Anglais | Chinois | Coréen | Français | Allemand | Espagnol | Japonais | Russe | Ukrainien | Hébreu | Roumain | Bulgare | Slovaque | Tchèque | Indonésien | Vietnamien
Faites un don

Haïti: la générosité plus forte que la misère

Écrit par Anite Richard, Frédérique Privat, La Grande Époque - Guadeloupe
21.08.2008
| A-/A+

  • un bus décoré(攝影: / 大紀元)

MON arrivée à Port-au-Prince le jour de la fête du Drapeau est déjà haute en couleurs. L’aéroport est couvert de drapeaux et animé par un orchestre. À la sortie, je retrouve mes amis haïtiens et un trompettiste m’accompagne en jouant jusqu’à la voiture. Là, tous les bagages ont déjà été transportés par des porteurs improvisés. Il faut dire que mon arrivée, en tant qu’Européenne, n’est pas passée inaperçue.

Tout autour du véhicule, des gens attendent un pourboire. Tous ceux qui travaillent y ont droit, y compris le trompettiste. Dans ce pays, tout va vite. Tout bouge très vite. Le changement avec notre façon de vivre est complet. Les gens sont travailleurs mais peu rémunérés. Les Haïtiens aiment beaucoup les Français et tout au long de mes déplacements, ils veulent me protéger. L’insécurité du pays les désole. La police est très présente ainsi que beaucoup de véhicules et chars des Nations unies, des casques bleus.

Tout le monde y met du sien pour faire respecter la sécurité dans ce pays. Sur la route qui mène à la capitale, je découvre une multitude d’autobus décorés et très colorés, c’est magnifique ! Divers messages y sont inscrits, témoignant de la profonde spiritualité de ce peuple. On peut lire sur les bus, les taptap, les motos, les murs de certains bâtiments des mots ou phrases tels que Sincérité, Compassion de Dieu, Patience etc.

Je suis surprise de la densité de la population – Haïti serait peuplé d’environ 9.500.000 habitants – ainsi que de sa débrouillardise : en dépit de la poussière due au mauvais état des routes, on peut voir çà et là des étals où nourritures, vêtements, peintures, vaisselles sont disposés avec application. Afi n de pallier la déshydratation de cette foule qui se déplace sous cette chaleur tropicale, des vendeurs à la criée proposent partout pour quelques gourdes, des berlingots d’eau fraiche. Le cireur de chaussures, cette profession maintenant oubliée sous nos latitudes, est encore très sollicité. En effet, en Haïti, la tenue vestimentaire est culturellement sobre et correcte, quelque soit le niveau social. Les chaussures sont donc toujours bien cirées.

Un exigente pudeur

Parallèlement, mon attention est vite attirée par les panneaux publicitaires, simples et si différents des nôtres: en effet, ici, pas de photos déplacées. C’est ainsi qu’on me raconte qu’il y a eu une fois un panneau publicitaire près de l’aéroport avec une femme presque nue. Les accidents à cet endroit-là se sont tant multipliés à cause de ce panneau que les autorités ont fait retirer l’affiche. Il est donc interdit en Haïti de mettre des panneaux publicitaires contenant des images subversives.

En ce qui concerne les films à la télévision, les scènes choquantes pour les enfants sont recouvertes d’un carré blanc où il est mentionné «scène adulte». Arrivée chez mes amis haïtiens, je constate que l’électricité est une denrée rare (distribuée environ une à deux heures par jour), même dans la capitale! Donc le soir les gens se retrouvent en famille à la bougie la plupart du temps et se détendent en prenant le frais dehors. Le Haïtien est travailleur et partout où je suis passée, je n’ai vu que des gens qui s’entraident.

La joie de vivre malgré l'insécurité

Mais l’insécurité est devenue leur sujet d’inquiétude car les enlèvements contre rançon sont malheureusement fréquents. C’est ce que me raconte cette femme, mère de quatre enfants et épouse d’un haut fonctionnaire exerçant à l’étranger. Elle habite dans un faubourg de la capitale où les maisons, tout confort, rivalisent de beauté et de grandeur. Mais cette insécurité latente les oblige à demeurer confinés dans leur maison…

Et pourtant, ils sont nombreux, les Haïtiens qui souhaitent faire avancer leur patrie en proposant différents types de projets. Par exemple, il y a ce petit groupe de médecins qui a ouvert un centre médical et souhaiterait obtenir des aides permettant aux patients de bénéfi cier de soins gratuits. En effet, la sécurité sociale n’existant pas en Haïti, les soins médicaux deviennent un luxe pour une grande part de la population. Mais les talents sont bien là : peintres, sculpteurs, musiciens tels cet orchestre de compas qui chante la joie de vivre et le respect des valeurs dans un pays qui se bat pour survivre…

D’autant plus qu’Haïti est un pays vaste dont l’entretien du réseau routier laisse à désirer. C’est en partant pour l’Artibonite que j’ai pu le constater. Cette région située à quatre heures de route au nord de Port-au- Prince constitue le grenier à riz du pays. En effet, son caractère agricole est dû à la proximité du plus grand fleuve de l’île aussi nommé l’Artibonite. Les terres plus éloignées du fleuve souffrent du manque d’irrigation et sont donc peu exploitables.

Pour me rendre dans la famille de mes amis qui résident dans le village de Deslande, nous avons alterné différents types de locomotion: après les quatre heures en voiture, les chevaux ont pris le relais dans un chemin à la fois caillouteux et boueux mais bordé d’une magnifi que haie de cactus! Et au bout de trois quarts d’heure, c’est en barque que nous avons traversé l’Artibonite avec les bagages, pendant que les chevaux, montés à cru par des résidents, nageaient jusqu’à l’autre rive. Ensuite, c’était reparti pour trois-quarts d’heure de cheval!

Paysage de rêve

Arrivée dans le village, tous les enfants veulent voir «la dame blanche». Invitée dans l’une des écoles primaires, les enfants de tous âges en uniforme ont été ravis de rencontrer une «étrangère» et l’ont exprimé par des chants de bienvenue en français.

Sur la propriété de mes amis agriculteurs, nous avons partagé d’excellents repas traditionnels issus de leur propre production et cuits au charbon de bois : du riz nappé d’une sauce de haricots rouges et de lalo (feuillage cuit comme les épinards) et accompagné de poulet frit, puis le lendemain, des bananes pesées (spécialité de bananes plantain frites) agrémentées de picklies (salade fine de choux blancs et de carottes râpées) et de grillots (viande de porc grillée).

Là, pas d’eau courante mais un puits pour le nettoyage et des distributions collectives d’eau potable dans le village. Pas de gaspillage non plus, car tout est utilisé et rien n’est perdu : les feuilles de latanier servent à la fabrication de cordes, de paniers, notamment pour charger les chevaux. Le café est frais car produit et torréfié sur place, tout comme le savon qui est produit artisanalement, et faute de réfrigérateur, la viande est salée et séchée au soleil…

Que d’émotions et de richesses au cours de ces deux jours. J’ai rencontré des gens qui en étant proche de la nature, n’ont pas oublié les vraies valeurs de la vie. De retour à Port-au-Prince, je me suis rendue à l’ambassade de France afin de me faire connaître. Ils ont été surpris qu’une Française vienne en Haïti en raison de l’insécurité (on a recensé 25 kidnappings au mois de mai). Ils m’ont recommandé de rester prudente. A l’occasion d’une réunion de quartier, j’ai fait la connaissance du Premier sénateur ouest, un homme très apprécié car proche du peuple. Dans un pays ravagé par l’insécurité, où plus aucun touriste ne vient, j’ai pu découvrir un peuple authentique, sain, travailleur, honnête et généreux qui essaie de surcroît, de donner une bonne éducation aux enfants.

La pauvreté matérielle d’Haïti semble l’avoir enrichie de spiritualité et de générosité de coeur.  

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.