L’Iran en 2009: arme nucléaire et départ de Mahmoud Ahmadinejad?

Écrit par Aurélien Girard, La Grande Époque - Paris
11.01.2009

  • Derrière Mahmoud Ahmadinejad, le Parlement iranien s'organise.(Staff: BEHROUZ MEHRI / 2008 AFP)

L’Iran, qui a fait une nouvelle fois les gros titres en 2008 pour son enrichissement d’uranium à fins très probablement militaires et ses appels à la destruction d’Israël, restera un des sujets chauds de l’actualité internationale en 2009. D’abord parce que si les informations collectées par l’Agence Internationale à l’Énergie Atomique sont correctes, Téhéran aura en 2009 produit suffisamment d’uranium hautement enrichi pour armer sa première arme nucléaire. Ensuite parce que le président Mahmoud Ahmadinejad ne sera probablement plus aux commandes du pays à ce moment là, puisque les élections présidentielles de juin 2009 se présentent difficilement pour lui.

 

Il serait désavoué jusque dans son propre camp, pour son incapacité à lutter contre une inflation galopante de près de 30 % et un chômage qui n’a cessé de croître depuis son élection en 2005. Mahmoud Ahmadinejad aborde donc la course présidentielle en mauvaise posture, et ne peut qu’essayer de se renforcer auprès de la base rurale qui constitue son principal soutien: le 30 décembre, le Président a proposé au Parlement iranien de mettre fin aux aides publiques sur l’essence, le gaz, l’électricité et l’eau qui coûtent 100 milliards de dollars par an à l’état iranien. Cette mesure destinée à faire face à la crise économique est contestée car elle fera mécaniquement augmenter l’inflation. Mais elle donnera à Téhéran un pactole avec lequel Mahmoud Ahmajinejad prévoit de créer de nouvelles aides pour les populations rurales.

 

Conservateurs divisés

Au sein du Parlement iranien, le Majlis, les adversaires du président iraniens fourbissent leurs armes. Les réformateurs sont aujourd’hui plus nombreux, et si l’écrasante majorité du Majlis est constituée de conservateurs partisans d’un Iran militairement fort, la fronde anti-Ahmadinejad met en position de présidentiable le maire de Téhéran, Mohammad Bagher Qalibaf, ainsi qu’Ali Larijani, ancien chef des négociateurs sur le nucléaire qui a démissionné de son poste en octobre 2007.

 

Ali Larijani, élu triomphalement avec 76 % des voix à Qom, ville sainte et hautement symbolique, s’est imposé en août à la tête du Parlement iranien, contre le candidat proposé par M. Ahmadinejad. Issu d’une famille d’Ayatollahs, Larijani est un des deux représentants du guide suprême Khameini au conseil et a montré une stature internationale lors des négociations sur le dossier du nucléaire, ce qui ne peut déplaire à l’opinion.

 

Bagher Qalibaf, ancien militaire membre des gardiens de la révolution, est responsable de la répression des mouvements étudiants en 1999 et 2005 mais a malgré tout su se créer une image de modernisme en tant que maire de Téhéran, et proposer – au moins formellement -de nouvelles formes de dialogue avec l’Occident.

 

Faibles perspectives d’assouplissement

Le scrutin législatif de mars 2008 en Iran a été riche d’enseignements sur l’affaiblissement du camp Ahmadinejad, qui n’a obtenu que 15 % des sièges, et en même temps sur le soutien massif des iraniens à une politique étrangère extrêmement ferme et sans compromis quant au droit du pays à enrichir de l’uranium.

 

À six mois du scrutin présidentiel, les courants conservateurs de Larijani et Qalibaf, bien que minoritaires, pourraient de façon opportuniste choisir de construire des alliances avec les réformateurs de M. Khatami afin d’empêcher une nouvelle candidature du Président Ahmadinejad. Les différents analystes qui se sont exprimés sur le sujet, comme Igor Safavi de l’IPRIS, envisagent également un duel direct Qalibaf – Ahmadinejad, sans exclure un possible retour gagnant de M. Khatami, président iranien de 1997 à 2005.

 

Pointant sur les contacts initiés par le Congrès américain auprès du Majlis et à la réponse positive qu’y aurait donnée Ali Larijani, M. Safavi s’interroge sur la possibilité que l’assouplissement espéré des relations irano-américaines ne commence par la voie détournée du dialogue entre parlementaires, quand même les parlementaires iraniens ne sont qu’un «alibi démocratique» dépourvus de tout pouvoir réel dans les affaires étrangères iraniennes. L’année 2009 départagera les hypothèses.