Un accord de paix au Proche-Orient pour fin 2008?

Écrit par Stéphanie Krug, Collaboration spéciale
10.09.2008
  • la ville de Jérusalem (Staff: MARCO LONGARI / 2008 AFP)

Un accord de paix entre Israël et l’Autorité palestinienne est-il probable avant la fin de l’année ? Rien n’est moins sûr. Dans l’état actuel des choses, malgré les propositions du camp israélien, le contexte particulièrement volatile incite à la prudence. En effet, si l’on se réfère à l’entourage de Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, le premier ministre israélien Ehud Olmert n’est plus en état d’être un véritable partenaire dans le processus de paix.

Les négociations au Proche-Orient sont particulièrement chaotiques en raison d'une double instabilité politique en Israël et du côté palestinien. Ehud Olmert, affaibli par une série d'enquêtes sur des affaires de corruption, est sur le bord de la porte, et les primaires du 17 septembre prochain vont désigner un remplaçant. Tzipi Livni, ministre des Affaires étrangères, semble en bonne posture pour prendre sa place. Du côté palestinien, Mahmoud Abbas s’efforce de contrer la division palestinienne en stoppant l’avancée du Hamas à Gaza, tout en maintenant le pouvoir de l’Autorité palestinienne en Cisjordanie.

Toutefois, malgré ce contexte politique des plus précaires, le président américain George W. Bush souhaite la tenue d’une conférence internationale cet automne qui réunira Israël, les Palestiniens et des pays arabes, selon le journal Haaretz. Cette conférence sera présidée par Condoleezza Rice, la secrétaire d’État américaine, dans le but d’œuvrer dans le sens de la création d’un État palestinien.

Bush, dans une allocution du 2 septembre dédiée au Proche-Orient, a appelé les Palestiniens à choisir entre «un avenir d’honnêteté et d’espoir», promu par l’Autorité palestinienne qui se veut pacifiste, en discréditant le Hamas dont la vision se résume, selon ses mots, à «un avenir de terrorisme et de mort». «Avec les bases appropriées, nous pourrons entamer prochainement des négociations sérieuses en vue de la création d’un État palestinien», a déclaré le président américain, en insistant pour que les frontières soient fixées sur la base «des frontières passées et de la réalité présente, avec des corrections effectuées d’un commun accord».

Bush a émis une double exigence qui concerne à la fois le camp palestinien et israélien. Il a demandé aux Palestiniens qu’ils mettent un sérieux frein aux menaces terroristes provenant des extrémistes, qu’ils soient en mesure de démanteler les réseaux de terroristes et qu’ils retirent toutes les armes illégales de Gaza et d’ailleurs, en promettant de cesser les attaques frontales contre Israël. Il a souhaité en outre qu’ils daignent accorder la libération de Gilad Shalit qui a été fait prisonnier par des militants palestiniens le 25 juin 2006. Il a exigé par ailleurs qu’Israël continue l’action des transferts de fonds envoyés à l’Autorité palestinienne, que l’État juif soit disposé à cesser l’extension des colonies dans les territoires palestiniens et qu’il accepte de limiter sa présence en Cisjordanie.

Mme Livni, favorite pour succéder à M. Olmert et prendre la tête du parti Kadima (centre droit), parle pour sa part de prudence et ne souhaite pas de conclusions trop rapides en ce qui concerne l’accord de paix.

Pour la première fois depuis 40 ans, c’est une femme qui a toutes les chances d’arriver au pouvoir en Israël, pays dominé par une tradition militaire et religieuse assez sexiste. Cette femme de 50 ans a fait son entrée en politique, il y a neuf ans, et elle était sous la protection de l’ancien premier ministre, Ariel Sharon, après une carrière rapide au Mossad. L'étoile montante de la classe politique israélienne a une personnalité imposante et son entourage voit en elle quelqu’un de droit et de pragmatique qui semble très peu intéressé par les mauvais coups politiques préparés en coulisse.

Le président américain maintient donc un ton ferme et démontre sa constance dans les efforts relatifs au processus de paix, et l’entourage du premier ministre Ehud Olmert semble satisfait : « Il n’y a aucun changement dans la politique américaine. Comme le président l’a souligné, les Palestiniens doivent d’abord combattre le terrorisme et, ensuite seulement, il y aura un processus de paix diplomatique», a déclaré un membre du cabinet d’Ehud Olmert.

D’autres proches du premier ministre veulent plus de signes tangibles et souhaitent surtout que ces propos trouvent un écho sur le terrain : «Nous sommes tout à fait d’accord avec la vision du président Bush et, effectivement, le moment est venu de démanteler des colonies sauvages», ont-ils affirmé.

George W. Bush et Condoleezza Rice sont résolus à parvenir à un accord de paix d’ici la fin de l’année, comme ils l’avaient annoncé à la conférence d’Annapolis aux États-Unis l’an dernier.

Pourtant, malgré les décisions américaines, l’accord de paix semble encore une fois menacé par la question de Jérusalem. En effet, Israël ne se résout pas à accorder aux Palestiniens Jérusalem-Est comme leur capitale alors que ces derniers ne démordent pas.

Le statut de Jérusalem-Est, notamment le destin de la vieille ville qui réunit les lieux saints juifs, chrétiens et musulmans, a déjà fait trébucher à maintes reprises les pourparlers israélo-palestiniens.

Olmert est partant pour un accord de paix excluant Jérusalem, mais le camp palestinien le rejette. Israël détient la partie orientale de la ville après son occupation en juin 1967, alors que les Palestiniens veulent en faire la capitale de leur futur État. Près de 250 000 Palestiniens vivent dans la partie orientale de la ville alors que 200 000 Israéliens ont pris résidence depuis 1967 sur ce territoire qu’ils n’ont cessé de coloniser en implantant une douzaine de quartiers juifs.

«Les deux parties sont désireuses de parvenir à un accord global d'ici la fin 2008 et croient que c'est possible», a déclaré un haut responsable israélien qui a requis l'anonymat. «Mais puisqu'il est impossible de trouver un règlement sur la question de Jérusalem dans ce délai, elles doivent s'entendre pour repousser un accord sur cette question et convenir d'un mécanisme et d'un calendrier pour Jérusalem», a-t-il ajouté.

«Sans Jérusalem-Est comme capitale d'un État palestinien, quel serait le sens d'un accord?», a répliqué l'un des principaux négociateurs palestiniens, Saëb Erekat. «Nous ne serons pas partie prenante d'un accord intérimaire ou d'un accord partiel ou d'un accord qui repousserait à plus tard Jérusalem», a souligné M. Erekat, lors d'une conférence de presse à Ramallah, en Cisjordanie. Ce dernier a renforcé son propos en affirmant qu’il était impératif qu’Israël gèle les futurs plans de colonisation. Il a de surcroît annoncé que les «négociations continueraient» le temps qu'il faudrait pour parvenir à un règlement «qui mettrait un terme à l'occupation» israélienne.

Selon la radio publique, M. Olmert voudrait parvenir à un «accord-cadre» qui serait présenté aux côtés de Mahmoud Abbas à la Maison-Blanche le mois prochain, sans craindre de laisser dans le vague les points litigieux qui séparent les deux camps. Les Palestiniens, en revanche, réclament un accord des plus explicites et des plus détaillés.