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Et s’il fallait contexter le film: le dater pour mieux le comprendre?

Écrit par Alain Penso
13.12.2009
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  • (攝影: / 大紀元)

Dater un film un jeu intellectuel

La datation des films est un jeu intellectuel qui interroge l’histoire ainsi que d’autres disciplines, esthétique, éthique. Elle permet de se replonger dans le cinéma d’hier et d’aujourd’hui en parcourant des mouvements cinématographiques et des champs créatifs immenses.

Comment peut-on situer un film qui n’aurait aucune indication sur son origine? Henri Langlois, a créé la Cinémathèque française. Il a commencé par entreposer les bobines des films en mauvais état dans sa baignoire par manque de place, souvent avec des étiquettes mal rédigées ou illisibles. Il a fait des projections pour tenter de mettre une origine à ces films. Il a essayé dans un premier temps de découvrir leur nationalité, puis l’année de production, enfin le réalisateur, lorsque l’œuvre ne comportait pas de générique.

 

Le procédé technique de l’image peut contexter un film

Pour se faire une idée précise de l’œuvre, la première chose à faire est de voir le film et de procéder à une analyse technique. En quel format est-il: en 16mm, en 35mm, en cinémascope, en 70mm?

 

Le film est-il en noir et blanc ou en couleur sachant qu’il existe plusieurs procédés. Le Chronochrome a été mis au point par Léon Gaumont en1913. Puis les frères Roux en1930 ont tenté de mettre au point un procédé en quadrichromie initié par Gaumont. Le procédé Rouxcolor est né. Il a été utilisé pour: «La Belle meunière» en 1948 par Marcel Pagnol .Le système Keller-Dorian Berthon, repris par Thomsoncolor, sera utilisé par Jacques Tati en 1947 pour tourner: «Jour de fête». Le réalisateur de: «Les Vacances de Monsieur Hulot» ne pourra pas projeter son film en couleur, heureusement qu’il avait pris la précaution de le tourner en même temps en noir et blanc. Frustré par l’impossibilité de le projeter en couleur, Jacques Tati a fait de: «Jour de fête» en noir et blanc une version au pochoir.

 

Le technicolor, un souvenir du temps du vrai cinéma

Le fameux technicolor avait déjà été inventé en 1915, puis perfectionné avec cette esthétique remarquable en 1932.

 

En 1945, Gene Tierney tourne dans: «Pêché Mortel» de John Sthal, un film en technicolor, procédé où le spectre est entièrement ouvert, le bleu apparaît donnant une représentation dramaturgique plus riche. Il en résulte une œuvre nantie d’une esthétique exceptionnelle. La dramaturgie grâce aux couleurs enchanteresses, construit un univers paradisiaque qui contribue à l’image sensuelle et fatale que véhiculera l’actrice Gene Tierney tout au long de sa carrière.

 

Le son un repère dans le temps non négligeable

Il faut noter que le son au cinéma a été inventé bien avant 1927 et avec: «Le chanteur de Jazz». Léon Gaumont dès 1910 avait mis au point un disque parfaitement synchronisé à l’image.

 

De Napoléon Bonaparte à Jurassic Parc

A chaque étape le son est amélioré à partir du son standard. Dès 1931, le son multicanal apparaît, inventé par Alan Blumlein. Abel Gance en 1935 utilise ce système sonore pour diffuser plusieurs sons pour son: «Napoléon Bonaparte». Différents systèmes techniques vont se succéder, améliorant notablement l’environnement sonore par exemple avec le Dolby. Le Dolby stéréo est entendu pour la première fois dans: «Star Wars  (1977)» de George Lucas. Jean-Paul Rappeneau avec: «Cyrano  (1990)» utilisera ce nouveau système numérique. Stephan Spielberg avec «Jurassic Parc (1993)» appliquera son nouveau procédé DTS identique au système français LC Concept. Un procès a eu lieu entre les deux firmes industrielles.

 

Ces indices, bien que techniques permettent de posséder quelques outils quasiment infaillibles s’ils sont adroitement appliqués afin de situer un film dans le temps.

 

Les actrices et les acteurs permettent de contexter l’œuvre cinématographique de façon précise. Quant à la musique de film elle donne le ton et le temps du film. Le musicien Ennio Morricone a composé la majorité des films de Sergio Léone ajoutant à ces films un côté parodique qui faisait décoller émotionnellement et politiquement les œuvres. Quant à Bernard Hermann qui a composé pour la majorité des films d’Alfred Hitchcock, il multiplia l’effet des scènes tournées, grâce à une musique dynamique à contrepoint plutôt qu’illustrative. Sa collaboration avec François Truffaut n’a pas bien fonctionné dans: «Fahrenheit 451(1966)» et «La mariée était en noire(1967)»

 

Une utilisation de l’œuvre comme document d’histoire

Grâce aux nombreuses versions du même film, il peut y avoir une mauvaise utilisation de l’œuvre comme document d’histoire.

 

Un producteur peut, comme c’est souvent le cas, ne pas laisser le droit de montage final au réalisateur, comme le droit d’auteur l’exige en Europe, où la vision du cinéma est autre vis à vis des artistes-réalisateur. «Les portes du paradis» de Michaël Cimino(1980) avec Kris kristofferson, John Hurt et Isabelle Huppert, a été littéralement abimé au montage par son producteur. Michaël Cimino, plusieurs années plus tard, a fait sa propre version: celle qu’il aurait souhaité présenter en salle à sa sortie. Il parvient ainsi à faire renaître son film, cette œuvre qu’il faudra, reconnaître, authentifier. Sur le plan intellectuel et historique, cette idée de vouloir dater un film nous amène à une réflexion sur le cinéma d’hier et aujourd’hui.

 

La connaissance esthétique est indispensable pour situer un film. Il faut parcourir les mouvements cinématographiques, l’Expressionnisme, le Néoréalisme, le Surréalisme, l’Expressionisme allemand, la Nouvelle Vague. Il faut aussi parcourir les genres: le western, les films romantiques, le film noir, le film fantastique, le film d’anticipation ou de science fiction, le film psychologique, le péplum, le film historique, le film à costumes.

 

Prenons le western, le genre américain par excellence. Pourtant avec: «Pour une poignée de Dollars (1964)» de Sergio Léone, remake de: «yojimbo (1961)»  d’akira kurosawa fait parti d’une trilogie avec: «Et pour quelques dollars de plus (1965)», «Le bon la brute et le truand (1966)», le western spaghetti dans les années soixante apparait, au moment où ce genre américain perd du terrain. Le pays fondateur du genre remet en question son mode de vie, nuance son identité en créant des sous-genres capable d’occuper les esprits en attendant de trouver les productions qui s’imposeront d’elles mêmes grâce à leur thématique.

 

En définitive dater un film revient à examiner l’histoire, l’univers social, les conditions de production des projets.

 

Les films récents n’échappent pas à la règle de plus en plus proche de la réalité, ils jouent un rôle dynamique dans la réactivation de la mémoire, et dans la prise de conscience des problèmes de notre société.

 

Les crises sociales et économiques stimulent les cinéastes

Michael Moore avec: «Capitalism A love Story (2009)» enquête sur toutes les combines qu’encourage ce système favorable aux puissants; mais jamais aux contribuables. Son vêtement de clown reconnu de tous lui permet de dire tout haut ce que les citoyens disent tout bas. Il donne la parole à ceux qui ne l’ont jamais. Il montre l’absurdité d’un système qui ne se soucie pas des femmes et des hommes, mais des espèces sonnantes. Peu importe que des familles soient à la rue, pourvu que cela rapporte, détournant le beau discours de Roosevelt. Ce dernier ne verra hélas pas la fin de la guerre et ne pourra pas faire de l’Amérique une société où le citoyen moyen trouvera le bonheur pour lui et sa famille. Michael Moore promène sa caméra avec détermination sans se lasser. Il fait de l’histoire en montrant les débuts du capitalisme et donne à Jésus le rôle de résistant qui oppose l’amour à la finance. Les films dans le film sont nombreux outre les films en super 8 sur son enfance. «Jésus of Nazareth(1977)» de Franco Zefirelli permet de faire des parallélismes et montrer que le temps passant, même avec la technologie, rien ou presque rien n’a changé dans le fond: «l’homme est» toujours, comme disait Thomas Hobbes «un loup pour l’homme». La scène finale est très significative Michael Moore entoure Wall Street d’un ruban jaune signalant le lieu du crime, et le film bascule dans la série policière si chère au peuple américain. 

 

Buongiorno notte

Après cet excellent film: «Buongiorno notte (2003)» sur l’enlèvement d’Aldo Moro par les brigades rouge, Marco Bellochio avec «Vincere (2009)» nous plonge un peu plus dans la fiction. En prenant au départ une solide base documentaire, il va nous faire errer psychologiquement dans l’histoire pour faire l’expérience de l’authenticité «narrative-historique». Marco Bellochio fait parti d’un groupe de cinéastes, révolté par le système politique italien fait d’arrangements et de compromis avec la mafia. Avec: «Les poings dans les poches (1965)» il s’engage politiquement. Il reste avec Nanni Moretti né en 1953, un surveillant de la société italienne.

 

Vincere

«Vincere» traite d’un chapitre méconnu de l’histoire de la vie privée du dictateur italien Benito Mussolini (1883-1945). Marco Bellocio analyse les désirs intimes du Duce au travers de sa liaison avec Ida Dalser, une jeune femme riche éperdue d’amour qui a sacrifié sa fortune pour lui permettre de devenir  un homme politique puissant à la présence imposante. Elle lui a donné en novembre 1915 son premier fils Benito Albino. La tragédie du film est que Mussolini était déjà père d’une fillette de Rachèle Guidi avec laquelle il s’est marié le 17 décembre 1915. Devenu maître de l’Italie en 1922, Mussolini fit détruire ou falsifier toutes les preuves de sa liaison avec Ida Dalser qu’il fit interner en 1926 en prenant soin de la séparer de son fils, elle est morte  en 1937. Le jeune Mussolini sera interné également et disparaitra comme sa mère victime de l’insensibilité et l’égoïsme de son père en 1942.

 

La réalisation de ce film témoigne d’une esthétique remarquable. Marco Bellochio a astucieusement fait alterner les archives avec des scènes de fiction au point que parfois une confusion voulue s’opère. Filipo Timi joue les Mussolini père et fils avec une conviction étonnante. Giovanna Mezzogiorno interprète Ida Dalser avec un onirisme qui parfois tire notre sensibilité vers elle.

 

Rapt de Lucas Belvaux

Les Français s’intéressent à leur histoire mais de manière, plus anecdotique. Ils aiment les personnages dans lesquels se glisse l’aventure. Ainsi : « Stavisky » d’Alain Resnais par exemple, un personnage puissant qui a fait jaser les financiers qui se disaient invincible dans leur domaine. Dans: «Rapt», un autre as de la finance et de l’industrie intéresse le cinéaste Lucas Belvaux. Il n’a pas la faiblesse de tomber dans les poncifs lorsqu’il choisit de raconter l’histoire du baron Empain. Il montre sa famille désintégrée par cet enlèvement les esprits s’échauffent, les ambitions s’aiguisent oubliant l’essentiel: un homme va peut être mourir. Tout cela avec une interprétation hors pair d’Yvan Attal. Le film parvient à dépasser les conventions pour nous mener vers une réflexion sur le sens de la possession lorsque la vie semble ne plus vous appartenir.

 

Parcourir des dates, n’est-ce pas grâce au cinéma une façon d’explorer le temps, et de donner un sens à l’histoire qui à chaque film révèle sa vraie nature.

 

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