L'énigme de l'abandon de queue des lézards

Écrit par Cordis Nouvelles
24.04.2009

Les animaux possèdent différents mécanismes de défense. Les porcs-épics déploient leurs piquants pointus, des fourmis de Malaisie déclenchent une combustion interne et des paresseux se mettent en boule bien serrée pour ressembler à des nids dans les arbres. Mais l'un des mécanismes de défense les plus étranges est celui de l'autonomie caudale, ou plus communément connu comme l'abandon de queue chez les lézards. De nouvelles recherches publiées dans le journal Évolution éclairent d'un nouveau jour ce qui détermine la capacité d'un lézard à abandonner sa queue lorsqu'il est attaqué par des prédateurs. Selon l'équipe de recherche gréco-américaine qui a dirigé l'étude, le facteur clé est le venin.

Observée sur de nombreux lézards, l'autonomie caudale se produit lorsque les vertèbres de la jointure entre la queue et le pelvis sont affaiblies et aisément cassables. Le lézard contracte fermement les muscles de l'arrière du pelvis, brisant ainsi les vertèbres et provocant la cassure de la queue. En se séparant de sa queue, le lézard espère que le prédateur se concentrera sur la queue, donnant ainsi au reptile suffisamment de temps pour s'enfuir.

Année après année, les experts ont émis l'hypothèse que la pression du prédateur contrôle la facilité avec laquelle les lézards abandonnent leur queue. Plus le nombre de prédateurs se nourrissant de lézards est élevé, plus la nécessité de s'assurer que la queue tombe grandit.

Malgré ces avantages, l'abandon de queue présente également des inconvénients : une perte de mobilité, un rythme de croissance plus lent et même un statut social inférieur, tous ces facteurs pouvant avoir un impact sur la vie du lézard. Les experts ont toutefois déclaré que cette capacité à abandonner sa queue devrait persister tant que des prédateurs rôdent dans les parages.

Dirigées par des écologistes de l'Université du Michigan, États-Unis, l'équipe de recherche a utilisé des tests de laboratoire en combinaison avec des mesures de terrain effectuées en Grèce continentale et sur quelques îles grecques de la mer Égée, habitées par différents types de prédateurs. Plus de 200 lézards insectivores de quinze espèces différentes ont été testés dans le cadre de l'étude. Des distinctions peuvent être faites entre les lézards qui ont abandonné leur queue et ceux qui ont gardé celle d'origine (une queue régénérée est généralement déformée).

Les écologistes ont ciblé des corrélations entre les niveaux d'autonomie et la présence ou l'absence de différents prédateurs des lézards sur les dix sites de collecte de l'étude. Le niveau d'autonomie mesure la facilité avec laquelle les lézards abandonnent leur queue. Selon les chercheurs, plus ce niveau est élevé, plus l'abandon de queue est facile.

Les chercheurs ont découvert, alors que des preuves de la théorie de la pression des prédateurs existent, que les prédateurs ne naissent pas égaux.

«Les seuls prédateurs réellement importants sont les vipères», explique le coauteur de la recherche, le professeur Johannes Foufopoulos de la School of Natural Resources and Environment et du Department of Ecology and Evolutionary Biology de l'Université du Michigan. «Dans la région de la mer Égée, les vipères sont des prédateurs spécifiques des lézards», ajoute-t-il. «Il est donc logique, rétrospectivement, que la principale défense des lézards soit dirigée contre leur ennemi principal, la vipère. Mais jusqu'ici, personne n'avait fait le lien.»

Selon le professeur Foufopoulos, la particularité des attaques de vipères joue un rôle clé. D'après le chercheur, l'abandon de la queue n'est pratique au cours d'attaques non venimeuses que lorsque la queue est fermement maintenue par le prédateur. La capacité d'abandonner sa queue aussi vite que possible devient particulièrement importante lorsqu'une vipère découvre ses crochets et mord. Il ajoute encore que même une éraflure sur la queue du lézard peut injecter une dose létale de venin.

«Vous perdez votre queue, mais vous vous en sortez vivant», ajoute le professeur Foufopoulos. «Et une autre queue peut toujours pousser.»

L'Université d'Athènes et le Musée d'histoire naturelle de Crète, en Grèce, ainsi que l'Université de Yale aux États-Unis ont également participé à l'étude.

Pour de plus amples informations, consulter :

Évolution

[www3.interscience.wiley.com/journal/117958524/home]

Université du Michigan

[www.umich.edu]

Université d'Athènes

[Uoa.gr/uoauk/uoaindex.htm]

© Communautés européennes, 1990-2009

[Cordis.europa.eu]