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Un cadavre sorti du placard de l’Hexagone

Écrit par Olivier Chartrand, La Grande Époque - Montréal
30.04.2008
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Critique de Film : L’Ennemi intime 

  • Benoît Magimel et Albert Dupontel(Photographe: Thibault Grabherr / 大紀元)

Il y a cinquante ans déjà, la guerre en Algérie (1954 à 1962) s’intensifiait… pour se terminer quelques années plus tard. Ce conflit armé, entre la puissance coloniale française et un territoire maghrébin qui était considéré comme partie intégrale de la France, l’Algérie, n’a été reconnu en tant que tel par Paris qu’en 1999.

En 1959, en Kabylie, le lieutenant Terrien (Benoît Magimel, Les Rivières pourpres 2, La Pianiste) en est à sa première affectation. L’homme humaniste et idéaliste doit remplacer un soldat français abattu, par erreur, par ses propres troupes. Il prend donc le commandement d’une section de l’armée française dans laquelle le sergent Dougnac (Albert Dupontel, Odette Toutlemonde, Président) sert, désabusé par cette guerre qui «est perdue d’avance».

L’Ennemi intime de Florent Emilio Siri (Hostage, Nid de guêpes) sort un cadavre du placard de l’Hexagone. Il présente le conflit sous une double facette, à la fois intime et épique, qui atteint deux objectifs louables d’un bon film du genre : divertir en faisant vivre de fortes émotions et renseigner sur une partie taboue de l’histoire.

Le film est bouleversant. Sur fond historique, il met en avant-plan l’incompréhension d’individus se battant pour des intérêts les dépassant largement; intérêts, comme tend à le montrer le réalisateur, qui parfois manquent de perspective. Bien qu’il s’agisse d’une fiction, le scénario est d’autant plus troublant puisqu’il est basé sur des témoignages récoltés par l’historien Patrick Rotman. Des détails intéressants sur les faits historiques sont accessibles sur le site Internet : www.lennemi-intime-lefilm.fr.

Comme l’indiquait une publicité du film, sur certains aspects, on peut qualifier l’œuvre de Platoon français. Mise à part de réelles similitudes entre la guerre au Vietnam et celle en Algérie, en ce qui concerne les deux oeuvres, nous n’avons qu’à souligner cette opposition entre le soldat désabusé et le nouveau venu, dont les idéaux tomberont graduellement tout au long du récit. La transformation de Terrien à travers le conflit illustre bien comment des hommes qui ont pourtant au départ des valeurs morales louables peuvent en venir à des actes de barbarie extrêmes. À ce titre, Magimel est convaincant tandis que la performance de Dupontel, en sergent cynique est très réussie.

Siri a choisi de donner une texture de western des années 1970 à ce film de guerre. Ce qui fait que le grain de l’image est plus grossier, les nuits sont d’un bleuté très dense et sombre alors que les jours sont d’une lumière saturée. Ce fort contraste entre les couleurs ajoute à l’inconfort que peut ressentir le spectateur qui accompagne les soldats dans un conflit où il n’y a pas de repos.

La très belle musique d’Alexandre Desplat (qui a également composé celle de Golden Compass et Painted in Veil) sert très bien l’objectif de nous faire sentir le côté absurde et tragique de la situation.

De manière plus générale, il est intéressant de voir que le passé colonial de la France est de plus en plus traité au cinéma. À ce titre, L’Ennemi intime est un peu le relais d’Indigènes (2006) de Rachid Bouchareb dans lequel on racontait l’implication maghrébine lors de la Seconde Guerre mondiale. À cette époque, la participation des colonies des puissances occidentales à l’effort de guerre avait été, après 1945, l’élément déclencheur du mouvement mondial de décolonisation. Courant qui a été freiné particulièrement sévèrement par la France en Algérie.

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