Ciné Woulé, «le cinéma au grand air»
En Guadeloupe, les salles de cinéma avec des films à effets spéciaux font salle comble. En revanche, les petites salles qui sortent des films de qualité sont quasiment vides. Pour répondre à une population en demande Jean-Marc Césaire (petit fils d’Aimé Césaire), fondateur du Ciné Woulé, cinéma itinérant.
La location des films s’avèrent difficile
En 1995, Jean-Marc Césaire s’aperçoit très vite qu’en vivant hors du territoire métropolitain, il est quasiment impossible de louer des films. Il trouve alors un seul distributeur qui lui accorde du 16 mm, c’est le ministère des Affaires étrangères. N’ayant pas le choix, il s’y inscrit et va donc projeter en Guadeloupe un lot important de films africains. Il participe au premier festival de la Guadeloupe, le Cinéma d’Afrique, 'Noir tout couleurs' en 1998, sur la place de la Victoire à Pointe à Pitre. Il monte un écran de 6 mètres sur 4 et projette un film. Pendant deux ans, il va diffuser des films qu’il loue. De fil en aiguille, avec son 35mm sous le bras, les projections en plein air prennent de l’essor et s’avèrent être un succès, il anime ainsi des soirées de cinéma itinérantes.
Projets et succès
Grâce à l’engouement des communes et au soutien important de la DRAC en 2002, il obtient un accord pour sa demande au sujet de l’opération «vacances-ciné». Il devient coordinateur régional en 2002. Ensuite, il reprend le projet qui s’appelait «collège du cinéma» et pilote le pôle de l’éducation à l’image. Ciné Woulé participe à maintes reprises au Fémi, http://www.femi.fr/ reprend l’école du cinéma de l’association Noir tout couleurs. Il programme de grands films de cinéma pour les scolaires qui sont projetés dans les salles de cinéma. Accompagné de dossiers pédagogiques, Ciné Woulé fait travailler les jeunes en amont et en aval de la projection. Crée des ateliers vidéo, des ateliers d’arts plastiques avec des artistes peintres pour les réalisations d’affiches, ainsi que des ateliers d’écriture aux scénarii. Des concours de scénario ou de courts métrages organisés par le Pige sont proposés.
Un cinéma qui tourne
L’association roule sa bosse et se déplace dans les communes. De juin à octobre, le week-end, les mardi soir. Elle s’est attelée à mettre en place un cinéma d’éducation populaire et cela est né de projets nationaux, l’école du cinéma, le ciné club, ciné ville. Ciné Woulé propose aussi ses projections dans des ciné clubs fermés. Des salles d’exposition ou de théâtre l'accueillent aussi. Enfin, après 13 années d’existence, Ciné Woulé aspire à un rayonnement carribéens: la naissance d’un nouvel ancrage qui permettra à la Guadeloupe de s’ouvrir sur la Caraïbe. Ce sera par des conventions signés avec ses proches voisins, en commençant par une des plus grandes îles, la Jamaïque. Une convention est signée avec la Carimac (Caribbean Institute of Media and Communication) en décembre dernier, d' où découleront des échanges de diffusion comme de production. C’est aussi l’occasion de s'appuyer sur une compatriote, Mme Marie-Rose Lafleur, guadeloupéenne, directrice de l’Alliance française à Kingston et de s’appuyer sur des instances françaises, comme l’Ambassade de France qui sont une garantie sérieuse pour que ces conventions soient suivies d'effet.
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Interview Jean-Marc Césaire Des diffusions donc des échanges? Oui, diffuser en Jamaïque des productions guadeloupéennes et vice versa pour la Guadeloupe. Comment se passera le fonctionnement? Cela se passera sur 2 niveaux. D'une part les scolaires: avec les collèges et les lycées. Un atelier audiovisuel sur la cinématique de l’image pour faire comprendre aux jeunes que l’image a un sens, d’où vient le fameux rapport du signifiant et du signifié. J’ai travaillé avec les écoles en expliquant ce que sont les codes de l’image. On passe par l’échelle des plans, gros plan, plan large, plan moyen ou plan américain. Travailler le mouvement, la lumière, les couleurs. C’est également une approche de l’écriture et du story-board, y compris aussi du rôle du réalisateur. Et le second niveau? Ce seront les professionnels. Entre réalisateurs guadeloupéens et jamaïcains. Il faut savoir que ce n’est pas toujours facile pour les Jamaïcains, car même s' ils sont indépendants, il n'en reste pas moins qu’ils ont une grande dépendance envers les Etats-Unis, liée à l’économie et à des conventions de partenariat exclusifs qu’ont les salles de cinéma jamaïcaines avec des grosses boîtes de productions américaines comme la Warner par exemple. Nous ne désirons pas être concurrents de la Warner, nous ne faisons pas de films commerciaux mais surtout des films d’auteurs. Au lieu de diffuser dans les salles commerciales, nous allons diffuser dans les quartiers, les villages. Toucher un public qui n’a pas forcément les moyens d’aller au cinéma. Et pour la traduction des films? Le film restera en version originale sous-titrée. C’est une éducation à faire auprès de nos élèves, de nos jeunes. L’anglais sera de plus en plus parlé en Guadeloupe. C’est donc une grande ouverture. Avez-vous signé d’autres conventions? Oui. Avec la Guyane et le petit cinéma d’ailleurs et aussi avec la Martinique. On est en pourparlers avec Ste Lucie et la Dominique. Avez-vous déjà prévu une date avec la Jamaïque? Un concours vidéo est mis en place par les Jamaïcains. Nous ferons une demande au rectorat de la Guadeloupe pour que les collégiens et les lycéens puissent y participer. De cela, on tirera des courts-métrages qui seront réalisés et seront sélectionnés par la présence d’un jury commun. |
Nouvelle structure
Pour cela, Ciné Woulé a fait l’acquisition d’un écran géant gonflable de 15 mètres de large sur 10 m de hauteur. Il permettra de faire des projections qui vont offrir un nouvel imaginaire aux jeunes et aux moins jeunes. Il sera installé dans de grands espaces. Grâce à cette nouvelle opération , Ciné Woulé a donc décidé d’établir son propre programme de diffusion. Ciné Woulé souhaite aussi vivement créer la première salle indépendante où de petites productions, que l’on ne voit pas forcément dans les grandes salles,seront mises à l'affiche. Une cafétéria adjacente permettra au public d’échanger, créant ainsi un pôle d’éducation inédit à l’image.
Quel est votre message pour les cinéphiles? Il faut avant tout regarder un film pour ce qu’il nous donne à rêver et voyager plutôt qu’en terme d’actions et de mouvements en effets spéciaux. J’espère fortement que les jeunes auront un regard plus critique sur l’image et les outils nécessaires pour développer de bons films. |
Dehors, le moteur de la camionnette ronronne. Dans la besace de Jean Marc, des pellicules. Ce soir sous les étoiles, c’est du cinéma pour tous!
Contacts : 0590 213 799 / 0690 617 877