L'hôtelière me tend les clés de ma chambre et du domaine dans un geste de confiance et de générosité. Je prends le trousseau comme si je recevais un présent d'une grande valeur, car avec celui-ci j'ai la possibilité de circuler aisément dans le monastère. Elle me demande si j'ai faim, précisant que le souper a déjà été servi, mais qu’il resterait peut-être encore quelque chose de chaud à manger, elle me fait descendre à la cuisine. «Ce soir, c'est de la lasagne!» Elle me dit le mot «lasagne» comme si elle me dévoilait le nom de son plat favori. C’est le premier secret qu'elle me confie. La soeur moniale me laisse seule, et c’est ma première heure de silence dans le monastère.

La «cellule» monastique est pourvue d'une grande fenêtre et est meublée d'un lit, d'un bureau de travail, d'une étagère et d'un lavabo avec miroir et lingettes. Les visiteurs, selon leur besoin, ont accès à la literie et aux serviettes rangés dans un placard. La salle de bain, accessible en tout temps, se partage avec les voisins du même palier. Attention, il n'y a ni radio, ni télévision, ni horloge.

Celui qui séjourne chez les moniales dominicaines s'intègre à l'esprit du monastère en partageant le silence. S'il le veut, il peut participer à la prière et à la liturgie des moniales. Les hôtes accueillent des personnes qui s'interrogent sur la vie monastique et ses valeurs, d'autres qui désirent se ressourcer spirituellement ou bien refaire leurs forces physiques. Nous pouvons croiser de petits groupes (de 4 à 14 personnes) qui cherchent à découvrir les voies du silence et de la spiritualité ainsi que d'autres, plus nombreux, venant pour une journée de ressourcement et de réflexion.

De mon côté, j'avais convenu d’un séjour de quatre nuits. Pensant me réfugier dans la lecture, j’avais apporté trois livres. Un seul aurait suffi. Étant peu attirée par les offices divins, je ne me suis présentée qu'à un seul d'entre eux. Je ne ressentais pas la nécessité d'assister aux liturgies. N'ayant jamais suivi de cours de catéchisme à l'école, ma curiosité s'oriente vers l'histoire de la religion et de son impact. Ma venue n'étant pas à titre d'initiation à la lecture divine, j’ai préféré me détendre physiquement et mentalement. Mes journées se composaient de lecture, de divertissement, de moments de réflexion ainsi que de marches actives dans la ville de Berthierville et dans ses îles.

Le voeu de silence est brisé par le son de la cloche qui annonce les liturgies et les repas. Afin de faciliter la vie monastique, les soeurs moniales font la distribution du repas du midi et du soir à des heures fixes. Quant au déjeuner, il est pris au moment qui convient au visiteur. Il est possible de manger à l'extérieur des heures convenues, car la cuisine est à notre disposition. Des fruits, du fromage, des noix, du pain et des boissons chaudes ou froides sont à notre portée ainsi que du yogourt nature, des céréales de style granola et des biscuits, tous faits maison par les moniales.

La communauté des moniales tend vers la fraternité entre ses membres. Loin du principe du regroupement autour d'un seul Père représentant le Christ et son autorité, elle prône l'amitié et le sens de la liberté spirituelle. Il ne sera pas rare d'entendre quelques fous rires dans les couloirs du monastère.

Lors de mon séjour, deux autres visiteurs, un homme et une femme, occupent les lieux dans les mêmes circonstances. Nous nous rencontrons tous lors des repas, chacun prenant place à notre table. Nous nous regardons, nous nous sourions, le dialogue demeure muet. Conscients de nos propres quêtes, nous nous sentons en communion.

Toutes mes actions sont entreprises dans un climat de silence. Étonnamment, nous en venons même à ne plus réaliser l'absence d'échange verbal tant notre esprit compense par la pensée. Notre discours intérieur devient beaucoup plus riche et il s'attarde beaucoup plus objectivement à nos faits et gestes.

L'accueil est au coeur de la vie des moniales dominicaines. Au moment de partir, l'hôtelière désireuse de me voir une dernière fois, me fait l'accolade et me regarde toujours avec la même sincérité, avec un de ces sourires qui allègent vos pas vers le retour.

Et comment s’est passée mon arrivée à Montréal? J’ai pris le temps de saluer ma colocataire qui m’a dit: «Mais quel sourire!» et j’ai marché tranquillement vers mon cours de danse avec l'esprit en paix.

Pour tout renseignement ou réservation, demander l'hôtelière au 450-836-3724 ou par courriel au

[info@monialesdominicaines.qc.ca].

Ou visiter leur site Internet:

[www.op.org/international/english/Nuns/Continents/Canada/berthierville.htm].

Bref historique des soeurs moniales dominicaines

En l'an 1207, le frère Dominique pris connaissance, lors de ses nombreux voyages, d'une communauté féminine établie au pied de l'église Sainte-Marie-de-Prouilhe, au village de Fanjeaux dans l'actuelle région de l'Aude en France. Guidé par des directives voulant contrer l'hérésie de plus en plus menaçante dans le sud du pays, frère Dominique rassemble neuf femmes dans cette communauté. Elles se regrouperont sous le nom de «Sainte-Predication-de-Prouile», la première fondation des moniales. En 1925, la maison Pelland de Berthierville a été la première résidence des soeurs moniales dominicaines. Rapidement, la communauté grandit et la maison devint trop petite, c'est ainsi que la construction du monastère actuel débutera en 1934, il s'en suivra trois ailes supplémentaires. Le monastère portera le nom du Monastère Notre-Dame-du-Rosaire.

Monastère Notre-Dame-du-Rosaire

1140, rue Frontenac

Berthierville  Qc  JOK 1A0