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Réflexions et perspectives sur l’année 2008 du cinéma

Écrit par Alain Penso
12.01.2009
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  • Le bal des vampires de Roman Polanski(攝影: / 大紀元)

L’année 2008 a pris fin. De quel film va-t-on se souvenir? Lequel fera partie des pierres de notre mémoire cinématographique? L’action primera-t-elle sur la connaissance, ou bien l’émotion se montrera-t-elle plus exigeante que la réflexion? Doit-on faire une part toujours aussi belle aux classiques au risque de se faire traiter de passéiste ou de rétrograde? La nouveauté, les progrès de l’esthétique sont-ils des facteurs d’avancée de la dramaturgie cinématographique? L’émotion en cinérama, est-ce pour aujourd’hui ou pour demain? On vient de découvrir que le cinéma rallongeait la vie: chaque film visionné est un coup de temps en arrière... Une preuve, Manoel de Oliveira qui vient d’avoir cent ans le 11 décembre a réalisé Christophe Colomb, l’énigme, une belle réussite. Bon anniversaire monsieur Oliveira! Profitons-en pour souhaiter un bon anniversaire également à Claude Lévi-Strauss né le 28 novembre 1908, notre philosophe auteur du célèbre ouvrage Tristes tropiques dont on peut voir la biographie filmée de Pierre Beuchot. La philosophie serait-elle un remède de l’âme pour atteindre en pleine santé les cent ans?

I feel Good

I feel Good de Stephen Walker – titre d’un standard de James Brown – est un documentaire qui méticuleusement, rapporte les répétitions d’une chorale, Young @ Heart, formée en 1982 à l’initiative de Bob Climan constitué de chanteuses et chanteurs de plus de soixante-dix ans. Ces personnes âgées dont l’aînée a quatre-vingt-six ans interprètent après de nombreuses répétitions des chansons de Clash, de Ramones ou de James Brown et même de Bob Dylan. Ils font de toutes ces œuvres leur miel apprécié dans le monde entier qu’ils parcourent au pas de course, tant la passion les tient.

 

Le film a été tourné en 2006 au moment où Bob Climan ajoute quelques titres au répertoire du groupe Young @ Heart. La voix dynamique mais douce du réalisateur amène une nouvelle dimension narrative. Le film n’est pas du tout l’enregistrement de concerts, mais une perception de moments de grâce où la vie se montre à l’écran, avec ses faiblesses et surtout le panache de personnages que l’existence a gâté de pouvoir rencontrer des joies qu’ils veulent partager. Accompagnés de musiciens professionnels, les chanteurs tentent de s’approprier des titres de rock dont le magnifique Forever Young de Bob Dylan.

 

Les voix voilées chevrotantes des solistes de Young @ Heart donnent une dimension de surréalisme défiant presque les lois des équilibres naturels. Elles défient la mort qui ne les effraie nullement. Deux de leurs camarades meurent pendant le film après avoir recommandé au groupe de continuer à se produire sur scène et d’être plus fort que jamais pour continuer par tous les moyens à chanter pour porter la vie. L’une des solistes de quatre-vingt-dix ans pose la question Should I Stay or Should I Go?, ce qui évidemment ne raisonne pas de la même façon chez un jeune de 30 ans.

 

I Feel Good donne un espoir sur l’avenir de notre vie face à notre destin. Immuable est notre fin. Pourtant celle-ci peut être envisagée en beauté, sans pour cela s’en remettre au diable (La beauté du diable de René Clair, 1950) comme dans Buena Vista Social Club (1998), où Ry Corder retourne à Cuba pour enregistrer un disque avec Ibrahim Ferrer, accompagnés de musiciens très âgés, mais si jeunes dans l’esprit. Wim Wenders, complice des Ry Corder depuis Paris Texas construira avec eux un film où l’on apprend que le vieil âge, loin d’être un obstacle à la création, amène même une dimension jusque-là souverainement ignorée.

 

Les plages d’Agnès

Après Les glaneurs et la glaneuse, Agnès Varda, d’un âge certain – elle a 80 ans – ne veut surtout pas passer à côté de l’histoire de sa vie. Son film, à la fois savoureux et égocentriste, joue parfois l’élitisme: elle est allée écouter Bachelard, inviter Jim Morrison, a fait la connaissance d’Andy Warhol. Elle part à Hollywood, tourne un film – Lion’s Love. Les meilleurs moments sont lorsque l’authenticité ressort de ses images. Agnès Varda parle de la «Nouvelle vague» et fait rêver par la simplicité de la création de ce mouvement par le producteur Georges Beauregard qui a permis le tournage de À bout de souffle (1960) de Jean-Luc Godard, Lola (1962) de Jacques Demy, Léon Morin, prêtre (1961) de Jean-Pierre Melville et bien sûr Cléo de 5 à 7 (1962) d’Agnès Varda qui choisit de tourner un film en temps réel: une jeune femme croit être atteinte du cancer à 17 heures. Elle n’obtiendra les résultats de ses analyses qu’à 19 heures. Elle erre dans Paris pendant ces heures de non-sens et d’interrogation sur sa future vie.

 

Les plages d’Agnès est une sorte de manuel théorique sur la création. Le film est savoureux mais les recettes ne concernent que l’auteur. Il reste à s’en inspirer pour essayer d’approcher sa création.

Le retour du cinéma politique

Le cinéma politique, abandonné depuis quelque temps, revient avec Il Divo, de Paolo Sorrentino, un film d’une force et d’une intensité étonnantes. Le genre n’est pas très apprécié des producteurs. Cela fâche, dit-on, et transporte une mauvaise ambiance. Le souffre n’est pas apprécié dans le cinéma institutionnel surtout lorsqu’il traite d’hommes politiques encore vivants. En Italie, c’est lié à la situation conflictuelle de l’État avec ses administrés déçus des promesses qui avaient été faites d’améliorer leur vie d’être humain, laissée à volo jusque-là. Le cinéma politique italien est le plus vivant et le plus efficace de toutes les cinématographies mondiales. La mafia a profité des ratés de l’administration pour former une hydre redoutable dans tout le pays et constituer, non pas un contre pouvoir mais un empire, ne profitant qu’à quelques-uns, une nouvelle classe basée sur le crime.

 

En 1963, dans Main basse sur la ville, Francesco Rosi décrit la mafia, cette calamité qui atteint les centres nerveux de l’État et se propage jusque dans les aides sociales détournées, privant une partie de la population de logement. Dans Buongiorno notte (2003) de Marco Bellochio, par les yeux de Chiara, jeune terroriste engagée dans une lutte armée impliquée dans l’enlèvement d’Aldo Moro, se dessine la complexité de cette période de «plombs» et cette foi aveugle en la révolution et dans ses rituels criminels. Avec Il Divo, les documents réels et la succession de scènes de tribunaux, de photographies, d’éléments biographiques confèrent au film une sorte de non-fiction.

 

Croyance et justice au pays du cinéma

Le fonctionnement d’un État dépend évidemment de sa justice. Les structures sont souvent attaquées par des groupes pour affaiblir le pouvoir, sans compter la corruption, sans cesse combattue par les institutions. Dans certaines affaires, pour redorer leur blason, certains magistrats n’hésitent pas à faire payer à des individus des délits qui auraient pu trouver des solutions raisonnables. L’affaire Roman Polanski qui date de 1977 n’est toujours pas résolue. C’est le sujet du documentaire Wanted and Desired de Marina Zenovich qui, en exhumant des documents de l’époque et en les faisant coïncider en contrepoint avec des témoignages, parvient à faire douter de l’objectivité de la justice américaine. Il y a là de l’ironie, cette justice basée sur des négociations incessantes dont les résultats dépendent de l’honnêteté des magistrats.

 

En 1977, Roman Polanski fait l’objet d’une plainte pour viol sur la mineure Samantha Geimer âgée de 13 ans. Il est accusé de ce forfait après l’avoir droguée au cours d’une séance de photos pour Vogue Homme. Ces photos avaient été prises dans la maison de Jacques Nicholson alors absent.

 

Roman Polanski, âgé de 43 ans, n’a aucun intérêt à gâcher sa carrière d’artiste par des agissements inconsidérés. Trois ans auparavant, Roman Polanski avait tourné Chinatown qui obtient l’un des plus gros succès critique de sa carrière. Les entrées lui permettent d’entreprendre le film de son choix. Il a le vent en poupe. Tout au long de sa vie, Roman Polanski a été poursuivi par des démons intraitables. D’abord son enfance assassinée : il est rescapé du ghetto de Cracovie, près du camp d’Auschwitz, où ont été déportés ses parents. Sa mère est assassinée alors que son père réapparaîtra miraculeusement après la guerre. Né à Paris, en 1933, il est emmené enfant en Pologne par ses parents où il fait ses études en 1962 à la prestigieuse école de cinéma de Lodz.

 

Roman Polanski essaiera sa vie durant de compenser la carence d’affection de son enfance et tentera d’évacuer la terreur produite par l’enlèvement de ses parents par les bourreaux nazis. Tous ses films contiendront les thèmes dualistes amour-terreur.

 

Dans la vie de Polanski, les larmes et l’amour ne sont que des récurrences presque naturelles qui empoisonnent sa vie. Il souhaitait y mettre un terme. Pourtant en 1969, Manson assassine sa femme Sharon Tate avec laquelle Polanski avait tourné Le bal des vampires. C’est un gros succès que l’on ne lui pardonnera pas. Les puritains auraient aimé que Polanski soit crucifié jusqu’à la fin de ses jours pleurant sa femme défunte. Mais tout un chacun ne réagit pas de la même façon au cours d’une telle épreuve. Il le dit lui-même. Polanski choisit de sortir avec une belle femme trois mois après la mort de sa femme et se laisse même prendre en photo. La presse se déchaîne. Pendant le procès de la jeune Samantha Geimer, prétendument agressée, a lieu un lynchage médiatique. Son avocat, payé à prix d’or, réussit à négocier, comme c’est l’usage dans la justice américaine, et réussit à refaire classer l’affaire. Détournement de mineur. Polanski accepte le compromis en plaidant coupable sur cette base, mais voilà qu’après 42 jours de prisons, le juge Rittenband se sentant héros d’un feuilleton veut le faire durer en revenant sur ses accords. Un an plus tard Polanski prend un vol pour Paris pour ne plus jamais fouler le sol américain. En 2003, alors qu’il est récompensé par un Oscar décerné par Hollywood pour Le pianiste, il ne s’y rend pas. Le magistrat Rittenband est mort en 1993 sans avoir apporté de pièces nouvelles à l’affaire. Polanski a certainement versé des sommes importantes à la « victime » mais rien ne l’indique dans le film.

 

En définitive, le Maria Zenovich parle plus du fonctionnement de la justice américaine que du fond de l’affaire. Pourquoi ne voit-on jamais la mère de Samantha Geimer qui a dû porter plainte? je ne puis m’empêcher une remarque pourquoi cette mère si dévouée peut porter plainte contre Polanski traité de Noceur et d’autres qualificatifs qui auraient fait trembler n’importe qu’elle mère. Comment a-t-elle pu laisser sa fille se faire photographier par Polanski? N’est-ce-pas là un piège, qui pouvait lui rapporter de l’argent pour une plainte fallacieuse? L’absence de la mère dans le film produit un certain malaise. Tout comme l’absence dommageable de Polanski.

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.