Bruxelles et Montréal se réunissent pour défendre une pièce née à Moscou en 2002. C’est l’occasion pour le spectateur de voir se confronter différentes approches théâtrales. Un échange entre l’idée et la forme est privilégié pour ouvrir le jeu au public. La mise en scène d’Olivier Coyette prône manifestement la concession mais sans faiblir. C’est plutôt le parcours complexe entre le personnage incarné et distancié qui nous est dévoilé.

Terrorisme, écrit par les frères Oleg et Vladimir Presnyakov, est le choix judicieux d’une pièce qui a déjà une réputation bien fondée, gagnante du prix de la meilleure nouvelle pièce dès sa sortie en Russie au début des années 2000. La coproduction du Théâtre du Grand Jour et du Théâtre de Poche de Bruxelles sera présentée jusqu’au 12 décembre 2009 Aux Écuries (7285, rue Chabot, Montréal). Sylvain Bélanger, directeur du Théâtre du Grand Jour, décrit bien ce qui fait le succès de la terreur dans nos vies modernes : la terreur est une panique instantanée qui mobilise l’homme, lui fait perdre son humanité jusqu’à le rendre impitoyable. Ainsi, les personnages sont l’incarnation d’êtres sans nom portant la cruauté sociale jusque dans l’intime. Plusieurs scènes témoignent de la facilité avec laquelle la violence s’immisce dans le monde : alerte à la bombe, jeux sexuels malsains, pendaison au boulot, préméditation de meurtre xénophobe, brutalité entre policiers militaires… le cœur humain cesse de battre.

Un travail d’équipe solide pour décrier l’ignominie ambiante. Chaque comédien prête main-forte pour les changements de décor pendant l’entracte. Tout est montré. Les scènes n’en perdent pas leur impact. Au contraire, ce concept, encore trop peu répandu sur nos scènes contemporaines, a pour avantage de faire preuve d’un propos consistant sans éprouver le besoin de la fiction pour éblouir. Un manifeste porté par l’acteur pour se défendre comme citoyen avant de se complaire.

Pour que prenne forme cette pièce, la distribution est composée de plusieurs acteurs complets. Nicole Valberg, Monique Miller, Christian Crahay, Mani Soleymanou et Benoît Van Dorslaer font preuve d’une grande intelligence de jeu, amplifiant les composantes du personnage sans en tuer la densité. Dommage que l'expression se traduise trop souvent par le cri, notamment chez Fabien Cloutier. Sharon Ibgui, suivant le même pli, trouve néanmoins une place de choix dans les passages humoristiques.

La principale qualité de Terrorisme : les empreintes de sa recherche scénique. Les imperfections donnent de l’âme à cette œuvre qui sort des chantiers balisés de pièces qui clament le renouvellement de la forme au profit d’une suite de clichés. Pour sa prise de position décalée, Terrorisme est un incontournable.

Renseignements : Auxecuries.com et la billetterie : 514 328-7437.