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Le Canada dans le monde

Écrit par Antoine Latour, La Grande Époque - Montréal
23.09.2008
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  • George W. Bush (centre), Stephen Harper (droite) et le dirigeant chinois, Hu Jintao, suit derrière.(Stringer: AFP / 2008 AFP)

Élections 2008 - La politique étrangère deviendra-t-elle un enjeu de campagne?

Plus de deux semaines après le début de l’actuelle campagne électorale, les questions de politique étrangère n’ont pas encore fait l’objet de débats. La question du rôle du Canada en Afghanistan a pointé son nez, mais il n’y a, semble-t-il, pas assez de viande pour attaquer les conservateurs. Peut-être y aura-t-il une petite controverse si on publie le rapport sur le coût de cette guerre, mais le Parti libéral, principal compétiteur du Parti conservateur, a donné sa bénédiction au prolongement de la mission jusqu’en 2011. L’Afghanistan n’est cependant qu’un morceau du casse-tête international. Et les différents partis prétendent tous avoir la manière idéale de le résoudre, ou au moins d’y insérer proprement la pièce canadienne.

Considérant les questions chaudes comme les relations canado-américaines, la position canadienne face à Israël et la Palestine, les relations avec la Chine, l’implication au sein des institutions internationales, l’aide au développement, etc., la relégation de la politique étrangère au statut de non-enjeu empêche les partis de s’affronter dans un champ où les idées s’imposent.

Qu’ont-ils à proposer, ces partis? Comment se distinguent-ils? Et quelles pourraient être les questions les plus épineuses pour le prochain gouvernement?

Lorsque le dernier gouvernement conservateur a pris les rênes à Ottawa en 2006, le Parti libéral bravait les États-Unis sur la question du bois d’œuvre et menaçait que le Canada n’avait pas tant besoin de son voisin en raison de l’émergence de la Chine et de l’Inde.

L’amélioration des relations avec les États-Unis a été une priorité pour le nouveau premier ministre Stephen Harper, si bien que ses détracteurs ont vite dénoncé un rapprochement trop étroit. Ce rapprochement est évident sur des questions comme Kyoto, le conflit israélo-palestinien et une approche internationale plus agressive.

Dans un discours en 2007, Harper avait décrit avec une métaphore sa compréhension des relations canado-américaines : «Pour qualifier la relation, l’un de mes prédécesseurs utilisait la métaphore de la souris qui dort près de l’éléphant. J’ai toujours trouvé que cette comparaison ne rendait pas justice au Canada. La métaphore de l’ours grizzli et du carcajou serait plus juste. Nous sommes peut-être plus petits, mais non moins farouchement déterminés à protéger notre territoire.»

Cette attitude plus assurée a permis de «redonner au Canada une place plus importante dans le monde», estime le stratège conservateur Mike Storeshaw dans la revue Embassy. Selon lui, l’influence canadienne a diminué sous les gouvernements libéraux. «Leurs positions manquaient trop souvent de principes», poursuit-il.

Selon le stratège libéral Michael Gendron, également interviewé par Embassy, «il est juste de dire que la politique étrangère est un domaine où vous verrez les plus grandes différences entre l’actuel gouvernement conservateur et le prochain gouvernement libéral».

«Malheureusement, nous avons vu les conservateurs mettre en pratique des politiques qui ont affaibli le ministère des Affaires étrangères, au détriment de la politique étrangère du pays», estime M. Gendron. «Nous allons rapidement renverser ces décisions, particulièrement en ouvrant de nouveau les consulats à Milan, Saint-Pétersbourg, Fukuoka et Osaka.»

Comparées à d’autres enjeux, les questions consulaires ont une importance contestable. Sur les relations Canada-Chine par contre, les divergences entre libéraux et conservateurs sautent aux yeux. Ce fut une pomme de discorde constante durant les deux années au pouvoir de Harper.

À ce titre, le journal en langue chinoise Ming Pao a indiqué que Stéphane Dion avait déclaré, lors d’un passage à Vancouver en début de campagne, que la restauration des relations avec Pékin était pour son parti une priorité. Dion souhaiterait rapidement aller en Chine et inviter le dirigeant chinois au Canada.

Les libéraux, tout comme le régime communiste chinois, n’apprécient guère les sorties publiques de Stephen Harper en faveur des droits de l’Homme et ont eu horreur de sa rencontre avec le Dalaï-lama et son absence aux Jeux olympiques de Pékin. Les libéraux jugent que leur approche d’«engagement» et de dialogue est plus efficace pour intégrer la Chine à la communauté internationale et faire d’elle un acteur responsable.

Cette position est souvent critiquée comme étant motivée uniquement par les intérêts économiques, car ceux qui se font les plus bruyants à son sujet sont accusés d’entretenir des liens questionnables avec certains groupes financiers ayant des relations avec le régime chinois. Bob Rae, qui était critique libéral en matière de politique étrangère lors du dernier Parlement, avait attaqué de front l’approche des conservateurs face à la Chine. Peut-être une mésentente strictement politique, mais le commentateur Kelly McParland du National Post souligne que le frère de Bob Rae, John Rae, est vice-président exécutif de Power Corporation, un partenaire financier de l’État chinois.

L’ex-premier ministre Jean Chrétien a aussi fustigé publiquement Stephen Harper de ruiner le travail de rapprochement qu’il avait fait avec la Chine. Chrétien admet avoir des liens personnels avec l’ex-dirigeant chinois Jiang Zemin.

Outre la question chinoise et américaine, l’approche à adopter à l’égard de la Russie sera également très importante à déterminer pour le prochain gouvernement. Avec les problèmes des dernières semaines, les raisons apparaissent évidentes.

Face à la Russie, les libéraux semblent adopter une approche moins conciliante qu’avec la Chine. Le 18 août, Bob Rae avait publié un communiqué exhortant les conservateurs à établir une ambassade en Géorgie. «Si la Russie est capable de se tirer de cette invasion et de la destruction de la vie et de la propriété sans conséquences, aucune des petites républiques de la région n’est en sécurité», avait-il déclaré.

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À l’extérieur de son «espace vital», la Russie renforce aussi sa présence sur le continent américain, notamment au Venezuela. Mais c’est son affirmation dans l’Arctique qui pose un problème plus immédiat pour le Canada. Le président russe, Dmitri Medvedev, a annoncé la semaine dernière que marquer son territoire dans la région était une priorité stratégique.

Le Canada sous les conservateurs a fait de la souveraineté un cheval de bataille, mais au rythme auquel l’ours russe prend de l’ampleur et s’affirme, de gros doutes sur les capacités du carcajou émergent.

Le rôle «traditionnel»

En matière de politique étrangère, les trois autres partis d’importance proposent tous en quelque sorte de revenir au rôle «traditionnel» du Canada sur la scène internationale, qu’ils expliquent par un engagement en faveur du multilatéralisme, par des missions de paix plutôt que de combat et par un plus grand souci accordé à la réduction de la pauvreté dans le monde.

Selon Marc-André Viau, responsable des communications du NPD au Québec, «des générations de Canadiens travaillent en vue de bâtir un monde plus juste, plus généreux et plus pacifique. Or, des premiers ministres successifs ont tourné le dos à cette tradition en laissant tomber les engagements du Canada envers la paix et la justice dans le monde».

Le NPD estime que «Stephen Harper a éloigné le Canada de notre tradition multilatérale, fondée sur la paix, en faveur de l’unilatéralisme belliqueux de George W. Bush. La majorité des Canadiens rejettent cette approche».

Ce qu’il propose grosso modo : retrait immédiat des troupes de combat d’Afghanistan, opposition au plan de défense antimissile américain, amélioration de l’aide internationale en focalisant sur la réduction de la pauvreté et amélioration des droits de l’Homme ainsi que pression pour mettre fin au génocide du Darfour.

Au Bloc québécois, même si cette formation se donne pour mission de défendre les intérêts du Québec à Ottawa, la politique étrangère est quand même prise en compte. Paul Crête, porte-parole du Bloc en matière d’Affaires étrangères et candidat dans Montmagny-L'Islet-Kamouraska-Rivière-du-Loup, donne les grandes lignes de son parti en la matière :

«Le Bloc québécois a toujours défendu une position responsable et rigoureuse quant à la mission canadienne en Afghanistan. Depuis un an, nous exigeons que la présente mission canadienne dans la FIAS [Force internationale d’assistance à la sécurité] prenne fin en février 2009 afin de s’investir davantage dans le développement et la poursuite de solutions diplomatiques. Or, en votant pour le prolongement de la mission jusqu’en 2011, les libéraux et les conservateurs ont démontré qu’ils sont à l’opposé de la volonté des Québécois. Cette approche s’insère dans nos principes généraux en Affaires étrangères, soit le respect du droit international et le multilatéralisme comme cadre d’action.»

Au Parti vert, on préconise l’approche dite des trois «D» : désarmement, diplomatie et développement.

Selon Sonia Ziadé, candidate dans Brossard-La Prairie, le Canada doit retrouver son rôle de «leader dans l’établissement de la paix, dans la réduction de la pauvreté et il faut travailler davantage avec l’ONU comme avant».

Selon elle, le prochain gouvernement devrait s’efforcer d’atteindre les objectifs du millénaire de l’ONU, qui préconisent le don d’un pourcentage du PIB pour aider à réduire la pauvreté dans le monde.

Que pense le petit parti des relations avec les trois grandes puissances que sont les États-Unis, la Russie et la Chine?

États-Unis : «Il faut tisser plus de liens avec les États-Unis, mais ajouter des clauses environnementales dans les traités.»

Russie : Sonia Ziadé estime que la Russie peut être une menace, mais il faut privilégier l’approche diplomatique, car «on n’a pas les ressources pour se défendre».

Chine : «La défense des droits de l’Homme passe avant» le commerce.

Plus de 204 720 056 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.