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Les Missions Étrangères en Asie, 350 ans d’histoire et d’aventure

Écrit par Gilles Van Grasdorff, Collaboration spéciale
11.05.2008
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  • Birmanie – Jeune fille birmane.(攝影: / 大紀元)

Le 29 juillet 1658, Alexandre VII nomme François Pallu et Pierre Lambert de la Motte respectivement vicaires apostoliques du Tonkin et de la Cochinchine. Le même jour, sous la pression de Louis XIV, le pape fait de François Laval, initialement prévu pour l’Asie, le vicaire apostolique du Canada. La Société des Missions étrangères de Paris est fondée. Deux ans plus tard, le 7 novembre 1660, peu avant son départ pour l’Extrême-Orient, Ignace Cotolendi est sacré vicaire apostolique de Nankin. À Paris, la rue du Bac devient le cœur de leur société.

Pierre Lambert de la Motte et François Pallu ont l’intention d’établir à Paris, avec l’aide de la Compagnie du Saint-Sacrement et des Bons Amis, une société secrète composée d’ecclésiastiques uniquement, un établissement qui serait le cœur de leur Société. Ce sera la rue du Bac…

ALEXANDRE DE RHODES, LE PRECURSEUR

Il faut rendre hommage à ce missionnaire avignonnais, entré dans la Compagnie de Jésus le 14 avril 1612. Ses études achevées, il aspire à rejoindre l’archipel nippon, malgré les persécutions antichrétiennes qui y perdurent. En 1619, à l’âge de vingt-six ans, il débarque à Goa, où il demeure une trentaine de mois, avant de rejoindre Malacca, qu’il atteint le 22 avril 1622. On le retrouve encore à Macao, le 23 mai 1623, où les jésuites réfugiés après leur expulsion du Japon lui apprennent le japonais. En 1644, en Cochinchine, un de ses catéchistes est décapité sous ses yeux. Condamné à mort, le père de Rhodes quitte Macao le 23 juillet 1645 et rejoint l’Europe via la Perse, la Médie, l’Arménie, par voie de terre.

 Il arrive à Rome le 27 juin 1649. Innocent X le reçoit aussitôt. Le missionnaire dresse devant le souverain pontife un tableau effrayant: « Nous avons tout sujet de craindre qu’il arrive à l’Eglise d’Annam ce qui est arrivé au Japon, car ces rois, tant du Tonkin que de Cochinchine, sont très puissants et accoutumés à la guerre. » En attendant la décision de Rome, Alexandre de Rhodes s’attelle à la rédaction d’un mémoire (septembre 1651), Annamatica Ecclesia, dans lequel il décrit la situation dramatique des Églises du Japon et de l’Ethiopie, anéanties par les persécutions. Évoquant le Tonkin et la Cochinchine, où il oeuvrait jusqu’alors, le jésuite assure que, pour le seul royaume d’Annam, il est urgent de nommer des vicaires apostoliques pour former un clergé local. La réponse tarde, elle viendra du pape Alexandre VII…    

LE SIAM, TERRE D’ACCUEIL

L’heure est cependant aux premiers départs. Dix-sept missionnaires quittent la France, dont trois évêques, onze prêtres et trois auxiliaires laïcs. Les premiers à atteindre Alexandrette, le 11 janvier 1661, sont Pierre Lambert, Jacques de Bourges et  François Deydier. Ce premier groupe marche sur Ispahan, puis sur Mossoul et Bagdad. Après une courte traversée de l’océan, les voici sur les côtes de Malabar et de Coromandel avec la traversée des Indes en char à bœufs. La deuxième équipe, conduite par Cotolendi, choisit de se rendre directement d’Alexandrette, qu’il atteint en octobre 1661, à Bassora. Entré aux Indes à Masulipatam, Ignace Cotolendi est le premier évêque des Missions étrangères à mourir sur une terre d’Asie, le 6 août 1662, après seulement vingt et un mois d’épiscopat… Le groupe Pallu, lui, débarque dans le port d’Alexandrette le 24 janvier 1662, d’où il rejoint Alep, à deux jours de caravane, et point de départ des pistes qui mènent en Arménie au nord-est, en Mésopotomie, au sud, et, plus loin, aux Indes et à la Perse…

 

Dans l’intervalle, Lambert de la Motte, Jacques de Bourges et le Toulonnais François Deydier entrent au Siam après avoir traversé la presqu’île de Malacca, à pied ou en barque, puis en remontant le cours du fleuve Meinam, pour arriver, le 22 août 1662 à Ayutthaya sains et saufs. Ils sont rejoints, le 27 janvier 1664, par François Pallu, Louis Laneau, Pierre Brindeau, Antoine Hainques et Louis Chevreuil, après vingt-huit mois de voyage pour les deux derniers nommés, et deux ans et trois semaines pour les autres. Mgr Lambert et Pallu feront du Siam la première mission de la Société en terres d’Asie.

À la mort de François Pallu, en 1684, les Missions étrangères comptent quatre missions: le Siam, la Cochinchine, le Tonkin, une partie de la Chine et le séminaire de Paris. En vingt-six ans, elles ont créé six vicariats apostoliques, fait sacrer huit évêques dans des contrées où en 1658 on n’en comptait pas un seul, établir un séminaire général au Siam, un séminaire au Tonkin, instituer un clergé indigène – objectif premier des Missions –, et baptiser 60.000 personnes. Durant cette période, 69 missionnaires ont quitté la France pour l’Asie.

Il faudra près de 60 ans, entre 1684 et 1742, avant que l’on puisse en compter un nombre égal.

LE TOURNANT

En France, Napoléon a rétabli les Missions étrangères, fermées, vendues, puis rachetées au moment de la Révolution, et leur assigne un rôle économique. Il les supprime en 1809 pour le même motif. Louis XVIII les rétablit le 2 mars 1815, et, le 3 février 1816, les lazaristes et les Pères du Saint-Esprit. Le séminaire de la rue du Bac rouvre ses portes. Quelques mois auparavant (1814), Pie VII redonnait officiellement vie à La Compagnie de Jésus, supprimée en 1773. C’est à partir des années 1820 que la Société va connaître son âge d’or, en raison de l’appui financier de l’Œuvre de la Propagation de la foi, et, plus tard, de celle de la Sainte-Enfance.

Enfin, les missionnaires du XIXe siècle vont faire une place importante à l’observation de la nature. Dès l’âge d’or des missions, les grands établissements scientifiques comprennent quels admirables auxiliaires les prêtres peuvent devenir. Réduits dans la première moitié du XIXe siècle à quelques figures, dont la plus célèbre est certainement le père Huc, les missionnaires naturalistes débarquent en nombre. Les Missions étrangères de Paris seront les premières à rétablir le contact avec les établissements scientifiques. Leurs envoyés sont établis dans la partie occidentale du Sichuan. Plus précisément à Moupin, bourgade rendue célèbre par le lazariste Armand David. Le Muséum national d’Histoire naturelle, qui se tourne, comme sa grande rivale la Faculté des sciences de Paris, vers les sciences expérimentales, ne cesse d’ailleurs de solliciter le concours des missionnaires. En sens inverse, c’est bien grâce à ces hommes de foi que l’institut va étendre ses recherches à toutes les régions inexplorées du globe. Bientôt s’ajoutera à ce champ d’intervention l’immense domaine de l’ethnologie, jusque-là exploré au hasard. Tout au long du XIXe siècle, la Chine va se muer en terrain de prédilection de l’apostolat missionnaire. Depuis qu’un décret impérial de 1724 y a interdit la religion chrétienne, le pays reste dangereux. Mais, la victoire des Britanniques dans la première et très coloniale guerre de l’opium (1840-1842) ouvre la voie à la reprise de l’évangélisation dans l’Empire du Milieu. A partir de 1842, les traités inégaux, qui concluent en défaveur de la Chine la guerre de l’opium, donnent aux Occidentaux l’accès à quelques ports chinois. Ils accordent aussi une protection diplomatique aux étrangers et celle-ci s’étend aux missionnaires. Le négociateur français du traité de Wampoa, Théodore Lagrenée, arrache même un édit de tolérance envers les chrétiens qui ne sera ni publié, ni appliqué, mais justifiera l’ingérence de la France dans les affaires religieuses chinoises.

Sous le Second Empire (1852-1870), la France perpétue son rêve d’Asie. Quelle que soit la forme de son projet – colonie, protectorat, comptoir, concession… – elle poursuit cette offensive par la colonisation de l’Annam, du Tonkin, de la Cochinchine, du Cambodge et du Laos. S’y entremêlent préoccupations commerciales et défense des intérêts catholiques. Toujours très actifs, les missionnaires s’installent en Chine, en Inde, en Corée, au Japon, en Mandchourie et au Tibet.

Passées leur apogée au XIXe siècle, les Missions étrangères se sont reconfigurées au siècle suivant, en développant les Églises locales dotées de leurs propres pasteurs qu’elles vont aider au mieux. Ainsi, depuis les origines, elles ont envoyé 4.500 prêtres en Asie. La mission qu’Alexandre VII leur avait assignée est accomplie…

 

Gilles Van Grasdorff vient de publier La belle histoire des Missions étrangères, 1658-2008, Perrin, 24 euros.

 

A VOIR ABSOLUMENT: L’EXPOSITION LES MISSIONS ETRANGERES EN ASIE, 350 ANS D’HISTOIRE ET D’AVENTURE

Missions Étrangères de Paris - 128 rue du Bac - 75007 Paris

Prolongation de l’exposition jusqu’au 29 juin

Ouverture du mardi au dimanche de 14 h à 18 h – Entrée libre

L’exposition, organisée au Séminaire des Missions Étrangères présente les portraits des 23 missionnaires qui ont subi le martyre au Vietnam, en Corée et en Chine et qui ont été canonisés. On y expose aussi d’anciens vêtements liturgiques de grande qualité artistique qui ont été brodés au XIXe siècle.

L’exposition invite au voyage. Plusieurs salles sont consacrées au Vietnam, au Cambodge, au Laos, à la Thaïlande, à la Birmanie, à l’Inde, à l’Indonésie, à la Malaisie, à la Corée, au Japon, à la Chine, à Taiwan et à Madagascar. On peut y découvrir l’histoire de ces pays ainsi que les traditions, les croyances, les us et coutumes des peuples qui y vivent, à travers de nombreuses photographies et illustrations.

On y présente également les activités diverses des missionnaires en Asie et leurs contributions à la connaissance des sciences botaniques et des sciences de la terre, ainsi qu’au développement des imprimeries.

Pour en savoir plus: http://128.mepasie.org/

 

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.