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Landscape total

Écrit par Mélanie Thibault, La Grande Époque - Montréal
17.04.2009
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  • Mathieu Gosselin dans une scène de Maldoror paysages (攝影: / 大紀元)

Nous plongeons dans le paysage d’un auteur original, souvent comparé à Rimbaud et précurseur du surréalisme. Lautréamont ne bénéficiera jamais du succès que sa littérature connaît à l’heure actuelle, trop subversif pour son époque (fin XIXe) et coiffé d’une mort prématurée à l’aube de ses 24 ans. Disparu en 1870, pendant l’invasion de la France par les Prussiens, il laisse un petit volume d’œuvres, mais d’une grande qualité.

Gertrude Stein décrivait le théâtre fragmenté comme un landscape, un paysage qui puisse contenir autre chose qu’une intrigue haletante où seule l’action prévaut. Hans Thies Lehmann le reformule clairement dans son ouvrage Le théâtre post dramatique. Cette définition est devenue un véritable courant contemporain, et nous avons la grande chance d’en voir tous les ressorts dans Maldoror paysage, présenté à Espace libre.

Oser dévoiler les ficelles d’une situation avec toute la cruauté qu’elle présente, avec ingéniosité, humour et talent : voilà ce qu’Olivier Kemeid propose et il le fait dans une perspective étonnante. Dans une constante brisure de la forme d’expression esthétique, le spectateur est appelé à passer du spoken word au travestissement sans autre lien que la voix du maître de cérémonie inspirante du comédien, Mathieu Gosselin, faisant sa popote en regardant se produirel’action. L’histoire est simple : un être rejeté par les autres humains dès l’enfance décide de devenir Maldoror et de répondre à sa cruauté intérieure par de multiples assassinats.

Cette prise de liberté par rapport au texte original de Lautréamont libère la trame narrative et cède la voie à un dialogue entre l’acteur et le spectateur. Une découverte d’un véritable délice. De scène en scène, le plaisir de voir les défauts transformer le genre humain surpasse le divertissement d’une bonne interprétation. Un théâtre qui parle à tous sans tomber dans la facilité.

Les figures de style de Lautréamont sont transmises avec une adresse folle de la part de la distribution. Les comédiens jouent littéralement avec la sonorité des phrases du XIXe siècle dans un cadre radicalement moderne. L’espace s’impose et la lumière sectionne les tableaux sans épargner le dégoût qu’inspirent les situations et leurs personnages. Bref, au sortir de cette aventure gorgée de style, nous avons une idée plus claire de la réalité. D’où l’urgence extrême de transformer la forme et de taire le réalisme au théâtre. Peu de salles, ayant pourtant la réputation d’offrir un théâtre actuel, s’offrent cette audace de présenter l’imprésentable avec autant d’acuité. Un petit projet bien plus grand que l’on imagine.

Merci pour cette représentation, merci pour cette implication, merci pour ce désir profond de rendre la théâtralité abordable, vivante, grouillante de sueur et pleine de lucidité.

MALDOROR PAYSAGES

Création : Trois tristes tigres

Texte : Lautréamont

Montage des textes et mise en scène : Olivier Kemeid

Avec : Mathieu Gosselin, Pierre Limoges, Jean-François Nadeau, Vincent-Guillaume Otis, Elkahna Talbi

À Espace Libre

Du 9 au 25 avril 2009, 20 h

Billetterie : 514 521-4191  et à : espacelibre

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