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Igor Bely, enfant de la mer, a vaincu le Pacifique

Écrit par Henri Durrenbach
22.02.2009
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  • catamaran(攝影: / 大紀元)

C’est le 21 novembre dernier, au terme d’un périple de quelque quatorze mois à travers le Pacifique, dont le nom rassurant ne doit pas faire perdre de vue qu’il est périodiquement de fort méchante humeur, qu’un jeune Français de 25 ans, Igor Bely, étudiant à l’université Claude Bernard Lyon 1, a fini de le défier sur une embarcation des plus fragiles. En réalité fort rompu de longue date aux choses de la mer, Igor a choisi un bateau entre coque de noix et puce d’eau, un tout petit catamaran de 25 pieds « Clairefontaine 25 » sans cabine et dépourvu de tout confort pour privilégier la vitesse.

Il s’agit donc d’une grande première, un tel exploit n’ayant jamais été réalisé.

Le Pacifique

Est-il besoin de présenter le Pacifique ? Selon le Larousse, c’est « la plus grande masse maritime du globe, entre l’Amérique, l’Asie et l’Australie, représentant la moitié de la superficie occupée par l’ensemble des océans ».

Le parcours

Le parcours en mer consistait précisément à relier Valparaiso (Chili) à Bundaberg, au nord de Brisbane (Australie) en passant par l’Île de Pâques, puis par Mangareva, un atoll des îles Gambier où il a fallu mouiller en décembre 2007 en raison d’une avarie survenue à l’esquif, qu’à cette occasion le jeune navigateur a su modifier de façon essentielle, de telle manière à permettre automatiquement la remise à flot en cas de chavirement.

La traversée a repris à partir du 27 avril 2008 pour aboutir le 13 mai à Tahiti où le jeune marin et son coéquipier brésilien Roberto Pandiani, 50 ans, dit « Beto » ou « Betão », un autodidacte jouant un rôle de coordination, étaient attendus pour y être fêtés ! Étant donné le retard pris à Mangareva, il a été décidé que Tahiti serait la dernière escale principale (les autres n’ont été que très courtes et techniques) avant la Nouvelle-Calédonie.

Il s’agissait d’atteindre en juillet 2008 l’Île des Pins pour quelques jours de repos et de prises de vue, tant de la part d’Igor que de Maristela Colucci et d’autres cameramen qui devaient les rejoindre par avion à l’appel de Roberto. La succession des problèmes survenus entre temps devait faire renoncer à cette étape. Le départ de toute l’expédition avait eu lieu en septembre 2007, juste après qu’Igor Bely ait reçu de Paris Match à La Sorbonne à Paris le premier prix du plus jeune reporter photographe dans la catégorie Nature et Environnement, particulièrement pour ses splendides photos de l’Antarctique, saisissantes de vie sauvage et de beauté.

Les sponsors

Est-il besoin de le dire, toute cette très originale aventure est brésilienne et a bénéficié du soutien financier et logistique d’importants groupes industriels, par le biais de leurs filiales brésiliennes : Mitsubishi Motors (Brésil), Semp Toshiba, Yahoo ! Brasil ; il y avait aussi un sponsor français, le fabricant de tissus spéciaux techniques Ferrari en région lyonnaise, qui a déjà naguère accordé son appui au Baron Bic (Coupe de l’America). Par ailleurs, Philippe Poupon, très connu dans les milieux de la mer n’a pas dédaigné d’apporter sa caution morale. Enfin, à tout seigneur tout honneur, citons la revue brésilienne Nautica, qui a consacré dans ses colonnes un suivi régulier à cette course sans précédent, pendant toute sa durée.

Les énergies

Bien entendu, pas d’émission de gaz à effet de serre, les énergies du tout petit bateau sont entièrement renouvelables : panneaux photovoltaïques, énergie électrique complémentaire prélevée sur l’allure générale (perte de un demi mile par heure, soit environ 1 kilomètre par heure), l’allure même étant due à la bonne utilisation du vent. L’eau douce est obtenue par un dessalinisateur manuel.

Igor Bely, enfant de la mer

Igor est né en 1983 à l’Île de la Réunion à l’occasion de l’accostage du voilier familial ; son père, astronome, ancien chercheur au CNRS est navigateur à travers tous les océans du monde… À l’âge de trois ans, Igor est la vedette d’un film de la télévision brésilienne tournée en 1986, dont le titre est l’équivalent de Les aventures d’Igor en Antarctique. En 1992, alors qu’il a neuf ans, c’est l’émission mondialement connue, Thalassa qui le choisit comme personnage central de son film Les passagers du Horn.

Son périple hors frontières perpétuel l’a conduit du Groenland à l’Antarctique en passant par les côtes Est des Etats-Unis, les Caraïbes, les Antilles, les côtes Est de l’Amérique du Sud, le Cap Horn, les Malouines et la Géorgie du Sud.

Ce qui ne veut pas dire qu’il ne mette jamais le pied à terre, car après des études primaires par correspondance par le biais du CNED et après avoir passé en 2000 et 2001 les diverses épreuves du baccalauréat à Saint-Pierre-et-Miquelon puis au lycée français de Montevideo, le voilà actuellement inscrit comme étudiant à l’université de Lyon I où il prépare librement une licence en mécanique des fluides. Par ailleurs, en dehors du français, il maîtrise parfaitement l’anglais, l’espagnol et le portugais… et s’essaie au russe.

Quelques extraits du journal de bord

Nous choisissons quelques extraits parmi les plus insolites et les plus représentatifs des incroyables réalités de la mer.

Le 23 juin dernier à 14 heures commence la course de 2.500 miles (près de 5.000 kilomètres) en ligne droite sans escale vers la Nouvelle-Calédonie. En fin de matinée du deuxième jour, « tout d’un coup, la mer est devenue très calme, plus de houle, plus de clapot, rien, comme si nous étions passés à l’abri d’une barrière de corail… quelques minutes plus tard, la mer est devenue foncée et peu après elle s’est mise à bouillir ici et là autour du bateau. C’était des millions de thons qui chassaient dans des bancs de sardines ! Il y avait tellement de sardines que la mer en était presque noire et quand les thons les attaquaient, on avait l’impression d’être dans un jacuzzi géant ! Je n’avais jamais vu autant de poissons d’un coup. Je n’ai pas osé mettre la ligne car les thons avaient l’air vraiment gros. Plus tard, dans l’après-midi on a attrapé notre premier poisson, une petite daurade coryphène d’environ quatre kilos. On a tout de suite sorti les citrons, la sauce soja et le wasabi et on s’est gavé de poisson cru. Cela change du lyophilisé ! »

Mais le 27 juin, alors que 300 miles venaient d’être couverts en moins de 48 heures, voilà qu’un incident grave risque de tout compromettre : Betão fait remarquer que la barre transversale avant, tenue par deux boulons est en train de se détacher d’une des deux coques et Igor doit tenter de passer deux bouts (cordages) par-dessous la coque concernée (extrêmement difficile en pleine mer) pour les attacher à la barre transversale avec le plus de tension possible pour lui interdire tout jeu. Cette réparation de fortune inévitablement de courte durée devait permettre de joindre les Îles Cook, où les consolidations ne pouvaient néanmoins être que sommaires.

« On est assez fatigués mentalement par cette grosse casse, ça fout le moral à zéro… La sensation de ne pas avoir confiance dans le bateau dont on dépend totalement n’est pas évidente à vivre… Espérons que ce ne soit qu’un mauvais moment à passer car l’Australie est chaque jour plus proche ».

Que fait-on en mer?

« Souvent les gens me demandent : tu ne t’embêtes pas en mer, tu trouves des trucs à faire ? En fait ce sont des tas de petites choses, sans importance ou très importantes, des petites choses qui prennent un certain temps. Il y a toujours, sur un bateau, à réparer, à changer ou à améliorer (chez nous, c’est surtout à réparer !)…, faire à manger, regarder la mer ou lire un peu, et la journée passe presque vite ! En ce moment je suis en train de lire un ouvrage que m’a donné une de mes tantes : Qu’est-ce que je fais là ? Je ne sais pas si c’est fait exprès, mais je trouve que le titre va très bien avec la situation ! »

La suite de l'expédition

Après la réparation sommaire des Îles Cook, nouveau départ dans l’espoir (déçu) de toucher la Nouvelle-Calédonie…

« La reprise a été dure, temps couvert et mer croisée, beaucoup d’eau sur le pont et nuits très humides, voire trempées ; c’est à des moments comme ceux-là qu’on se dit qu’il n’y a rien de mieux qu’un petit port bien abrité ! Au bout de trois jours, ça y est, la routine se met en place et on oublie presque qu’on est en mer… »

Mais le 20 juillet 2008, nouvelle casse et par chance, des vents faisant dériver le bateau, par le Nord de la Nouvelle-Calédonie, jusqu’aux Îles Vanuatu où il arrive le 22 juillet.

Il faut maintenant réparer sérieusement, opérer une véritable restauration de l’esquif, grâce à des pièces amenées par avion et mises en place aux Vanuatu.

Ceci a demandé pratiquement deux mois, après quoi Igor et son équipier brésilien ont pu terminer en trois semaines, grâce à une mer plus favorable qu’espéré au départ, leur incroyable traversée de quelque 16.000 kilomètres, soit un tiers de tour du monde.

À 25 ans, comme nous l’avons déjà suggéré, Igor Bely a l’étoffe d’une valeur chevronnée et marquante du nautisme mondial : il a à son actif plus de 20 expéditions polaires (spécialement dans l’Antarctique) et est rompu à toutes les difficultés des croisières en haute mer par tous les temps.

Remerciements

Tous nos remerciements pour la qualité et le caractère très documenté de l’information qui nous a été fournie par Igor Bely lui-même, qui nous a de même transmis la photo que nous publions, mais aussi à Pauline Ladet, elle-même étudiante à Lyon et qui a joué parfaitement le rôle de secrétaire permanente de l’expédition. Nous remercions également Kenn Back, résidant en Uruguay, ami de la famille Bely, resté en liaison avec Igor et à qui nous devons en partie le récit des incidents et anecdotes que nous rapportons.

Pour en savoir plus : http://igorbely.free.fr/

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