Être ou paraître vert

Écrit par Marijo Gauthier-Bérubé, Collaboration spéciale
15.05.2008
  • Un panneau-réclame montrant l'image écologique(攝影: / 大紀元)

Il y a quelque mois, un magazine pour femme offrait des conseils pour paraître plus écologique, paraître plus «vert» afin de suivre la mode : apporter de la nourriture biologique et/ou équitable sur l’heure du dîner, privilégier les gros formats plutôt que les portions individuelles dans les boîtes à lunch, etc.

Même si au bout du compte, les deux portent un geste envers l’environnement, entre la personne qui est et la personne qui paraît, il existe une importante différence. L’«être» est d’abord pour soi-même, pour des raisons personnelles ou encore des convictions profondes que l’environnement vaut la peine d’être défendu et protéger.

Le «paraître», c’est pour sembler, avoir l’air devant les autres afin d’aller chercher leur approbation, puisque c’est bien vu de parler recyclage. Mais si l’environnement cesse d’être un sujet à la mode, pourquoi continuer à paraître? Certes, certaines personnes seront plus conscientisées et continueront leurs activités vertes, mais à quel point dans cette société où paraître est de plus en plus important.

La mode, pour le moment, c’est l’écologisme, le biologique, l’équitable, bref, le vert. La preuve, promenez-vous dans un supermarché, un centre commercial ou sur une artère principale de Montréal et remarquez à quel point le vert, les motifs de fleurs ou de feuilles prédominent.

Même phénomène avec les publicités : on présente des produits en symbiose avec la nature, des gens heureux dans un paysage enchanteur, on peut faire des écolonomies en achetant une voiture à émission réduite certes, mais une voiture consommant tout de même de l’essence.

C’est ce qu’on appelle en anglais le greenwashing ou encore le blanchiment écologique. C’est un procédé de marketing par lequel on fausse l’opinion publique en offrant une image écologique responsable d’une compagnie qui, bien souvent, met plus d’argent dans le «verdissement» de son image que dans des projets environnementaux.

Que ce soit par des termes (émission faible, développement durable, environnement), des images (animaux en voie de disparition, forêt luxuriante), un changement de nom de la marque, tout est mis en branle pour promouvoir une image verte de l’entreprise : l’écologique est devenu un argument publicitaire, un moyen de faire vendre son produit à la population. Mais comme l’écrit Yves Richard dans L’information d’Affaires Rive-Sud : «Il faut évidemment se méfier, surtout lorsqu’elle [la publicité] provient de secteurs d’activités habitués à figurer en tête des palmarès de l’Inventaire nationale des rejets polluants (INRP).» En effet, une compagnie de pétrole reste et restera toujours une compagnie de pétrole. Et aux dernières nouvelles, ce n’était pas ce genre de compagnie qui offrait le plus de fonds pour les causes environnementales…

Le phénomène de greenwashing est présent pratiquement partout et, particulièrement, dans les publicités comme il est mentionné plus haut. En France, le Bureau de Vérification de la Publicité a surveillé près de 250 publicités : résultats, 70 % de ces publicités devaient être modifiées et neuf d’entre elles furent abandonnées. On les accusait de diffuser une fausse image, de faux sous-entendus concernant l’environnement; bref, du greenwashing.

Même s’il n’existe pas de statistiques précises concernant le Canada, une visite sur le site des normes canadiennes de la publicité nous permet de voir que les dénonciations des publicités faussement écologiques sont à la hausse. De plus, l’Association canadienne de normalisation vient tout juste de publier un recueil des déclarations environnementales en publicité que l’on peut consulter sur le site du Bureau de la concurrence dans la section «Publications» des entreprises [www.bureaudelaconcurence.gc.ca]. On y retrouve les règles concernant les lois, normes et autres déclarations.

Il faut malgré tout être vigilant face aux messages publicitaires qui nous bombardent chaque jour que ce soit sur la route, à la radio, la télévision ou dans le journal; les compagnies sont prêtes à se rendre loin pour nous faire consommer de leurs produits. Attention, cependant, ce ne sont pas toutes les compagnies qui faussent leurs images, loin de là. Les compagnies réellement consciencieuses de l’environnement existent et ce sont souvent elles que l’on voit le moins souvent dans les publicités.

De plus, faire l’achat d’un produit 100 % équitable, biologique et écologique est plutôt ardu : qui dit vrai et qui dit faux là-dedans? Il faut tenir compte de plusieurs autres facteurs : les fruits biologiques par exemple, certains nous proviennent des États-Unis, mais leur transport a apporté la dépense d’énergie polluante, le bambou est à la mode pour remplacer les fibres synthétiques, mais entraîne la coupe de forêts entières et prive ainsi plusieurs animaux de leur habitat. À travers ce dédale d’informations et de désinformations, le choix est entre nos mains, nous, consommateurs. À nous de faire les choix qui nous semblent les plus éclairés, à nous de choisir de faire confiance à une compagnie plutôt qu’une autre, car il ne faut pas oublier que sans les consommateurs que nous sommes, que seraient ces compagnies? Si son public demande du «vert» et du vrai, elle n’aura pas vraiment autre choix que de suivre la vague ou de sombrer.