Labonté présente son projet pour la rue Notre-Dame

Écrit par Patrice-Hans Perrier, La Grande Époque - Montréal
18.06.2008
  • Dessin du boulevard urbain envisagé sur la rue Notre-Dame(攝影: / 大紀元)

Décidemment, la thématique des transports en commun gagne en popularité à l’orée d’une saison estivale qui augure bien des rebondissements. Le comité exécutif de la Ville de Montréal vient tout juste d’adopter la version finale de son fameux Plan de transport et, déjà, les partis d’opposition sautent dans l’arène pour proposer des alternatives. C’est ce que le maire de l’arrondissement Ville-Marie vient de faire en présentant son projet intitulé Rives nouvelles.

Benoît Labonté a frappé un grand coup, le mercredi 11 juin, en présentant un projet de mise en valeur des rives du Saint-Laurent, dans le cadre de la modernisation de la rue Notre-Dame. Rives nouvelles, vise expressément à faire en sorte qu’une portion significative de l’autoroute Ville-Marie soit aménagée en tranchée et recouverte d’une immense dalle tout au long d’un parcours d’environ 3 kilomètres. Chemin faisant, les instigateurs du projet proposent que les activités de triage ferroviaire soient déplacées à l’est de la gare Hochelaga.

Ainsi, les citoyens de l’arrondissement Ville-Marie auraient accès aux berges du fleuve Saint-Laurent et une partie de la trame d’origine pourrait être raccommodée.

Toutefois, dans un contexte où Montréal tente de négocier un nouveau pacte fiscal avec le gouvernement du Québec, plusieurs se demandent comment Benoît Labonté s’y prendrait pour financer un projet qui s’annonce beaucoup plus onéreux que celui qui est dans les cartons du ministère des Transports du Québec (MTQ). En effet, le recouvrement d’un tronçon important de l’artère autoroutière et l’aménagement d’un boulevard de quatre voies en surface comporteraient des coûts supplémentaires qui pourraient multiplier par deux l’ardoise anticipée pour la modernisation de la rue Notre-Dame.

Bataille de chiffres

Le chef du parti Projet Montréal n’a pas mis beaucoup de temps à manifester son désaccord face à un projet qu’il juge ambivalent. Rappelant, d’entrée de jeu, que «l’investissement dans ladite autoroute grimperait d’un bon 500 millions de dollars, propulsant son coût à 1,25 milliard de dollars», Richard Bergeron estime qu’il s’agit d’«un projet qui ménage la chèvre et le chou». N’appréciant pas que l’équipe de Benoît Labonté fasse du surf sur ses propres idées, cet urbaniste de formation nous rappelle que l’aménagement des berges du Saint-Laurent est indissociable d’une transformation de la rue Notre-Dame en véritable boulevard urbain. Poursuivant sur sa lancée, le chef de Projet Montréal estime que Labonté «propose de construire l’autoroute Notre-Dame Est, mais en lui donnant la forme d’une autoroute en tranchée, façon Décarie [une autre artère controversée], qui serait ensuite recouverte sur toute sa longueur».

Philippe Côté, un des piliers de Projet Montréal et un membre du Groupe en recherche urbaine Hochelaga-Maisonneuve (GRUHM), estime que Benoît Labonté manifeste au moins une réelle compréhension de la problématique de remembrement des anciens faubourgs de l’est avec les berges du fleuve. «Toutefois, argue-t-il, ce projet ne mentionne pas clairement où seront situées les entrées et les sorties qui permettront aux nouveaux résidents de se connecter à l’autoroute… ce qui nous ramène à la case de départ en ce qui a trait à la problématique de la circulation de transit qui affecte le secteur.»

Dans un contexte où les instigateurs du projet Rives nouvelles souhaitent construire entre 8000 et 12 000 nouveaux logements, Philippe Côté estime que l’argent dévolu à la prolongation de l’autoroute Notre-Dame pourrait, tout simplement, être investi dans le transport en commun. N’y allant pas par quatre chemins, il croit que «les 750 millions de dollars annoncés par le MTQ pourraient servir à favoriser la renaissance du tramway à Montréal, tout en permettant de retisser le plus simplement du monde la trame endommagée aux abords de la rue Notre-Dame». À l’instar du chef de Projet Montréal, M. Côté désire que l’on profite de la modernisation de Notre-Dame pour y implanter un tram en site propre, ajoutant qu’«une bande verte séparant l’artère a déjà été aménagée».

Faire les bons choix

Monique Désy Proulx, musicienne et membre de la Coalition pour humaniser la rue Notre-Dame, abonde dans le même sens que les militants du parti Projet Montréal. Elle salue le geste de Benoît Labonté en faveur d’une ouverture sur le fleuve, mais ne comprend pas que l’on veuille toujours augmenter le trafic automobile dans l’est de la métropole. Elle illustre son propos en affirmant que «nous n’avons pas besoin d’une autoroute pour circuler d’un quartier à un autre à l’intérieur de Montréal, c’est un non-sens!». Autrement dit, cette dernière estime que la prolongation de l’autoroute Ville-Marie ne serait pas conforme au développement urbain du centre-ville de Montréal et au redéploiement des anciens faubourgs ouvriers en périphérie.

Toujours est-il que le MTQ entend démarrer les premiers chantiers à l’extrême est de la rue Notre-Dame, dans le secteur de l’échangeur Souligny. Comme tenait à nous rappeler Richard Bergeron, «il ne se passera rien de bien compromettant d’ici la tenue des élections municipales en novembre 2009. La prochaine administration municipale aura donc l’obligation de renégocier une entente avec le MTQ en ce qui concerne la portion du projet qui traverse Ville-Marie». D’ici là, les sympathisants de Projet Montréal auront beau jeu de rappeler que «la capacité du corridor [en terme de circulation] serait supérieure dans le cas d’un boulevard urbain comportant quatre voies et un tramway en site propre [étant protégé des automobiles par une bande verte]», pour reprendre une expression de M. Bergeron.